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En rouge les zones qui seront inondées de manière permanente ou temporaire par l'élévation du niveau de la mer et les submersions marines d'ici 2050 avec un scénario pessimiste d'émissions de gaz à effet de serre (celui que nous suivons). Ici, carte du sud de la Vendée et de la Charente-maritime (France)
Auteur : Climate central - Licence : DR

La hausse du niveau des océans est sans aucun doute la conséquence la plus redoutée et la plus connue du réchauffement climatique. De nouvelles estimations montrent qu'au moins trois fois plus de personnes que prévues seront affectés par des inondations marines, principalement en Asie. Mais la France ne sera pas épargnée comme le montre la carte interactive de l'augmentation du niveau de la mer.

Selon les Nations Unies, 680 millions de personnes vivent sur des littoraux dont l'altitude ne dépasse pas 10 mètres par rapport au niveau de la mer, ils seront 1 milliards en 2050, au moment où les risques de submersions marines deviendront communs. 20 % de la population mondiale vit à moins de 30 km des côtes, pour beaucoup dans des métropoles côtières. Les espaces littoraux sont à la fois des écosystèmes et des territoires fragiles où se concentrent les populations et les activités économiques, ils sont donc particulièrement vulnérables.

Le réchauffement climatique en cours induit mécaniquement une augmentation du niveau des océans, sans doute la conséquence la plus redoutée. Or, la hausse du niveau de la mer s'accélère progressivement ces dernières décennies, au lieu d'augmenter de manière linéaire ; les dernières estimations pour la fin du siècle sont de plus en plus pessimistes et envisagent jusqu'à 2 mètres d'augmentation.

Au XXe siècle, le niveau des mers a augmenté de moins de 2 mm par an, mais depuis les années 1990, elle est supérieure à 3 mm / an. Depuis 1992, date des premières mesures satellitaires du niveau moyen des océans, la hausse du niveau des océans s'accélère chaque année de 0,084 millimètres. Ainsi, en seulement 25 ans, le niveau moyen des océans a augmenté de plus de 8 cm.

Cette hausse est maintenant irréversible à moyen terme. En effet, le réchauffement de l'atmosphère met des dizaines d'années avant d'atteindre le fond des océans. Il se crée donc un phénomène thermique capable d'entretenir la montée du niveau des océans pendant plusieurs centaines d'années.
Les principales conséquences de l'augmentation du niveau des océans sont :

  • l'accentuation de l'érosion des littoraux ;
  • l'augmentation de la vulnérabilité des populations et infrastructures aux tempêtes qui génèrent des submersions marines ;
  • la salinisation des littoraux qui deviennent alors impropres aux cultures.

Or, ces risques concernent une population de plus en plus importante selon de nouvelles estimations réalisées par l'organisation scientifique Climate Central qui a publié son étude dans la revue Nature Communication.

En effet, pour déterminer le risque d'inondation côtière, il faut prendre en compte l'élévation prévue du niveau des océans mais aussi l'isostasie, c'est à dire les mouvements verticaux de la lithosphère qui vont conduire un terrain à s'enfoncer ou au contraire à l'élever.

C'est pourquoi, Climate Central a élaboré un un nouveau modèle numérique d'élévation intitulé CoastalDEM. Celui-ci montre que bon nombre des côtes du monde sont beaucoup plus basses que ce que l'on sait généralement et que l'élévation du niveau de la mer pourrait donc davantage de personnes au cours des prochaines décennies.

Mesurer avec précision l'altitude de littoraux n'est ni facile ni bon marché.
Certains pays, tels que les États-Unis, utilisent une technologie de télédétection appelée lidar pour cartographier de manière fiable l'altitude de leurs côtes. Mais le lidar est relativement coûteux et nécessite généralement des survols d'avions, d'hélicoptères ou de drones, ainsi que du matériel laser. Lorsque les données lidar ne sont pas disponibles, les chercheurs et les analystes s'appuient souvent sur les données satellites Shuttle Radar Topography Mission (SRTM) de la NASA qui sont gratuites. Cependant, les données SRTM surestiment généralement l'altitude car elles tiennent compte des éléments qui dépassent du sol, comme les bâtiments et les arbres. Ce qui implique des différences d'altitudes dans les zones densément boisées et bâties. À l'échelle mondiale, la surestimation moyenne semble être d'environ deux mètres, une marge d'erreur qui change tout.
Le nouveau modèle CoastalDEM vise à corriger les erreur de mesures actuelles et se veut beaucoup plus précis que les données SRTM avec une marge d'erreur de seulement 6 cm.

