À Vaulx-en-Velin, la mairie envoie les incivilités du quotidien au tribunal

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À Vaulx-en-Velin, la mairie envoie les incivilités du quotidien au tribunal

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Ce dispositif inédit est testé à Vaulx-en-Velin, dans la périphérie de Lyon.
Ce dispositif inédit est testé à Vaulx-en-Velin, dans la périphérie de Lyon.
© AFP - Jeff Pachoud

La ville de la banlieue lyonnaise met en place un dispositif, avec un lien entre mairie et justice, pour lutter contre le manque de civisme dans ses rues, comme le tapage ou les déversements de produits sur la voie publique.

À Vaulx-en-Velin, 2021 sera synonyme d’innovation sur le terrain de la justice. Cette année la ville, située en banlieue de Lyon, met en place, avec le procureur de la République, un dispositif de traitement des incivilités qui doit permettre aux victimes d’être entendues et aux auteurs d’être jugés dans les 15 jours suivant l’infraction. L’objectif est simple : apporter une réponse rapide à des faits qui troublent le quotidien et entretiennent parfois un sentiment d’abandon. 

Car la question des incivilités revient inlassablement sur la table, dans les conseils de quartier. Avec des institutions, reconnait la maire de Vaulx-en-Velin, souvent considérées comme défaillantes. D’où ce nouveau dispositif, "réponse aux incivilités peu suivies de conséquences, tant pour les victimes que pour les auteurs", estime Hélène Geoffroy. 

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Réparer et empêcher que les choses ne s'aggravent

"Nous avons choisi de regarder plus précisément les questions d’entrave à la libre circulation de la voie publique (divagation de chiens dangereux, occupation de la voie publique, tapage) et tout ce qui est lié au déversement de produits sur la voie publique", explique l'élue. Le deal ou les rodéos urbains continuent de relever d’une justice plus classique.

"Tout ce qui trouble le quotidien des habitants et pour lesquels les uns et les autres disent 'À quoi ça peut servir d’en parler'" : des faits qui remontent des conseils de quartier ou des rencontres de voisinage. Et que la mairie de Vaulx-en-Velin aimerait réparer et empêcher, via de la prévention, que les choses ne s'aggravent. "C’est une façon de répondre rapidement."

Concrètement, "15 jours seulement vont s’écouler entre la constatation de l’infraction et son traitement", explique Hélène Geoffroy_. "En nous associant, c’est aussi un message pour montrer que les institutions sont au plus proche des habitants."_

Une proposition du parquet  

La proposition a émané du procureur de la République, après plusieurs rencontres du comité local de sécurité et de prévention de la délinquance. "Avec la présence d’un collège d’habitants dans ce comité, ils ont pu exprimer leur mécontentement, leurs difficultés face à ces sujets sans réponse", détaille la socialiste, ancienne secrétaire d’État chargée de la Ville entre 2016 et 2017, désormais vice-présidente de la métropole de Lyon, déléguée à l'égalité des territoires, sous la présidence de l'écologiste Bruno Bernard.

Un domaine qui relevait soit du maire, "qui pouvait faire des rappels à l’ordre", soit de l’officier du ministère public "mais essentiellement sous l’angle d’amendes qui n’avaient pas d’efficacité extraordinaire", reconnaît le procureur de Lyon, Nicolas Jacquet. "Cela va se passer à la maison de la Justice et du Droit. Les auteurs vont être convoqués devant le délégué du procureur et le représentant du maire. C’est toute la force du dispositif : au-delà du rappel à la loi ou à l’ordre, on aura une capacité d’agir ensemble.  Soit moi au titre de la réponse pénal, avec des réparations par exemple, du travail non-rémunéré, soit la mairie au titre de l’accompagnement parental, des mesures sociales pour accompagner les uns et les autres", ajoute le procureur_. _

Une volonté de "pédagogie"

Pourquoi maintenant ? Parce "nous sommes dans un moment où le ministre de la Justice s'est fortement positionné sur cette question de la justice de proximité et où des moyens ont été attribués", explique Nicolas Jacquet qui insiste sur une volonté de "pédagogie" et de "prévention" pour éviter "la réitération". "On est loin de la comparution immédiate et de la réponse répressive qui doit être mise en œuvre pour les faits les plus graves !", tient à préciser le procureur. 

S’agissant des mineurs, ajoute-t-il, ils seront convoqués avec leurs parents. "La force du dispositif c’est la présence de la protection judiciaire de la jeunesse, qui fera systématiquement une évaluation de la situation pour savoir si cela relève d’un rappel à la loi en présence des parents ou s'il faut aller plus loin". 

Deux postes spécifiques ont été créés. Un délégué du procureur et une chargée de mission, "qui connaissent bien ces thématiques", seront mobilisés sur le dispositif. Les premières audiences auront lieu fin janvier. Si cette expérience de justice de proximité, soutenue par le garde des Sceaux, s’avère concluante, elle pourrait s’étendre au-delà de la banlieue lyonnaise.

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