Trésors du musée Marmottan-Monet

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« Claude Monet lisant » de Renoir : deux amis dans le vent

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Publié le , mis à jour le
Installé dans un élégant hôtel particulier du 16e arrondissement de Paris, le Musée Marmottan-Monet abrite les plus importantes collections au monde d’œuvres de Claude Monet et Berthe Morisot, deux des plus grands pionniers de l’impressionnisme. Pour ce troisième épisode consacré aux trésors exposés en ses murs, arrêtons-nous devant Claude Monet lisant (1872) d’Auguste Renoir, précieux témoignage de l’amitié entre deux géants de la peinture française !
Pierre-Auguste Renoir, Claude Monet lisant le journal
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Pierre-Auguste Renoir, Claude Monet lisant le journal, 1872

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Huile sur toile • 61 x 50 cm • Musee Marmottan Monet, Paris

Un homme fume tranquillement la pipe en lisant son journal. Banal ? Pas tant que ça ! Car ce trentenaire caché sous un chapeau melon et une belle barbe brune n’est autre que le père de l’impressionnisme, Claude Monet (1840–1926)… saisi à une époque où il lutte encore pour subvenir aux besoins de sa famille, sans imaginer qu’il va connaître la gloire vingt ans plus tard, et devenir l’un des peintres les plus célèbres au monde ! Quant à l’auteur du tableau, il s’agit du non moins fameux Auguste Renoir (1841–1919). De quoi rendre l’œuvre doublement passionnante…

Gros fumeur, le futur maître de Giverny était rarement vu sans sa pipe ou une cigarette. Par son traitement rapide de la fumée, qui s’échappe du petit fourneau de bois en quelques touches serpentines de gris, de blanc et de bleu, Renoir rend un bel hommage à son ami, qui s’emploie justement à saisir sur ses toiles ce genre de phénomènes éphémères ! Plongé dans les pages d’un quotidien (L’Événement) et nonchalamment accoudé au dossier de sa chaise, Monet apparaît comme un homme sûr de lui, moderne… et qui mène sa vie comme il l’entend !

Pierre-Auguste Renoir, Portrait de Camille Monet / Camille Monet et son fils Jean dans le jardin à Argenteuil
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Pierre-Auguste Renoir, Portrait de Camille Monet / Camille Monet et son fils Jean dans le jardin à Argenteuil, 1872 / 1874

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Huile sur toile • 61 x 50 cm / 50,4 x 68 cm • Musee Marmottan Monet, Paris / National Gallery of Art, Washington • © Bridgeman Images / © akg-images

Lorsqu’il brosse ce portrait, Renoir a tout le loisir d’observer les habitudes de son modèle, qui l’a invité dans sa maison d’Argenteuil où il vit avec sa femme et son fils de cinq ans. Et c’est pour le remercier de son accueil qu’il lui offre ce tableau, avec un autre du même format représentant son épouse Camille. Deux cadeaux que son hôte a précieusement conservés dans sa collection impressionniste.

Si Monet reste avant tout le maître du paysage, Renoir, lui, est un spécialiste du portrait. Au point de demeurer le seul impressionniste à avoir exercé en tant que portraitiste professionnel ! Auteur de chefs-d’œuvre du genre comme La Loge (1874), son Portrait de l’actrice Jeanne Samary (1877) et celui de la petite Irène Cahen d’Anvers (1880), le peintre répond à des commandes bourgeoises mais immortalise aussi régulièrement les membres de son entourage, dont ses amis peintres et leurs familles. Et en particulier le couple Monet, auquel il consacre une dizaine de toiles.

Pierre-Auguste Renoir, Portrait de l’actrice Jeanne Samary
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Pierre-Auguste Renoir, Portrait de l’actrice Jeanne Samary, 1877

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Huile sur toile • 56 × 47 cm • Pushkin Museum of Fine Arts, Moscou • © Heritage Images / Fine Art Images / akg-images

Outre un autre portrait similaire (le très réussi Claude Monet, Le liseur, 1872), où l’artiste émerge là encore d’un fond sombre légèrement rembranesque, Renoir représente son ami debout en train de peindre dans son jardin fleuri d’Argenteuil (1873), ou posant en intérieur, palette à la main (1875). Le peintre invité n’hésite pas non plus à croquer Camille Monet (née Doncieux) – que son mari représente lui-même dans de nombreuses toiles comme Les Promeneurs (1865), Femmes au jardin (1866), La Promenade (1875) et La Japonaise (1876) – en train de lire sur un canapé, ou assise dans l’herbe avec leur fils Jean.

Pierre-Auguste Renoir, Frédéric Bazille peignant à son chevalet
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Pierre-Auguste Renoir, Frédéric Bazille peignant à son chevalet, 1867

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Huile sur toile • 105 × 73,5 cm • Musée d’Orsay, Paris • © Bridgeman Images

Plus que des souvenirs intimes, ces tableaux sont les précieux témoins d’une amitié artistique qui a contribué à lancer le mouvement impressionniste. Une relation fertile qui débute en 1862 lorsque Renoir et Monet, tous deux âgés d’une vingtaine d’années, se rencontrent sur les bancs de l’École des Beaux-Arts de Paris. Tous deux y fréquentent l’atelier de Charles Gleyre avec Alfred Sisley, Camille Pissarro et Frédéric Bazille, qui deviennent également leurs complices. En désaccord avec leur professeur qui prône une idéalisation des formes « à l’antique », tous les cinq décident, sur l’impulsion de Monet, de quitter le cours au bout de seulement 15 jours !

Touches vives et lumineuses, sujets en plein air et scènes quotidiennes, priorité à l’atmosphère et au ressenti, étude des effets de lumière sur la perception… Tous partagent une nouvelle conception de l’art, libérée des diktats de la peinture officielle. Restés en contact, les camarades buissonniers se retrouvent régulièrement pour peindre en plein air, dans la forêt de Fontainebleau ou à Honfleur. De Chatou à l’Italie, Monet et Renoir voyageront et travailleront souvent côte à côte. En 1869, ils brossent ensemble une série de tableaux autour de la Grenouillère, un café-restaurant flottant de Bougival, dans les Yvelines, où se retrouvent les amateurs de baignade et de canotage. En quelques touches rapides, tous deux peignent le même îlot et rendent, dans un style assez proche, la fraîcheur du moment et les écailles de lumière qui miroitent à la surface de l’eau…

Claude Monet / Pierre-Auguste Renoir, Bain à la grenouillère / La grenouillère
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Claude Monet / Pierre-Auguste Renoir, Bain à la grenouillère / La grenouillère, 1869 / 1869–1869

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Huile sur toile • 73 x 92 cm / 66,5 x 81 cm • National Gallery, Londres / National Museum, Stockholm • © Bridgeman Images / © Photo Josse / Bridgeman Images

En décembre 1873, excédés d’être refusés des salons officiels, Monet, Renoir, Sisley, Pissarro et Edgar Degas, vite rejoints par Berthe Morisot, forment la Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs et lancent une série de huit expositions impressionnistes, dont la première ouvre en avril 1874. Le début de dix années fécondes pour Renoir, qui signe alors ses plus grands chefs-d’œuvre parmi lesquels Le Bal du Moulin de la Galette (1876) et Le Déjeuner des canotiers (1881). Contrairement à Monet, qui restera toute sa vie fidèle à l’impressionnisme, le peintre glissera, à partir de 1883, vers un autre style aux contours plus nets… mais sans jamais rompre totalement avec la lumière et la clarté de ce mouvement enchanteur qui a séduit le monde entier !

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