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Zemmour 2022 : le sondage flop qui rassure Marine Le Pen
Autant dire que Marine Le Pen a dû arborer son plus beau sourire lorsqu’elle en a pris connaissance.
© Alain JOCARD / AFP

Zemmour 2022 : le sondage flop qui rassure Marine Le Pen

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L’opération était bien lancée. Mais un sondage, dévoilé par l’Ifop ce mercredi 3 mars, vient heurter de plein fouet cette belle stratégie. L'analyse de notre chroniqueur David Desgouilles.

L’opération était bien lancée. La communication était parfaite. Un grand dossier de l’Express en avait donné le coup d’envoi : Éric Zemmour ne dirait pas non à une candidature à l’élection présidentielle. Le dossier de l’hebdomadaire était très complet, expliquant les raisons pour lesquelles l’éditorialiste y pensait, pas seulement en se rasant. Mais il détaillait aussi celles, non négligeables, qui en faisaient plutôt un homme qui regardait avec ravissement cette effervescence autour de lui mais qui, au bout du compte, n’en feraient jamais un véritable candidat prêt à tout sacrifier de sa vie, de son confort, de sa liberté, dans un combat coûteux et incertain.

L'effet CNews

Ne nous y trompons pas. Depuis ce débat où elle était apparue complètement en décalage avec l’attente qu’elle avait suscitée jusqu’alors, et pis, depuis cette image d’elle dansant le soir de sa défaite cuisante, comme si faire 33% des voix constituait un exploit dans une France qui avait soif de frontières, face au candidat de la « mondialisation heureuse », la fameuse « droite hors-les-murs » souhaite se débarrasser de Marine Le Pen. Et après avoir constaté que Marion Maréchal passait son tour pour 2022, Éric Zemmour devenait alors la meilleure solution pour damer le pion à la présidente du RN. C’est peu dire que le succès de l’émission présentée par Christine Kelly chaque jour à 19 h 00 a pu constituer un véritable dopant à ses espérances.

Aujourd’hui, l’émission est constamment entre 500 000 et 1 million de téléspectateurs, ce qui classe CNews comme la première chaîne info à cette heure-là. Sur les réseaux sociaux, les nombreux fans d’Éric Zemmour se mobilisent également. Ils n’ont pas de mots assez durs pour Marine Le Pen, cette machine à perdre. L’éditorialiste explique de son côté à chaque fois qu’il en a l’occasion que Marine Le Pen ne peut pas gagner contre Macron. Le fameux sondage où Marine Le Pen atteint 48% au second tour face à Macron a été dégommé par Zemmour et tous ceux qui le soutiennent sur le mode « on nous a déjà fait le coup en 2017 », ce qui est d’autant plus convaincant que c’est la réalité.

Patatras !

Mais c’est un autre sondage, dévoilé par l’Ifop mercredi 3 mars, qui vient heurter de plein fouet cette belle stratégie. Commandé par un mystérieux « Club de la presse », le principe de ce sondage était de tester Éric Zemmour en l’absence de candidature de Marine Le Pen et de Nicolas Dupont-Aignan. Dans les autres études où ces deux derniers sont sur la ligne de départ, ils rassemblent à eux deux 34 % des suffrages. Patatras ! L’éditorialiste s’arrête à 17, soit la moitié. D’après l’IFOP, 48% de l’électorat de Marine Le Pen se réfugierait alors dans l’abstention ou dans le vote blanc. Autant dire que Marine Le Pen a dû arborer son plus beau sourire lorsqu’elle en a pris connaissance. Belle revanche sur celui qui la vilipende, fustigeant sa « nullité » à chaque fois qu’il en a l’occasion ! Les sondages à un an de l’élection, rappelons-le, n’ont que peu de valeur prédictive.

Nous ne savons si ce « Club de la presse » voulait aider Éric Zemmour dans sa mise en orbite, mais si c’est le cas, il aurait dû s’abstenir et laisser planer le doute.

Mais celui-là, entendons-nous bien, aura malgré tout des conséquences énormes. Car Marine Le Pen a déjà annoncé sa candidature, et Éric Zemmour pour des raisons à la fois stratégiques et d’autres liées à son hésitation, n’a pas annoncé la sienne. L’objectif est donc de démontrer qu’il est un meilleur candidat que la présidente du RN, qu’il rassemblerait plus et mieux. Il faut faire vaciller Marine Le Pen de son piédestal sondagier, montrer qu’il existe une alternative à sa candidature. Et il faut le montrer le plus vite possible. Afin de fragiliser Marine Le Pen, et de laisser infuser dans l’opinion la possibilité d’un autre horizon. Ce sondage démontre le contraire. Marine Le Pen en sort renforcée. Nicolas Dupont-Aignan aussi.

Nous ne savons si ce « Club de la presse » voulait aider Éric Zemmour dans sa mise en orbite, mais si c’est le cas, il aurait dû s’abstenir et laisser planer le doute. Ce doute qui ne bénéficiait pas à Marine Le Pen depuis des mois. Là voilà certainement rassérénée, au moins jusqu’aux élections régionales de juin.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne