“‘Queer’ est le nom que l’on donne aux membres de la communauté LGBT qui sont en période d’incertitude sur leur orientation ou leur identité sexuelle, et qui aiment bien l’idée de se démarquer du modèle classique.” C’est par cette tentative maladroite, tant cette notion est étrangère aux Tunisiens, de définir une personne queer, que le site d’information Webdo entame son article à propos de la militante Rania Amdouni. Depuis plus d’une semaine, cette militante est au cœur de l’actualité.

Figure des marches qui se succèdent depuis le début de l’année et du mouvement progressiste, Rania Amdouni est bien connue des manifestants de l’avenue Bourguiba. Présente dans tous les mouvements pour les libertés, elle y participe avec un look volontairement exubérant et est souvent photographiée.

Des propos “surréalistes”

Une exposition qui lui vaut d’être la cible de menaces. Alors qu’elle affirme dans une vidéo avoir été victime d’une tentative de meurtre en août 2020, en plein centre de Tunis, cette comédienne, également présidente d’une association de défense des minorités sexuelles, est désormais l’objet d’une campagne de harcèlement sur les réseaux sociaux. Le débat devient vif dans une société encore largement conservatrice et suscite des commentaires parfois étonnants.

Le site d’information indépendant Business News rapporte “un échange surréaliste” sur IFM, une chaîne de radio très écoutée. Le journaliste Borhen Bsaies et l’avocate Sonia Dahmani, deux chroniqueurs bien connus, ont affirmé que “‘queer’ est un adjectif qu’on donne aux personnes obèses ou en surpoids”.

“[Ce] concept et [ce] débat [sont] à des années-lumière d’être assimilés par une société qui n’a pas encore intériorisé les plus élémentaires des libertés”, commente Business News.

Un doigt d’honneur au système

Face à ceux qui dénigrent Rania Amdouni, plusieurs organisations de la société civile ont élevé la voix. “Elle est la lumière brillante, et eux, ils ont choisi l’obscurité”, écrit l’Association tunisienne des femmes démocrates dans un communiqué diffusé aux médias.

En guise de soutien, le dessinateur subversif Z lui a consacré un dessin intitulé “Rania Amdouni s’assoit sur le système”. Il la montre assise au-dessus d’un minaret, arborant un drapeau arc-en-ciel et faisant un doigt d’honneur.

En Tunisie, les droits de la communauté LGBT+ ne sont toujours pas reconnus. Dans un pays où les tests anaux sont encore pratiqués à l’encontre des hommes soupçonnés d’être homosexuels, l’homosexualité reste sévèrement réprimée par la loi.