Lors de son allocution annonçant la généralisation du couvre-feu à 18 heures, le premier ministre Jean Castex a fait un nouvel appel du pied aux commerçants. Il les a invités à ouvrir les dimanches de janvier et sur le temps de la pause déjeuner afin d’éviter « les concentrations de clients ».

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Il s’agit bien d’une invitation puisque le gouvernement a fait le choix de ne pas systématiser l’ouverture des commerces les dimanches de janvier, même pour les soldes. À la place, des « concertations locales de quatre semaines sont menées par les préfets avec les partenaires sociaux et les collectivités », explique le cabinet d’Élisabeth Borne, la ministre du travail. Soixante-quinze préfets ont à ce jour publié un arrêté créant une dérogation au repos dominical. Ce système « au cas par cas répond à la diversité des demandes et des situations dans chaque département. Il a très bien fonctionné », estime-t-on du côté du ministère.

Pas de garanties supplémentaires

Chez les commerçants pourtant, le compte n’y est toujours pas. Le 11 janvier, plusieurs poids lourds du secteur avaient signé un communiqué commun appelant à « rendre automatiques » les autorisations d’ouverture dominicale, en dénonçant des « démarches lourdes et tardives ». La déclaration du premier ministre le 14 janvier ne s’est accompagnée d’aucune garantie supplémentaire.

« C’est évident qu’un commerçant qui a la possibilité d’ouvrir va le faire. On aurait préféré que Jean Castex invite les préfets à mettre en place des dérogations sur tout le territoire », explique Yohann Petiot, directeur général de l’Alliance du commerce. Cette organisation représentant 27 000 points de vente en France exige du ministère une « réduction du temps des concertations locales qui nous empêchent de répondre avec agilité à la crise », quitte à « prendre quelques libertés avec la loi comme ça a été le cas en décembre. »

Des recours juridiques

Ces dérogations ont été contestées au niveau local devant les tribunaux par la CGT, opposée au travail dominical au nom du droit au repos et au risque d’exposition des salariés et des clients à l’épidémie. Avec des fortunes diverses. Le tribunal administratif de Créteil, saisi en référé par la fédération commerce, services et distribution de la CGT, a « estimé que nous n’étions pas compétents et ne s’est pas prononcé sur le fond », assure Amar Lagha, le secrétaire général de la fédération. « Nous allons déposer un nouveau référé mais, cette fois, au nom de la CGT Val-de-Marne », ajoute-t-il.

Quelques jours plus tôt, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait de son côté suspendu à partir de lundi 11 janvier, l’arrêté préfectoral qui autorisait le travail dominical dans les établissements du Puy-de-Dôme.

Une atteinte au droit à la vie

La juridiction, saisie en référé par la CGT le 7 janvier, a estimé que cette dérogation risquait « d’augmenter de fait les jours de circulation et donc de contamination par levirus, alors même que la période officielle des soldes ne commence que le 20 janvier ». Et de conclure quele préfet avait « porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit à la vie, au droit au repos des salariés et à la protection sanitaire de la population ».

Au ministère du travail, cette décision de la justice administrative clermontoise est considérée comme un « acte isolé répondant à des réalités locales spécifiques », qui « ne saurait remettre en question la stratégie gouvernementale ». Jean Castex a même laissé entendre que les dérogations pourraient se poursuivre en février.