Elisabeth Moreno, ministre chargée de l'Egalité femmes-hommes, le 7 juillet 2020 à l'Elysée.

Elisabeth Moreno, ministre chargée de l'Egalité femmes-hommes, le 7 juillet 2020 à l'Elysée.

Xosé Bouzas / Hans Lucas via AFP

Elle découvre à la vitesse grand V la politique. Nommée en juillet 2020 ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, Elisabeth Moreno n'est pas près d'oublier son interview à LCI le 25 décembre. Ce ne fut pas un cadeau. "Est-ce que le privilège blanc existe ?", l'interroge le journaliste Jean-Michel Aphatie. "Evidemment qu'il y a... Moi, je ne veux pas l'appeler...", commence Elisabeth Moreno, avant d'être relancée par le journaliste : "Evidemment qu'il y a ?" La ministre reprend : "Il y a un privilège blanc."

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Que n'a-t-elle pas dit ! Elle reçoit des tombereaux d'insultes ("On m'a demandé de rentrer dans mon pays, j'ai rappelé que j'y suis") pendant qu'à l'Assemblée nationale, le groupe LREM s'enflamme. Au point qu'un ministre, cité par L'Express le 12 janvier, avoue avoir cru, "pour la première fois, que la majorité allait se briser". Plusieurs députés n'acceptent pas qu'un membre du gouvernement ait fait sien un concept explosif.

Le terme 'privilège blanc' tue la réalité

Aujourd'hui, Elisabeth Moreno confie : "Je regrette d'avoir repris le mot, il vient des Etats-Unis, il renvoie à une partie de notre histoire. A force de parler des mots, on ne parle plus des réalités. Le terme 'privilège blanc' tue la réalité."

Il n'a pas échappé à Elisabeth Moreno qu'Emmanuel Macron, dans son entretien à L'Express à l'origine de toute la polémique, n'avait pas formellement employé l'expression, tout en répondant à la question "Vous pensez qu'être un homme blanc de moins de 50 ans est un privilège ? ": "C'est un fait. On ne le choisit pas, je ne l'ai pas choisi. Mais je constate que, dans notre société, être un homme blanc crée des conditions objectives plus faciles pour accéder à la fonction qui est la mienne, pour avoir un logement, pour trouver un emploi, qu'être un homme asiatique, noir ou maghrébin, ou une femme asiatique, noire ou maghrébine. Donc, à cet égard, être un homme blanc peut être vécu comme un privilège même si, évidemment, quand on regarde les trajectoires individuelles, chacun a sa part de travail, de mérite."

Sortir du piège de la polémique

Elisabeth Moreno ne veut pas tomber dans "les combats victimaires qui vous enferment encore plus dans la situation qui est la vôtre" et n'entend pas davantage entrer dans une logique "conflictuelle", alors qu'elle dénonce volontiers "l'hystérisation mortifère des débats". C'est pour sortir de ce piège qu'elle a choisi de ne plus parler de "privilège blanc", une formule qui, note-t-elle, "renvoie aux indigénistes et aux racialistes".

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Au placard les mots qui fâchent, elle souhaite des actes et des résultats. La ministre déléguée chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances est décidée à se faire entendre autrement que par des polémiques au moment où le gouvernement présente à l'Assemblée nationale son projet de loi "confortant le respect des principes républicains". C'est au nom de l'apaisement qu'elle n'est pas favorable à l'amendement Bergé sur l'interdiction du voile pour les jeunes filles : on a dit "plus de polémique" ! En février, elle lancera une plate-forme pour lutter contre les discriminations, puis une consultation citoyenne, enfin une campagne d'information.

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