Pour 29 % des hommes, le rôle premier de la femme est "de prendre soin de son mari"

Publié le Mardi 09 Mars 2021
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Pour 29 % des hommes, le rôle premier de la femme est... "de prendre soin de son mari"
Pour 29 % des hommes, le rôle premier de la femme est... "de prendre soin de son mari"
A l'occasion du 8 mars, un sondage de YouGov révèle une triste réalité : quasi un tiers des hommes estime que le rôle premier de la femme est "de prendre soin de son mari", et les femmes ne sont pas épargnées par le sexisme intériorisé.
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Nous sommes en 2021 et à en croire la dernière étude YouGov, les calculs ne sont pas bons. Pour la Journée internationale des droits des femmes, l'institut a sondé un peu plus de 1 000 Françaises et Français sur leur perception du rôle de ces dernières dans la société. Résultat : le bilan est plus catastrophique qu'il y a six ans, et fout clairement des frissons.

Place des femmes à la maison, relation centrée sur le bien-être de l'homme, maintient des inégalités salariales, autant de carcans et d'interprétations archaïques que nombreux (et nombreuses !) continuent d'approuver. On décrypte pour vous ces chiffres flippants qui nous confirment si on ne le savait pas déjà que, oui, au XXIe siècle, on a encore du boulot.

Pour 29 % des hommes, le rôle de la femme est de prendre soin d'eux

Ah, le complexe d'Oedipe ! Si de nos jours, la justice voit clairement d'un mauvais oeil le fait, pour un homme, de tuer son père pour se taper sa mère (quand il s'agit de tuer sa femme en revanche, ça semble beaucoup mieux passer), la théorie freudienne a tout de même de beaux jours devant elle. La preuve, 29 % des interrogés estiment que le rôle de leur compagne est de prendre soin d'eux. De les chouchouter, de les choyer, de leur dire combien elles sont fières d'eux d'avoir colorié sans dépasser les bords, si on extrapole (juste un peu).

Un besoin d'être materné dans sa relation amoureuse qui ravirait le psychanalyste. D'autant plus qu'il ne s'agit pas d'un critère que ces messieurs trouveraient simplement agréable chez une potentielle compagne, mais bien, pour quasi un tiers d'entre eux, et ce contre 21 % en 2015, du rôle premier qu'ils attribuent à une femme. Alarmant.

Autre chiffre à noter (en baisse de 2 points, cette fois) : 17 % des sondés trouvent peu séduisant qu'une femme exprime des opinions tranchées en public. Ah. C'est sûr que tout de suite, ça excite moins quand on réclame haut et fort l'égalité sur tous les fronts, salarial notamment, que lorsqu'on sait rester silencieuse, docile - en somme, à notre place. A ce sujet d'ailleurs, 22 % des hommes sont d'accord avec le fait qu'une femme gagne plus que son conjoint peut être source de problème dans la relation. Relation qu'ils finiront donc par ne jamais construire, du moins on le souhaite chaleureusement à leur partenaire hypothétique.

Le sexisme intériorisé en hausse

Preuve que le patriarcat est sournois : si les femmes subissent le sexisme de plein fouet, elles l'intériorisent aussi en masse. Ainsi, 15 % des Françaises interrogées considèrent sans mal que le rôle premier de la femme est de prendre soin de son mari (+ 2 points par rapport à 2015), et 31 % que rapporter plus d'argent que leur époux peut compliquer les choses. Idem à la question : "les hommes et les femmes sont-ils égaux ?", où 41 % des sondées ont dit "non".

Reste à savoir, cependant, si les répondantes jugent cette dernière affirmation normale, ou sont seulement lucides face aux inégalités constantes dont elles souffrent, mais indéniablement outrées.

Côté expression de ses convictions, enfin, 2015 voyait 29 % d'entre elles désapprouvaient la prise de parole féminine engagée, contre "seulement" 14 % en 2021. Six ans de déconstruction d'une pensée nocive qui ont fait leur chemin, pense-t-on. Et on ne peut qu'espérer que ce lent (dés)apprentissage continue.