Archéologie : l’une des plus anciennes mosquées au monde découverte en Israël

Archéologie : l’une des plus anciennes mosquées au monde découverte en Israël
Les fondations de l'édifice ont été identifiées sous une autre mosquée du VIIIe siècle, construite au début de la période islamique ©Université hébraïque de Jérusalem

Les archéologues pensaient jusque-là avoir à faire à un marché byzantin converti plus tard en mosquée. Les vestiges mis au jour à Tibériade (Israël) sont en réalité ceux d'une mosquée érigée au VIIe siècle, sans doute l'une des plus anciennes découvertes à ce jour.

La mosquée aurait apparemment été construite aux alentours de 660-680 ap. J.-C., à peine une génération après la mort du prophète Mahomet. Érigée à Tibériade, près de la mer de Galilée, elle a pu être datée grâce à des morceaux de céramique et des pièces incrustées dans les fondations. Elle correspond à la période de l’occupation de la ville byzantine de Tibériade par les forces musulmanes, qui l’ont conquise en 635. D’après Katia Cytryn-Silverman, experte en archéologique islamique de l’Université hébraïque de Jérusalem et directrice des fouilles, il s’agirait d’un des plus anciens lieux de culte islamiques connus.

Les débuts de l’Islam

Le site d’Al-Juma, situé dans le Nord de Tibériade, est exploré depuis les années 1950. Il y a onze ans, les archéologues y ont mis au jour les vestiges d’une mosquée du VIIIe siècle, érigée sous la dynastie des Omeyyades (650-750 après J.-C.). Des fondations, découvertes alors dans les couches plus anciennes du site, avaient été attribuées à un ancien marché byzantin qui aurait donc été transformé en lieu de culte. Les dernières études menées par une équipe de l’Université hébraïque de Jérusalem ont permis d’établir qu’il s’agissait en réalité de vestiges d’une mosquée antérieure, construite probablement une cinquantaine d’années auparavant.

Cette découverte va permettre d’approfondir nos connaissances actuelles sur les débuts de l’Islam et ses premiers lieux de culte. En effet, la plupart des mosquées, comme celles de Médine, de Damas ou la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem, sont aujourd’hui des lieux de pèlerinage, ou de culte, très fréquentés qu’il est impossible de transformer en chantiers archéologiques, contrairement au site de Tibériade. L’étude de ces vestiges va notamment apporter un nouvel éclairage sur la question de l’orientation des mosquées, traditionnellement tournées en direction de la Mecque. Les archéologues ne s’accordent, en effet, toujours pas sur la date à partir de laquelle ceci est devenu la norme pour les lieux de culte musulmans. L’étude des fondations de la première mosquée de Tibériade et des vestiges de celle, plus monumentale, qui l’a remplacée 50 ans plus tard, va également permettre de mesurer l’ampleur des transformations architecturales et des évolutions cultuelles sous-jacentes. Interrompues à cause des restrictions sanitaires, les fouilles du site devraient reprendre dans le courant du mois de février.

Tibériade et l’âge d’or de la cohabitation

L’identification de cet ancien lieu de culte permet également de documenter l’histoire de la ville de Tibériade. Les premières études révèlent que la mosquée s’insérait dans un tissu de résidences secondaires construites à l’époque des premiers califes. Fondée en 26 ap. J.-C., par Hérode Antipas, qui administre la région pour le compte de l’Empire romain, la ville est nommée d’après l’empereur romain Tibère. Elle tombe aux mains des musulmans en 635, sans que ces derniers n’aient apparemment cherché à imposer l’Islam dans la cité. En effet, les archéologues ont observé une certaine réserve architecturale qui montre une volonté de s’insérer dans le maillage religieux diversifié de la ville. « Ils ne détruisaient pas les lieux de culte des autres, ils s’inséraient au contraire dans les sociétés dont ils prenaient le contrôle », explique Katia Cytryn-Silverman.

La ville avait en effet été un épicentre du développement du judaïsme au cours des cinq siècles précédant la conquête par les musulmans. Des lieux de culte chrétiens parsemaient également la côte de la mer de Galilée, où elle se trouve. Cela prouve que, contrairement à ce que pensaient les chercheurs jusque-là, les musulmans n’ont pas semé le chaos en détruisant Tibériade lorsqu’ils se sont emparés de la ville, bien au contraire. Katia  Cytryn-Silverman parle même d’un « âge d’or de la cohabitation » après la conquête.

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