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Au Japon, le parti au pouvoir veut bien intégrer plus de femmes, à condition qu'elles ne parlent pas

Toshihiro Nikai, le secrétaire général du Parti libéral démocrate japonais (LPD), est accusé de sexisme. [Kazuhiro NOGI / AFP]

Des femmes, oui, mais seulement si on ne les entend pas. Face aux critiques concernant le manque de représentation féminine au sein du Parti libéral démocrate (LDP) japonais, le secrétaire général, Toshihiro Nikai, a proposé d'intégrer cinq femmes parlementaires aux réunions du conseil d'administration... à condition qu'elles ne prennent pas la parole.

«Il s'agit de les laisser jeter un coup d'oeil», a-t-il précisé mardi 16 février, lors d'une conférence de presse. Le secrétaire général du LDP, âgé de 82 ans, explique alors que cela doit permettre aux femmes du parti d'observer le processus de prise de décisions, mais certainement pas d'y prendre part. Si elles veulent exprimer une opinion, ces «observatrices» ne pourront que la soumettre séparément, au bureau du secrétariat.

Selon CNN, cette proposition de Toshihiro Nikai intervient justement après que Tomomi Inada, deuxième femme à avoir été élue ministre de la Défense au Japon, lui a écrit, le 15 février. Dans son courrier, elle lui soumettait des idées visant à promouvoir les femmes au sein du parti, afin de s'assurer qu'elles soient plus impliquées dans l'élaboration des politiques. Des suggestions qu'il n'a donc pas suivies.

Au Japon, ce n'est pas la première fois que le sexisme du LPD est pointé du doigt. Sur les 12 membres de son conseil d'administration, seules deux sont des femmes. Le conseil général du parti, composé de 25 personnes, n'en compte que trois. Aussi, les propos du secrétaire général ont suscité de nombreuses réactions et critiques, notamment en ligne.

Sur Twitter, Hiroki Mizoguchi, auteur japonais spécialiste des questions d'immigration, écrivait ainsi, à propos de Toshihiro Nikai : «Il se dit, ok nous laissons les femmes assister aux réunions. Mais non, ça ne peut pas aller jusqu'à les laisser avoir leur mot à dire». De son côté, l'écrivaine Mieko Kawakami fustige des propos «inacceptables» et «misogynes». «Les femmes sont pour toujours traitées comme des citoyens de seconde zone ici, au Japon», se désole-t-elle.

D'autres propos sexistes la même semaine

Ce scandale intervient quelques jours seulement après la démission du président des Jeux olympiques de Tokyo 2020 pour des propos sexistes. Lors d'une réunion avec des responsables du Comité olympique, Yoshiro Mori, également membre du LPD, s'est plaint du fait que «les conseils d'administration avec beaucoup de femmes prennent beaucoup de temps».

Selon lui, cela s'explique par le fait que les femmes «ont l'esprit de compétition. Si l'une lève la main (pour intervenir, NDLR) les autres croient qu'elles doivent s'exprimer aussi [...] Si vous augmentez le nombre de membres exécutifs féminins, et que leur temps de parole n'est pas limité dans une certaine mesure, elles ont du mal à finir, ce qui est embêtant». Il terminait son intervention en se félicitant que les sept femmes du comité d'organisation des JO sachent «rester à leur place».

La représentation des femmes aux postes clés, notamment en politique, est particulièrement faible au Japon. Seuls 46 des 465 législateurs de la chambre basse sont de sexe féminin, soit moins de 10% contre une moyenne de 20% en Asie au mois d'octobre. Selon les données de la Banque mondiale pour 2018, les femmes représentent 51% de la population japonaise, ce qui n'empêche pas le pays d'être classé 121e sur 153 dans le dernier indice mondial d'écart entre les sexes établi par le Forum économique mondial.

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