Patrimoine : 12 sites en péril à sauver d’urgence en Europe

Construit à la fin du XVIIe siècle, le palais vénitien Ca' Zenobio est un bel exemple d'architecture baroque tardive. Depuis 1997, le bâtiment est inoccupé et exposé à de sérieuses détériorations. Les éléments artistiques et architecturaux pourraient être perdus de façon irréversible si aucun programme de conservation n'est acté.

Le paysage des cinq îles grecques, Amorgos, Kimolos, Kithira, Skimos et Tinos, est menacé par l'implantation de parcs éoliens. Le gouvernement grec est favorable à l'installation de ce type d'infrastructures à proximité des sites archéologiques et des zones protégées. Les éoliennes auront bien sûr un impact visuel sur le paysage de ces îles, mais elles affecteront aussi leur morphologie. Elles risquent de mettre en danger leur flore et leur faune et, par conséquent, les secteurs agricoles, l'élevage et le tourisme. Elliniki Etairia - Société pour l'environnement et le patrimoine culturel, qui dénonce la transformation de ces paysages emblématiques des Cyclades en zones industrielles, milite pour la mise en place de solutions énergétiques alternatives.

L'Achensee Steam Cog Railway, en Autriche, est le seul chemin de fer public au monde qui, depuis son ouverture en 1889, utilise encore tout l'équipement d'un système ferroviaire de la fin du XIXe siècle : locomotives à vapeurs, voitures de voyageurs, salle des machines, ponts, rails, barrages. En faillite depuis 2020, la compagnie Achensee n'est plus en mesure d'entretenir ce réseau historique. Véritable pépite du patrimoine industriel européen, cette ligne ferroviaire risque de se détériorer rapidement si un important sauvetage financier n'est pas acté.

Ancien ermitage, la chapelle de San Juan de Socueva est située dans les montagnes rocheuses d'Arredondo dans le nord de l'Espagne. Datée de 660-680 après J.-C., elle conserve sa fonction religieuse mais son état est préoccupant. Le portique est dans un état de délabrement avancé. Le site lui-même est vulnérable puisqu'ouvert jour et nuit.

À l’instar de nombreux bâtiments religieux en France et en Europe, l'église Saint-Denis de Saint-Omer (Hauts-de-France) présente un état alarmant. Partiellement médiévale, elle possède le plus ancien clocher gothique conservé dans le Nord de la France et abrite de précieux décors intérieurs et éléments mobiliers, datant du XVe au XIXe siècle, en particuliers plusieurs autels uniques en France réalisés par des corporations de métiers. Le toit du sanctuaire est aujourd'hui fortement fragilisé tandis que les oeuvres d'art ne peuvent bénéficier de conditions de conservation optimales. La municipalité de Saint-Omer ne dispose pas de fonds suffisants pour préserver le site et souhaite en faire un lieu d'apprentissage et d'expérimentation dans le domaine de la restauration patrimoniale.

Au lendemain de la Première guerre mondiale, Konrad Adenauer, ancien maire de Cologne qui deviendra chancelier de la République fédérale d'Allemagne, propose de transformer le système d'enceintes de la ville en espaces verts. Cette initiative aboutit à la création d'un paysage urbain unique qui préfigure la « ville européenne » moderne. Victime de la croissance de Cologne, ces espaces verts, véritables poumons de la ville, ont été progressivement grignotés par le béton et les infrastructures urbaines.

Construit en 1908 par l'architecte bulgare Dimitar Nachev, le Théâtre moderne de Sofia fut l'un des premiers cinémas d'Europe, avant de devenir un important centre culturel en Bulgarie. Rescapé des bombardements de 1944, le bâtiment a dû fermer ses portes en 2013 et est aujourd'hui laissé à l'abandon. Son toit partiellement effondré et ses vitres brisées favorisent les infiltrations, les éléments de décors de sa façade sont fragilisés et il est régulièrement la cible d'actes de vandalisme.

Inauguré en 1974, le bureau de poste central de l'architecte macédonien Janko Konstantinov témoigne du style architectural moderniste de l'après-guerre. La structure en béton armé, en forme de lotus, devait symboliser la reconstruction de la ville de Skopje (Macédoine du Nord) après le lourd tremblement de terre de 1963. Un incendie survenu en 2013 a gravement endommagé les vitrages originaux du dôme, les peintures murales, le mobilier et l'éclairage. Démuni de toit, le bâtiment est exposé aux intempéries. L'Institut de recherche sur l'environnement, le génie civil et l'énergie, qui a fait la proposition d'inscription au programme des 7 sites les plus menacés en 2021, plaide pour la reconversion du site en centre culturel et social.

Oeuvre de l'architecte allemand Herman Bollé, le cimetière de Mirogoj à Zagreb a été frappé par un tremblement de terre en mars 2020. Murs fissurés, sols endommagés, éléments architecturaux et décoratifs effondrés : les dégâts sont lourds pour ce grand complexe d'architecture néoclassique. La pandémie de Covid-19 a par ailleurs ralenti le diagnostic des dégradations.

Crée en 1570, le jardin Giust à Vérone est l'un des plus beaux exemples de jardin typique de la Renaissance toscane. Il abrite notamment un labyrinthe de buis, une allée centrale bordée de cyprès et un théâtre de plein air. De violents orages survenus en 2020 ont causé d'importants dégâts sur l'ensemble du site. Statues, arbres, labyrinthe, système d'éclairage et d'irrigation nécessitent des travaux de remise en état. « Un plan de conservation pour le jardin Giusti avec une taille stratégique et une étude botanique doit être mis en place et réalisé dans le but de faire face à toute nouvelle menace naturelle ou environnementale », a déclaré le groupe consultatif.

Syncrétisme artistique entre l'Orient et l'Occident, le monastère Dečani, doté de fresque de style serbo-byzantin et d'architecture et de décoration sculpturale romano-gothique, est un des monuments médiévaux chrétiens orthodoxe les mieux préservés d'Europe. Malgré une surveillance continue, le monastère a été la cible de quatre attaques au mortier par des extrémistes locaux entre 1999 et 2007, ainsi que d'une tentative d'attaque terroriste par l'ISIS en 2016.

Située sur la « route de la soie », axe majeur entre l'Europe et l'Asie, la forteresse de Narikala est l'un des plus importants sites patrimoniaux de Tbilissi et l'un des plus anciens monuments historiques de Géorgie. La première mention de la forteresse dans les archives historiques géorgiennes date de la fin du IVe siècle. En 1827, un tremblement de terre a détruit la partie intérieure de la fortification et a gravement endommagé les murs extérieurs. Aucun programme de restauration n'a jamais été mené. L'état de délabrement général de la structure a été aggravé par les effets nocifs du tourisme de masse. Un téléphérique de grande capacité, construit en 2012, a permis de doubler l'accès des visiteurs.