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Vacciné et contagieux, c’est possible?

Les vaccins contre le Covid-19 sont efficaces pour prévenir les symptômes de la maladie, mais on manque encore de données pour affirmer qu’ils empêchent la transmission du virus, même si c’est probable

La plupart des essais n'ont pas cherché à savoir si les personnes vaccinées avaient été infectées par le coronavirus.  — © Jean-Christophe Bott/Keystone
La plupart des essais n'ont pas cherché à savoir si les personnes vaccinées avaient été infectées par le coronavirus.  — © Jean-Christophe Bott/Keystone

Trop rapides alors que des flous demeurent, ou au contraire trop lentes: les campagnes de vaccination lancées dans le monde suscitent moult interrogations et polémiques. Nous faisons le point en une série d’articles

Lire l'épisode précédent: 

Un vaccin contre le Covid-19, et je reprends ma vie comme avant! Beaucoup en rêvent… Pourtant, les autorités de santé le martèlent: même après l’injection, il faudra continuer à porter le masque et à respecter les règles de distanciation sociale.

«Même si la vaccination protège de la maladie, on ne sait pas encore avec certitude si elle empêche aussi la transmission du coronavirus», peut-on lire sur la page d’information de l’OFSP consacrée aux vaccins. Cette apparente aberration peut décourager. Mais il existe des éléments laissant penser que ces vaccins auront bien un effet sur la contagiosité.

Vaccins très efficaces

Les essais cliniques menés sur les vaccins contre le Covid-19 visaient avant tout deux objectifs: déterminer s’ils étaient sûrs, et s’ils prévenaient les symptômes de la maladie. Pour le savoir, un grand nombre de personnes a reçu un vaccin, et un nombre équivalent de personnes une solution placebo. On a demandé ensuite aux participants de se signaler en cas de symptômes, afin de déterminer s’ils avaient été infectés par le virus ou pas.

Le vaccin réduit le risque de développer des symptômes, mais n’empêche pas forcément l’entrée du virus et sa multiplication au niveau des muqueuses nasales

Blaise Genton, chef de la policlinique de médecine des voyages et vaccination à Unisanté

Résultat, les vaccins se sont révélés très efficaces: ils ont prévenu la maladie chez environ 95% des personnes ayant reçu le vaccin de Pfizer/BioNTech, ou celui de Moderna. Le vaccin de l’Université d’Oxford et AstraZeneca affiche une efficacité moindre, avec une réduction de la survenue de symptômes de l’ordre de 70%, jusqu’à 90% si la première dose était une demi-dose plutôt qu’une dose standard.

Lire aussi:  Les résultats de l’essai Pfizer/BioNTech enfin publiés

La plupart de ces essais n’ont en revanche pas cherché à savoir si les personnes vaccinées avaient été infectées par le coronavirus. Ce qui n’est pas impossible. «Le vaccin est effectué de manière intramusculaire, il induit donc une réaction immunitaire généralisée. Celle-ci réduit le risque de développer des symptômes, mais n’empêche pas forcément l’entrée du virus et sa multiplication au niveau des muqueuses nasales», explique Blaise Genton, chef de la policlinique de médecine des voyages et vaccination à Unisanté.

Combien d’asymptomatiques?

Savoir si les personnes vaccinées contre le Covid-19 peuvent être infectées par le virus, sans pour autant tomber malades, n’a rien d’accessoire. En effet, il est désormais admis que les personnes asymptomatiques peuvent être contagieuses, et donc transmettre le coronavirus à d’autres si elles ne respectent pas les consignes de protection. Or le sentiment de sécurité induit par la vaccination pourrait inciter de nombreuses personnes à relâcher leurs efforts.

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Seule l’équipe de l’Université d’Oxford et d’AstraZeneca s’est spécifiquement intéressée à la question du nombre d’asymptomatiques parmi les personnes vaccinées, ce qui a nécessité des mesures assez contraignantes. «Chaque semaine, des prélèvements ont été effectués dans la muqueuse nasale des participants à l’essai clinique, pour savoir s’ils présentaient une infection, même sans symptômes associés», relate Blaise Genton.

Selon les résultats de l’essai publiés en décembre, le vaccin a permis de réduire de près de 60% le nombre d’infections, par rapport à ce qui s’est produit dans le groupe placebo, en tout cas lorsque la première dose de vaccin administrée était une demi-dose. «C’est moins spectaculaire que les 95% de protection contre les symptômes, mais cela suggère tout de même qu’il y a beaucoup moins d’infections chez les personnes vaccinées que chez celles du groupe placebo», poursuit le médecin.

Protéger les autres

Mi-décembre, la société Moderna a aussi annoncé des résultats encourageants sur les asymptomatiques. Lors de l’injection de la seconde dose de son vaccin, 38 personnes infectées mais sans symptômes ont été identifiées dans le groupe placebo, contre seulement 14 dans le groupe de personnes vaccinées, soit trois fois moins.

Blaise Genton se veut rassurant: «Je ne peux pas imaginer que ces vaccins n’aient pas un effet sur la propagation du virus, car ils réduisent nettement la survenue des symptômes. Or les personnes qui ont des symptômes sont bien plus contagieuses que les asymptotiques.» Si on ne peut donc pas garantir que les vaccins empêchent de transmettre la maladie à ses proches, ils en réduisent a priori nettement le risque. Se vacciner permet donc bien de se protéger, mais aussi de protéger les autres, au moins dans une certaine mesure.