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Après la Hollande, nouveau veto en Espagne sur un traducteur pour traduire le poème d’Amanda Gorman
Getty Images via AFP

Après la Hollande, nouveau veto en Espagne sur un traducteur pour traduire le poème d’Amanda Gorman

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« Je viens de subir un acte d' inquisition !». Le poète Victor Obiols n’a pas mâché ses mots sur son compte Twitter après avoir appris que sa traduction en langue catalane du poème de la noire américaine Amanda Gorman, The Hill We Climb (« la colline que nous escaladons ») avait été refusée par sa maison d’édition.

Homme blanc de 60 ans, sans aucun parcours d’activiste, le traducteur Viktor Obiols n'a donc pas le profil souhaité par la maison d'édition de la jeune poétesse étatsunienne Amanda Corman poussée sur le devant de la scène internationale le jour de l'investiture de Joe Biden. Et pourtant, le poète catalan rejeté pour « être inadéquat » ne manque pas de qualité littéraire : président d’un festival de poésie, récompensé par plusieurs prix pour ses recueils et considéré comme un des meilleurs traducteurs d’Oscar Wilde, Shakespeare et Max Porter…

Ce refus survient quelques semaines après la controverse sur la traduction hollandaise du fameux poème, lu par son auteure Amanda Gorman, lors de la cérémonie d’investiture du président américain Joe Biden, le 20 janvier. La traductrice et poétesse hollandaise Marieke Lucas Rijneveld avait dû renoncer à traduire l'œuvre de la poétesse, car n’étant pas noire. Celle-ci avait pourtant été choisie dans un premier temps par Amanda Gorman en personne. Mais ce choix avait été ouvertement critiqué par la journaliste hollandaise Janice Deul, l’une des activistes noires les plus engagées au Pays-Bas, fulminant « le surplomb de la pensée blanche ».

Une traductrice pour le Catalan, une autre pour le Castillan

Depuis lors, la polémique sur la traduction identitaire fait rage. Le traducteur catalan évincé Victor Obiols, dont le compte Twitter a été fermé après avoir publié qu’il devait se peindre le visage de cirage noir pour pouvoir traduire le texte de Gorman, fustige la décision de la maison d’édition américaine. « C'est un sujet très complexe qu'on ne peut pas traiter avec légèreté. Mais si je ne peux pas traduire une poète, car elle est une femme, jeune, noire, américaine du 21e siècle, alors je ne peux pas non plus traduire Homère parce que je ne suis pas un Grec du 8e siècle av. J.-C. ou je ne pourrais pas avoir traduit Shakespeare parce que je ne suis pas un Anglais du 16e siècle », a-t-il déclaré sur la radio catalane Rac1.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne