Plus de 100 morts [selon les dernières informations, 137 victimes ont été recensées après l’attaque du 21 mars, soit 200 en moins d’une semaine], des femmes violées, du bétail et des biens incendiés ou emportés. C’est le bilan laissé derrière eux, ce 21 mars, par des centaines d’hommes armés qui ont pris pour cibles plusieurs campements. Les victimes, des nomades sans défense, ont été massacrées autour de puits et de forages dans la région de Tahoua [à l’est de Niamey].

En une semaine, c’est la deuxième fois, après les 66 tués de l’attaque de Banibangou, dans la région de Tillabéri [près de la frontière avec le Mali], que des hommes armés endeuillent le Niger où sévit, sans répit, le groupe de l’État islamique au grand Sahara.

À quand la fin du cycle des condamnations et des deuils nationaux ? Plus que jamais, Mohamed Bazoum, qui a obtenu un score de 55,66 % [à l’élection présidentielle de décembre 2020], est au pied du mur. La lutte contre le terrorisme et le banditisme, qu’il avait érigée en priorité dans son programme de campagne, sonne comme une urgence. Sauf que l’heure n’est plus au discours, mais à l’acte. Passer à l’action s’impose.

Changer de stratégie

Ancien ministre chargé de l’Intérieur qui connaît bien le dossier et le terrain, le nouveau président ne bénéficiera d’aucun état de grâce car l’heure est grave et les populations civiles ne savent plus à quel saint se vouer.

L’évidence est que la vaillance de l’armée nationale, les assauts encore timides de la force montante du G5 Sahel [composée des armées des pays de la région] et la puissance de feu de la force française Barkhane ont leurs limites.

Faudra-t-il se résoudre à établir des canaux de discussion entre ces terroristes qui ont toujours une longueur d’avance sur l’armée en matière de renseignement et bénéficient de complicités à des niveaux insoupçonnés ? La guerre étant asymétrique et les assaillants opérant par des manipulations des communautés ethniques qu’ils élèvent les unes contre les autres, les forces de défense seront-elles en mesure, quels que soient leurs équipements les plus lourds et les plus sophistiqués, de prendre le dessus sur l’hydre terroriste ? Rien n’est moins sûr !

L’avertissement au nouveau président

Il faudra, ni plus ni moins, repenser les stratégies de lutte. Il faudra par exemple prendre en compte toutes les régions et toutes les populations,dans le déploiement des projets de développement. Le Niger ne se limite pas à Niamey, la capitale. Cependant, l’arme décisive contre la menace terroriste n’est autre que la cohésion nationale. Dans la division, la lutte contre le terrorisme n’a pas la moindre chance d’aboutir. Un proverbe africain n’énonce-t-il pas que “lorsque la pluie vous tape, ne vous battez plus entre vous” ? Comme quoi “la jarre trouée ne pourra jamais garder l’eau”.

Mohamed Bazoum est prévenu ! Les tueurs du désert, qui ont frappé le jour même de la proclamation de sa victoire à la présidentielle, voudraient lui lancer un avertissement, avec frais, qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement.