Vol d’un Salvator Mundi d’après Léonard de Vinci à Naples : le musée n’était pas au courant

Vol d’un Salvator Mundi d’après Léonard de Vinci à Naples : le musée n’était pas au courant
Le tableau, une copie du XVIe du Salvator Mundi de Leonard de Vinci, a été volé à Naples durant le confinement ©San Domenico Maggiore, Naples

Ni vu, ni connu. La police napolitaine vient de découvrir dans un appartement une copie du XVIe siècle du célèbre Salvator Mundi de Léonard de Vinci. Le musée auquel appartient l'œuvre, fermé depuis plusieurs mois en raison de la crise sanitaire, n’avait pas remarqué sa disparition…

Un seul être vous manque, dit-on, et tout est dépeuplé. Oui, mais encore faut-il s’en rendre compte. Le musée Doma, installé dans le complexe gothique de San Domenico Maggiore, au cœur du centre historique de Naples, vient ainsi de récupérer l’un de ses tableaux anciens, une copie du début du XVIe siècle d’après le Salvator Mundi de Léonard de Vinci, qui lui avait été volé. Petit hic : il ignorait totalement sa disparition ! Fermée depuis plusieurs mois en raison des restrictions sanitaires en vigueur en Italie, l’institution désertée n’avait pas remarqué que l’œuvre, retrouvée il y a quelques jours par la police, manquait à l’appel. Une heureuse nouvelle, certes, qui laisse cependant songeur quant à la mise en sécurité des œuvres « confinées »…

Oublié dans une salle

Le vol parfait est donc celui qui passe inaperçu (avec ou sans gentleman-cambrioleur). C’est en effet à l’occasion de l’arrestation, ce weekend, d’un homme de 36 ans soupçonné de recels, que la police napolitaine a découvert dans son appartement le précieux tableau du XVIe siècle. Aucune déclaration pour vol n’avait cependant été faite par le musée : « Il n’y avait eu aucune plainte et c’est nous qui avons en réalité alerté le prieur », explique le procureur de la ville, Giovanni Melillo, avant d’ajouter : « il n’était pas au courant que le tableau avait disparu car la salle dans laquelle il est conservé n’a pas été rouverte depuis trois mois ».
De fait, la seconde vague épidémique qui frappe l’Europe depuis cet automne a forcé l’Italie à fermer ses lieux culturels au début du mois de novembre. Si (coronavirus oblige) les visiteurs ne sont pas les bienvenus, on s’étonne cependant qu’aucun système de surveillance, qu’il soit assuré par un gardien, un conservateur, une alarme ou n’importe quel « Boum j’t’attrape » bricolé avec trois trombones, n’ait été mis en place à San Domenico Maggiore.

Le Salvator Mundi retrouvé du musée Doma à Naples ©San Domenico Maggiore, Naples

Le Salvator Mundi retrouvé du musée Doma à Naples ©San Domenico Maggiore, Naples

Vol organisé et sécurité des collections

Selon la police, qui poursuit ses investigations, aucune effraction n’aurait été à ce jour constatée. « Celui qui a pris le tableau le voulait, et il est plausible qu’il s’agissait d’un vol commandé par une organisation travaillant dans le commerce international de l’art », explique Giovanni Melillo. Une déclaration qui n’a pas de quoi nous rassurer sur la sécurité de ces milliers d’œuvres, conservées et parfois (temporaires) oubliées dans des lieux désertés qui n’ont pas les moyens de mettre systématiquement en place des mesures de prévention nécessaires. En mars dernier, une toile de Van Gogh avait ainsi été dérobée durement le confinement au Singer Laren Museum, près d’Amsterdam.

Dès le mois d’avril 2020, le Conseil international des musées (Icom) et Interpol alertaient sur « cet énorme défi » que représentent les mesures de confinement « pour les professionnels des musées qui doivent continuer d’assurer la sécurité des collections ». Ils invitaient alors les institutions à analyser leur situation sécuritaire et activer leurs plans de protection : gardiennage, système de détection des intrusions (vidéosurveillance, alarmes) ou encore réalisation de rapports hebdomadaires de sécurité à la direction du musée. Au-delà de toutes ses recommandations, on ne saurait, en outre, trop inciter les responsables de collections, en particulier des plus vulnérables, à procéder à une vaste campagne de récolement une fois la pandémie dernière nous (si, si, cela arrivera bien un jour… ou l’autre).

Le petit Léonard local

Pourtant, il ne s’agissait d’un vague tesson de céramique oublié dans une vitrine. Sur la page d’accueil du site du musée, cette copie du XVIe siècle d’après le Salvator Mundi de Léonard de Vinci est en effet présentée comme l’une des œuvres phares du parcours du musée Doma. Reprenant le type iconographique du Christ bénissant imaginé par Léonard de Vinci, le tableau aurait été exécuté par le peintre lombard Giacomo Alibrandi, vers 1500-1520 et acheté par Giovan Antonio Muscettola , conseiller de Charles Quint à la cour papale lors d’une de ses missions diplomatiques dans le nord de l’Italie, peut-être à Milan. Le petit tableau aurait ensuite été déposé dans l’ancienne chapelle de la famille Muscettola dans la basilique de San Domenico Maggiore.

Léonard de Vinci, Salvator Mundi, entre 1506 et 1513, peinture à l'huile sur panneau de noyer, 45,6 x 65,6 cm.

Léonard de Vinci (attribué), Salvator Mundi, entre 1506 et 1513, peinture à l’huile sur panneau de noyer, 45,6 x 65,6 cm.

Bien connu des spécialistes de la peinture de Léonard, l’œuvre a déjà fait l’objet d’une campagne de restauration et d’étude à l’occasion d’une importante exposition dans les années 1980. Sa célébrité, il la doit notamment à celle, prodigieuse, de son modèle, devenue l’œuvre d’art la plus chère au monde lors de sa vente pour plus de 450 millions de dollars chez Christie’s en 2017. Depuis cette date, le Salvator Mundi, qui devait être exposé en septembre 2018 au Louvre Abu Dhabi, est porté disparu et son authenticité est fortement contestée.

 

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