Jusqu'à maintenant, on considérait que moins de 100 millions de personnes étaient vulnérables à l'élévation du niveau de la mer. Selon les auteurs de ce nouveau rapport, c'est au moins trois fois plus de personnes dans le monde qui sont menacées : cela correspond à 300 millions de personnes dont 200 millions qui se situeront de manière permanente au-dessous du niveau de la marée haute !

Selon CoastalDEM, environ 110 millions de personnes vivent actuellement sur des terres situées en dessous de la ligne de marée haute. Cette population est sans doute en grande partie protégée par des défenses côtières existantes (digues...). Mais celles-ci ne seront pas forcément suffisantes face à l'élévation importante du niveau de la mer.

300 millions de personnes seront donc confrontées à des submersions marines (inondations côtières) au moins une fois par an d'ici 2050, dont 1 million rien qu'en France métropolitaine.

Ces résultats sont tirés de nouvelles analyses de données satellitaires, en partant de l'hypothèse (très optimiste) que les réductions des émissions de gaz à effet de serre seront à peu près conformes aux objectifs de l'Accord de Paris, ce qui n'est absolument pas le cas pour l'instant.

Les différents scenarios proposés par l'étude montrent donc que l'inaction climatique aura un impact significatif sur le nombre de personnes menacées. Cela se chiffre en plusieurs dizaines de millions de personnes qui devront se déplacer si des mesures de réduction rapides des émissions ne sont pas prises.

Des centaines d'aéroports seront engloutis par les eaux

Outre les populations, les infrastructures de transport seront également affectées comme les aéroports, souvent construits près des littoraux. Ainsi, une étude publiée dans Climate Risk Management, montre que sur les 14 000 aéroports répartis dans le monde, 269 aéroports sont actuellement menacés par des submersions marines. Une élévation de température de 2°C - conformément à l'Accord de Paris - engloutirait 100 aéroports tandis que 364 aéroports de plus seraient sous la menace d'inondations d'ici 2100. Au delà de 2°C (ce qui est plus probable), jusqu'à 572 aéroports seront menacés d'ici 2100 ce qui engendrerait des perturbations majeures dans le trafic aérien si des mesures ne sont pas prises.

Les aéroports de Suvarnabhumi à Bangkok (BKK) et Shanghai Pudong (PVG) arrivent en tête de liste, tandis que celui de London City (Angleterre) est l'aéroport avec le plus grand risque de submersion.

L'Asie, le continent le plus vulnérable à la montée des océans

Émissions contrôlées ou non, les pays asiatiques sont les plus exposés. Les évaluations révèlent que même avec des réductions modérées des émissions de gaz à effet de serre, les régions de six pays asiatiques, soit 237 millions de personnes, pourraient faire face à des menaces annuelles d'inondations côtières d'ici 2050, environ 183 millions de plus que les évaluations précédentes.

La Chine continentale, le Bangladesh, l'Inde, le Vietnam, l'Indonésie et la Thaïlande sont les pays qui abritent le plus grand nombre d'habitants qui seront sous le niveau annuel moyen des inondations côtières d'ici 2050. Ensemble, ces six pays représentent environ 75 % des 300 millions d'habitants du globe confrontés à la même vulnérabilité au milieu du siècle.

Mais le danger d'inondation marine permanente ne se limite pas à l'Asie et dans 19 pays, du Nigeria au Brésil, en passant par l'Égypte, le Royaume-Uni et la France, au moins un million de personnes pourraient vivre au-dessous de la ligne de marée haute à la fin du siècle et être inondées en permanence, en l'absence de défenses côtières.

