Sur le darkweb turc, des esclaves yézidies

Une enfant réfugiée kurde yézidie pousse une poussette dans un camp de réfugiés (photo d'illustration) ©Maxppp - EPA/KOSTAS TSIRONIS
Une enfant réfugiée kurde yézidie pousse une poussette dans un camp de réfugiés (photo d'illustration) ©Maxppp - EPA/KOSTAS TSIRONIS
Une enfant réfugiée kurde yézidie pousse une poussette dans un camp de réfugiés (photo d'illustration) ©Maxppp - EPA/KOSTAS TSIRONIS
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La police turque est parvenue à libérer une fillette de sept ans, vendue aux enchères à Ankara. Une affaire qui n'est pas une première et qui montre l'ambiguïté de la Turquie vis-à-vis des djihadistes.

On part en Turquie ce matin où la police a libéré une fillette de 7 ans. Une petite yézidie mise à prix sur le dark web le 23 février, avec photo et mensurations, et disponible au meilleur enchérisseur à Ankara, la capitale turque. Les policiers turcs ont surenchéri puis récupéré l’enfant il y a quelques jours dans le quartier de Kecioren.

Le "vendeur" était un cadre dirigeant de l’État islamique à Mossoul qui avait réussi à se "réfugier" à Ankara et qui, en guise de butin, avait gardé cette enfant yézidie. Ce n’est pas la première affaire de ce genre.

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En juillet dernier, c’est une jeune yézidie de 24 ans qui est ainsi libérée par la police, toujours à Ankara et toujours retenue par un ancien cadre de l’État islamique qui l’avait achetée en 2018 à Mossoul sur un marché aux esclaves en ligne et qui la revendait.

En plein cœur de la Turquie, un darkweb proposant des esclaves

C’est toute l’effroyable ambiguïté de ces histoires. D’un côté, la police turque a fait son travail : à savoir enquêter, libérer les victimes, arrêter les esclavagistes islamistes.

De l’autre, ces "vendeurs" de chairs humaines, souvent anciens militants ou cadres de l’Etat islamique se sentent suffisamment à l’aise en Turquie pour s’y installer avec leurs "butins" humains et ensuite les proposer à la revente au travers du darkweb.

D’un côté la Turquie a subi, comme la France, des attentats islamistes épouvantables, comme celui du 10 octobre 2015 à Ankara précisément. Un attentat revendiqué par l’État islamique et qui a fait au bas mot 102 morts, le pire attentat de l’histoire du pays.

De l’autre, on sait que la Turquie – et notamment ses services secrets, le MIT – joue un jeu dangereux en favorisant les groupes islamistes en Syrie contre l’ennemi kurde.

Les liaisons dangereuses d'Ankara avec les groupes djihadistes

On a des tas d’indices, tout simplement en lisant la presse officielle turque ! On sait par exemple que la Turquie a exfiltré en novembre 2019 du camp de al-Hoj, un camp de prisonniers djihadistes aux mains des kurdes syriens, des familles entières de djihadistes.

On sait aussi que Abu Bakr Al-Baghdadi, le calife autoproclamé de l’Etat islamique, est mort en octobre 2019 lors d’une opération de l’armée américaine à Barisha, une ville syrienne frontalière avec la Turquie. Il n’y a pas de hasard dans cette localisation.

On sait enfin, notamment au travers du travail de journalistes turcs indépendants, que des réseaux de solidarité avec les familles et aussi d'anciens cadres de l’État islamique persistent en Turquie, notamment à Ankara. Les autorités ne peuvent pas l’ignorer.

En fait la Turquie applique un principe assez simple : en Syrie, les ennemis islamistes de mes ennemis kurdes sont mes amis. Sauf qu’à trop se sentir confortable côté turc de la frontière, les djihadistes finissent par embarrasser leurs hôtes.

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