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En juillet 2019, Catherine Flurin, la dirigeante et fondatrice de Ballot-Flurin, a rassemblé l’ensemble de ses équipes pour une réunion extraordinaire. A l’ordre du jour, un sujet plutôt surprenant : « Préparons-nous aux crises sanitaires ». Dans les semaines qui ont suivi, cette PME, qui figure parmi les leaders des cosmétiques et des produits de santé sur le marché bio, a modifié tous ses flux logistiques, jusqu’à relocaliser la plupart de ses fournisseurs. Nous sommes bien en juillet 2019, six mois avant l’apparition du Covid-19. Cette dirigeante n’a pas fait appel à une boule de cristal pour anticiper cette crise. C’est son intuition, fiable et précise, qui s’est manifestée. Elle a tout simplement senti venir cet événement, sans savoir ni quand ni comment il aurait lieu, mais avec suffisamment d’acuité pour prendre des décisions stratégiques en amont. Résultat : l’entreprise a enregistré une croissance de 40% de son chiffre d’affaires en 2020. Comme à son habitude, Catherine Flurin continue d’écouter son intuition visionnaire pour identifier les opportunités à saisir dans son secteur d’activité, les produits de cosmétique et de santé issus de la ruche, très présents chez les distributeurs labellisés bio.

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Une « connaissance immédiate et directe »

L’intuition, cette « connaissance immédiate et directe, sans recours au raisonnement », pour reprendre la définition du Larousse, peut devenir un facteur clé de succès, particulièrement en situation de crise. Peu (ou mal) connue du grand public, l’intuition fait encore l’objet de nombreuses idées reçues, notamment dans les esprits les plus cartésiens. Or, de nos jours, se priver de son intuition peut avoir d’importantes conséquences dans certaines situations – une perte de vitesse, d’assurance ou d’agilité, par exemple. Pour que l’intuition retrouve sa place naturelle dans nos façons de gérer les incertitudes et les situations complexes, un changement de regard radical et rapide est nécessaire dans le monde des entreprises, afin que chacun découvre ce qu’est vraiment l’intuition et comment elle compose et anime notre intelligence dans plusieurs domaines.

Mon expérience m’a conduite à observer deux attitudes très différentes à l’égard de l’intuition dans le monde de l’entreprise, en France comme à l’international. La première témoigne d’une confiance spontanée en l’intuition : c’est le cas, par exemple, en matière de prise de décisions pour des entrepreneurs, ou en matière de recrutement et de perception des non-dits au sein des équipes par les managers, etc. La plupart du temps, ces intuitifs confiants sont aussi des intuitifs… anonymes. Il est encore rare de voir les managers reconnaître avoir recours à l’intuition. C’est encore plus vrai dans les grands groupes des secteurs traditionnels.

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La seconde attitude est ouvertement sceptique à l’égard de l’intuition, de sa fiabilité et de son existence même, au-delà des mythes et des images d’Epinal volontiers genrées. Combien de fois m’a-t-on demandé si l’intuition était une particularité féminine ?

Pourtant, « l’intuition est la plus haute forme d’intelligence » : c’est le chercheur et directeur de l’institut Max-Planck, à Berlin, Gerd Gigenretzer, qui l’affirme. Notre espèce n’aurait pas survécu sans intuition, qui est probablement l’une des ressources clés de l’humanité en période de chaos.

Un puissant levier de performance

Depuis près de trente ans, les neurosciences se penchent sur cette faculté étonnante et multiple, et les découvertes récentes permettent de mettre en évidence les mécanismes de l’intuition et sa surprenante pertinence. Le professeur en neurosciences António Damásio a montré, par exemple, qu’il est impossible, biologiquement, de prendre une décision complexe sans se référer à notre ressenti. Une zone de notre cerveau, située derrière nos yeux, relie nos cortex supérieurs, siège de notre raisonnement, aux zones impliquant nos ressentis et nos émotions. C’est cette connexion qui permet la prise de décision complexe. Cette opération cognitive est très largement inconsciente. Ces travaux montrent à quel point notre pensée est corrélée à notre corps et à nos ressentis, par le biais notamment de nos intuitions.

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Comment décrire les mécanismes de l’intuition ? C’est la partie de notre intelligence qui est capable de faire des liens entre tout ce que nous avons vécu jusque-là et ce qui se passe dans le présent, dans les moments où nous avons une décision à prendre, par exemple. L’intuition est, en quelque sorte, la faculté de faire remonter la synthèse pertinente d’une masse colossale de données inconscientes.

Aujourd’hui, plus que jamais, il apparaît nécessaire et urgent de diffuser une vision plus appropriée et plus juste de l’intuition, afin de se saisir de ce levier de performance sans équivalent.

Trois spécificités à exploiter

Pour cela, nous avons besoin de repères clairs, afin d’identifier rapidement dans quels domaines nous pouvons nous appuyer sur notre intuition, mais aussi prendre conscience de nos freins et de notre fâcheuse tendance à tomber dans le piège des faux amis de l’intuition. L’intuition se manifeste dans trois domaines bien distincts. Il est probable que, en lisant ces lignes, vous soyez capable d’identifier la forme d’intuition la plus développée chez vous, mais aussi peut-être celle dont vous manquez le plus :

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– L’intuition contextuelle. Elle accélère les décisions qui apparaissent comme évidentes, ce qui permet de passer à l’action sans trop hésiter. Elle est très présente chez les entrepreneurs et dans les professions où il est nécessaire de prendre des décisions rapidement et avec assurance. Regardons les entreprises, trop nombreuses encore, où ne sont pas écoutées ces intuitions contextuelles, et qui entretiennent sans le vouloir un sur-place pénible, dans une sorte de mouvement brownien, aléatoire et désordonné.

– L’intuition relationnelle. Elle facilite le discernement dans les relations, notamment dans la gestion des équipes, la communication interpersonnelle, et dans les recrutements tout particulièrement. Elle est une des clés d’un management réussi. Un manque d’intuition relationnelle conduit à une déperdition de performance, voire à une augmentation des risques sociaux.

– L’intuition visionnaire. C’est cette capacité particulière à sentir les tendances, à voir venir une menace ou une opportunité, avec un temps d’avance. Imaginez un instant le gâchis de ces intuitions visionnaires qui ne sont pas prises au sérieux dans les entreprises, à l’heure où l’incertitude est devenue la norme…

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L’impact de l’intuition sur le business est considérable. Relever le défi du management intuitif ne relève pas d’une campagne de développement personnel, mais bien d’un courage managérial visionnaire.

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