Les résidents des petits États insulaires sont particulièrement concernés d'autant plus que bien avant que leurs terres ne soient submergées, ils devront faire face à l'intrusion d'eau salée dans les réserves d'eau douce et dans les sols, rendant leurs îles inhabitables bien avant qu'elles ne soient englouties.

La France ne sera pas épargnée par la montée du niveau des océans

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Submersion marine, février 2016, Chatelaillon-Plage
© Christophe Magdelaine / www.notre-planete.info - Licence : Tous droits réservés

On croit souvent que l'augmentation du niveau de la mer ne concerne que les populations les plus désœuvrées, vivant dans des pays qui n'ont pas les moyens de s'en prémunir. Mais cette nouvelle étude montre qu'en France métropolitaine, 1 million de personnes seront confrontées à des submersions marines annuelles d'ici 2050 et 1,2 million d'ici 2100 si les émissions poursuivent leur hausse.

Selon la carte interactive proposée par Climate Central, les régions les plus touchées sont celles de La Rochelle/Niort et Calais.

Ces estimations ne tiennent pas compte des ouvrages de protection côtiers qui sont progressivement mis en place et qui pourront protéger en partie les personnes et les biens.

Enfin, notons la publication du Rapport prospectif AllEnvi - La mer monte qui envisage les conséquence de l'élévation du niveau des océans en termes de démographie, d'urbanisation et d'infrastructures, d'environnement et de ressources naturelles, de sécurité alimentaire, d'alimentation, d'économie littorale, et bien sûr de gouvernance pour la France.


New elevation data triple estimates of global vulnerability to sea-level rise and coastal flooding ; Scott A. Kulp & Benjamin H. Strauss - Nature Communications volume 10, Article number: 4844 (2019)

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Questions / réactions (13)


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denise deniseIl y a 2 ans

pour faire baisser le niveau des mers de 1cm il faudrait garder 2 cm d'eau sur les continents ... quel pays ne révérait pas  de garder 20 mm de pluie pour éviter les inondations et les sécheresses ? rapporté  à la surface de la France 20 mm de pluie c'est l'équivalent de la consommation TOTALE d'eau (irrigation comprise) ... la seule façon de perdre de l'eau c'est de la jeter en mer : Actuellement les rivières françaises rejettent entre 50 et 70% des précipitations alors qu'il ne faudrait pas dépasser les 30 %    !    https://www.instagram.com/p/Cd2kTbQoElb/

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JP.R JP.RIl y a 2 ans

Au vu des projections plutôt pessimistes, est-il raisonnable de financer des voitures électriques, pour maintenir en théorie de l'emploi (ou faire des cadeaux à certaines entreprises). Ne faudrait-il pas mettre en oeuvre une économie de la sobriété en isolant les bâtiments, on proposant des normes  écologiques de construction, en anticipant sur les futurs déplacements de population, pour une mobilité nécessaire.

Les gouvernants ont une vision à court terme, et une idéologie économique qui fausse leur jugement, le TITANIC coule, mais on continue son petit commerce et on continue la vie sur des règles qui sont la cause des problèmes écologiques. Les mots respect et partage ne sont pas rentrés dans le dictionnaire politique des gouvernants du Monde. La raison du plus fort prévaut et fera perdre tout le monde.

https://lejustenecessaire.wordpress.com/2022/04/06/le-neoliberalisme-detruit-lecologie-pour-leconomie/

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CurieuxIl y a 3 ans
Merci pour cet article inquiétant mais qui devrait faire prendre conscience aux aménageurs que c'est maintenant qu'il faut agir. A priori ce n'est pas le cas.
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JEAN YVESIl y a 3 ans
les populations peuvent se déplacer les centrales nucléaires plus compliquées le stockage de divers matières plus ou moins dangereuses aussi
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BoscaIl y a 3 ans
Trop d'eau d'un coté, trop peu de l'autre...
Et des pipelines pour remplir toutes les mers asséchées ?
leur redonner vie...
c serait minimaliste, ça aurait un coût...
Mais se lamenter sans rien proposer me gène.
Des objections ?
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