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Atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 est l’urgence absolue, affirme António Guterres

Une femme passe devant des éoliennes sur une route de campagne à Heijningen, aux Pays-Bas.
Unsplash/Les Corpographes
Une femme passe devant des éoliennes sur une route de campagne à Heijningen, aux Pays-Bas.

Atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 est l’urgence absolue, affirme António Guterres

Climat et environnement

La célébration samedi du cinquième anniversaire de l'Accord historique de Paris sur le changement climatique coïncide avec un « mouvement prometteur vers la neutralité carbone », a affirmé le Secrétaire général des Nations Unies dans un article d'opinion publié vendredi dans plusieurs médias à la veille du sommet « Ambition climat 2020 ».

D’ici le mois de janvier, des pays représentant plus de 65 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone et plus de 70 % de l’économie mondiale auront pris l’engagement de parvenir à zéro émission nette avant la moitié du 2050, s’est félicité António Guterres dans sa chronique. 

Le chef de l’ONU a toutefois souligné que les grands indicateurs climatiques sont « de moins en moins bons », rappelant les niveaux de dioxyde de carbone ont atteint des niveaux records et sont à la hausse. 

« La décennie qui s’achève a été la plus chaude qui ait jamais été enregistrée ; en octobre, la formation de glace de mer arctique n’avait jamais été aussi limitée et les incendies et les inondations, les cyclones et les ouragans apocalyptiques deviennent la norme. La biodiversité s’effondre, les déserts gagnent du terrain, les océans se réchauffent et sont envahis de déchets plastiques qui les étouffent », a ajouté M. Guterres.

Face à cette réalité dramatique, le Secrétaire général a rappelé que la science est « très claire » : la situation ne fera qu’empirer « à moins que la production de combustibles fossiles ne recule d’environ 6 % par an d’ici à 2030 » or « le monde s’engage dans la direction opposée – et prévoit une augmentation annuelle de 2 % ».

Antonio Guterres a appelé à voir le relèvement de la pandémie comme « une occasion à saisir tout autant inattendue que vitale » pour s’attaquer aux changements climatiques, remettre sur pied notre environnement mondial, transformer nos économies et réinventer notre avenir. 
 

La Cordillera Huayhuash en août 2019. Les Andes contiennent 99% des glaciers tropicaux du monde et 71% se trouvent au Pérou.
UN News/Daniela Gross
La Cordillera Huayhuash en août 2019. Les Andes contiennent 99% des glaciers tropicaux du monde et 71% se trouvent au Pérou.

Trois conditions à remplir

Pour y parvenir le chef de l’ONU a appelé à remplir trois conditions : la constitution d’une véritable coalition mondiale pour parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050; l’alignement des financements mondiaux à l’Accord de Paris et aux Objectifs de développement durable; ainsi que la reaslisation d’une percée en matière d'adaptation et de résilience.

Concernant la réalisation de la neutralité carbone d’ici à 2050, M. Guterres s’est félicité de l’engagement de l’Union européenne, du Royaume-Uni, du Japon, de la République de Corée et plus de 110 pays en ce sens, tout comme celui de l’administration entrante des États-Unis et de la Chine, qui s’est engagée à y parvenir d’ici à 2060. 

« Chaque pays, ville, institution financière et entreprise devrait adopter un plan de transition vers zéro émission nette – et prendre dès maintenant des mesures décisives pour s’engager sur cette voie, ce qui signifie réduire les émissions mondiales de 45 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2010 », a expliqué dans sa chronique le Secrétaire général, ajoutant que « la technologie est de notre côté » pour y arriver.
 

 Centrales au charbon à Nottingham, en Angleterre.
Unsplash
Centrales au charbon à Nottingham, en Angleterre.

Miser sur ls décarbonisation

Plus de la moitié des centrales à charbon en activité aujourd’hui coûtent plus cher à faire fonctionner qu’il ne serait de construire de nouvelles installations de production d’énergie renouvelable, a fait remarquer dans sa chronique M. Guterres suggérant qu’il serait sage d’emprunter cette voie tout en tenant compte des coûts humains de la décarbonisation et venir en aide aux travailleurs au moyen de programmes de protection sociale, de reconversion et de perfectionnement, « pour que la transition soit juste ».

« Bien que les pertes d’emploi soient inévitables, la transition vers des énergies propres entraînera la création nette de 18 millions d’emplois d’ici à 2030 » a affirme le Secrétaire général s’appuyant sur l’analyse de l’Organisation internationale du travail. 

Pour ce qui est de l’alignement des financements mondiaux soient au diapason de l’Accord de Paris et des objectifs de développement durable, M. Guterres estime que le moment est venu :

  • de taxer le carbone ; 
  • de supprimer progressivement le financement des combustibles fossiles et les subventions dont ils bénéficient ; 
  • d’arrêter la construction de nouvelles centrales à charbon ; 
  • de faire peser l’impôt non plus sur le revenu mais sur le carbone, non plus sur les contribuables mais sur les pollueurs ; 
  • de rendre obligatoire la divulgation des risques financiers liés au climat ; 
  • et d’intégrer l’objectif de neutralité carbone dans toutes les politiques et décisions économiques et budgétaires. 

« Les banques doivent adapter leurs prêts à l’objectif mondial de zéro émission nette et les propriétaires et gestionnaires d’actifs doivent décarboniser leurs portefeuilles », a-t-il ajouté.

« Il y a encore beaucoup à faire » a déclaré António Guterres par rapport à la percée en matière d’adaptation et de résilience, précisant que l’adaptation ne représente « que 20 % du financement de la lutte contre les changements climatiques » alors que « chaque dollar investi dans des mesures d’adaptation pourrait rapporter près de 4 dollars de bénéfices ». 

Chaque dollar investi dans des mesures d’adaptation pourrait rapporter près de 4 dollars de bénéfices.

Les progrès en matière d’adaptation et de résilience sont particulièrement urgentes pour les petits États insulaires en développement, dont l’existence même est menacée par les changements climatiques, a-t-il ajouté.

Les grandes conférences des Nations Unies, telle que celle sur le climat qui se tiendra en novembre prochain à Glasgow et d’autres initiatives sur la biodiversité, les océans, les transports, l’énergie, les villes et les systèmes alimentaires devraient nous offrir d’abondantes possibilités de répondre aux urgences planétaires en 2021, a rappelé M. Guterres. 

Il a appelé à s’appuyer sur les solutions basées sur la nature, sur les connaissances autochtones et sur l’inclusion plus de décideuses à la table des négociations. 

« La COVID-19 et le climat nous ont conduits à un seuil. Un retour à l’ancien monde, plein d’inégalités et de fragilité, n’est plus envisageable. L’heure est venue de s’engager sur une voie plus sûre et durable », a dit le chef de l’ONU ajoutant qu’« il faut concevoir le relèvement de la COVID-19 et l’action climatique comme les deux faces d’une même pièce ».

« Les décisions que nous prenons aujourd’hui détermineront ce qui se déroulera pendant les prochaines décennies », a conclu António Guterres.