Banksy : des Street Artistes rivaux vandalisent le pochoir apparu sur le mur de la prison d’Oscar Wilde

Banksy : des Street Artistes rivaux vandalisent le pochoir apparu sur le mur de la prison d’Oscar Wilde
Le pochoir Create Escape de Banksy est apparu sur le mur de la prison de Reading (Angleterre) dans la nuit du dimanche 28 février au lundi 1er mars. ©Banksy

Ce matin, mardi 16 mars, les riverains de la prison de Reading ont eu la triste surprise de découvrir que la dernière œuvre de Banksy avait été vandalisée. Deux semaines après son apparition sur le mur de la dernière geôle d'Oscar Wilde, Create Escape a été recouverte de peinture rouge, accompagnée du blaze « Team Robbo ».

Ils sont de retour pour nous jouer un mauvais tour. Après avoir vandalisé deux œuvres de Banksy à la Nouvelle-Orléans (Umbrella Girl et Gray Ghost), la « Team Robbo » s’en prend maintenant à la dernière intervention du plus connu des Street Artistes anonymes : Create Escape, à la prison de Reading, à 50 kilomètres à l’ouest de Londres (Angleterre). Représentant un prisonnier en pleine évasion, accroché à une corde improvisée à l’aide d’un drap blanc qui se termine en feuille de papier, au bout de laquelle se trouve une machine à écrire, le pochoir a été réalisé par Banksy le 1er mars dernier sur le mur de la dernière prison du poète irlandais Oscar Wilde (1854-1900). Trois jours plus tard, le Street Artiste avait lui-même revendiqué son œuvre sur Instagram avec une vidéo détournant la célèbre émission du peintre et animateur de télévision Bob Ross intitulée The Joy of Painting with Bob Ross & Banksy. À l’instar de leurs précédents actes de vandalisme, ni vus, ni connus, les graffeurs ont recouvert de peinture rouge un élément du pochoir de Banksy (ici la machine à écrire) et ajouté leur blaze (signature de Street Artiste) en dessous de celui-ci.

Une faide posthume entre Street Artistes

Ce sont des passants qui ont découvert ce matin la peinture encore fraîche sur le mur en briques rouges de la prison. Des photos du passage de la Team Robbo ont immédiatement été partagées sur les réseaux sociaux, accompagnées des messages désolés des internautes. Save Reading Gaol, l’association qui milite pour faire de l’ancien centre pénitentiaire (désaffecté depuis 2013) un centre culturel et qui s’était réjouie de l’apparition du pochoir de Banksy, a également commenté la mauvaise nouvelle sur Twitter : « En cette triste matinée, nous venons d’apprendre que le pochoir de Banksy sur le mur de la prison de Reading a été délibérément endommagé avec de la peinture rouge. Horrible nouvelle que de se réveiller et de réaliser que l’absence de protection de la précieuse œuvre par la ville l’a rendue vulnérable à la destruction… ». En effet, l’œuvre n’avait pas été protégée, comme à l’accoutumée, d’une plaque de plexiglas pour éviter les interventions de Street Artistes jaloux et/ou malveillants. Ainsi, seulement quelques jours après la confirmation du Historic England (l’organisme du gouvernement britannique chargé de protéger les bâtiments historiques) que ce nouveau pochoir ne serait pas protégé, celui-ci n’a pas échapper au courroux de la Team Robbo.

Un passant abasourdi par le tag rouge s’est précipité sur Create Escape ce matin, liquide vaisselle et détergent en main, pour effacer — avec succès — une partie de celui-ci. Ainsi, pour l’heure, il ne reste plus que l’inscription « Team » de lisible, toutefois l’aplat rouge apposé sur la machine à écrire n’a pas pu être sauvé par ce super-héros de Banksy. Save Reading Gaol a interpelé le ministère de la Justice britannique pour qu’il puisse faire nettoyer l’œuvre tant que cela est encore possible.

Même après le décès de King Robbo en 2014, la faide entre les deux Street Artistes est visiblement loin d’être finie. La signature « Team Robbo » semble être une référence évidente au Némésis de Banksy. La rivalité entre les deux artistes ne date pourtant pas d’hier. Dans les années 1990, lors de leur rencontre, Robbo confiait déjà les prémices du conflit avec le Street Artiste de Bristol : « Il m’a traité comme si je n’étais personne », confiait-il. « Il se la jouait en disant qu’il ne me connaissait pas. Je lui ai collé une baffe et je lui ai dit : « Tu me connais peut-être pas mais t’es pas près de m’oublier » ». En 2009, Banksy riposte en recouvrant quasi-entièrement un des graffitis de King Robbo par l’un des siens au Regent’s Canal à Camden, au nord de Londres, soit une véritable déclaration de guerre entre les deux camps. Cette rivalité de notoriété publique a fait l’objet en 2011 d’un documentaire, intitulé Graffiti Wars (soit Guerre des Graffitis en français), à la télévision britannique, sur Channel 4.

Toyer une œuvre de Banksy aujourd’hui, est-ce vraiment sensé ?

On peut tout de même se demander ce qu’a bien pu faire Banksy pour s’attirer (à nouveau) les foudres des suiveurs du feu King Robbo, sept ans après sa disparition. Recouvrir une œuvre dans la rue, ou toyer dans le jargon, est très mal vu dans le monde de l’art urbain. En effet, le code de conduite implicite de la rue déconseille fortement de taguer par-dessus le graffiti d’un autre sans son accord. Bien qu’une œuvre de Street Art soit par essence faite pour être éphémère, le recouvrement, surtout partiel, est considéré comme une véritable provocation entre artistes.

On peut se demander si le choix des pochoirs toyés, que ce soit ceux de la Nouvelle-Orléans ou celui de Reading, est bien pertinent ? Quel message la Team Robbo passe-t-elle en vandalisant des œuvres qui rendent hommage aux victimes de l’ouragan Katrina ? De même, que souhaitent-ils exprimer en souillant un pochoir soutenant une noble cause comme la reconversion de la geôle de Reading en centre d’art ? Car, outre le bel hommage que fait Banksy à l’un des plus grands poètes du XIXe siècle avec Create Escape, le fugitif peint symbolise également un message de soutien à la campagne qui œuvre pour donner une seconde vie artistique au site historique. Ne desservent-ils pas leur cause et, par la même occasion la mémoire de King Robbo, en prenant le parti de saccager ce message de soutien ? Quoi qu’il en soit, pour le moment, Banksy n’a pas réagi publiquement à ces attaques directes. Si le mystérieux Street Artiste était resté de marbre face aux atteintes de ses fresques néo-orléanaises, le sera-t-il tout autant pour sa dernière création ?

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