Les 168 millions d’habitants du Bangladesh fêteront ce vendredi 26 mars les 50 ans de leur indépendance en célébrant la réussite économique de leur pays qui avait, au départ, peu d’atouts mais devrait bientôt avoir un PIB par habitant supérieur à celui de l’Inde voisine.

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S’exprimant à la télévision dans une allocution solennelle, la première ministre du pays, Sheikh Hasina, soulignant la croissance moyenne supérieure à 7 % par an depuis une décennie, a conclu : « Notre succès est celui de tous les habitants du Bangladesh… Vous avez prouvé que l’impossible peut devenir possible. »

Un pays exsangue après la guerre d’indépendance

Le pays avait proclamé son indépendance le 26 mars 1971, à l’issue d’une guerre avec le Pakistan qui avait fait plus de 3 millions de tués. Il en était sorti exsangue. Henry Kissinger, alors conseiller à la sécurité nationale des États-Unis l’avait qualifié de « cas désespéré ». Pays essentiellement agricole, souvent balayé par les cyclones, sans richesse naturelle, il figurait parmi les plus pauvres du monde.

Cinquante ans plus tard, les progrès sont significatifs au point que son cheminement apparaît comme un exemple pour ses voisins. La part de population se situant sous le seuil de pauvreté est tombée sous les 10 % quand elle dépassait les 80 % il y a cinquante ans ; l’espérance de vie atteint les 72 ans quand elle était de 41 ans à la fin des années 1970 ; la mortalité infantile est tombée sous les 30 pour 1000 naissances quand elle était de 144 pour 1 000.

Le textile, pétrole du Bangladesh

Le Bangladesh doit son décollage économique à l’industrie textile, souvent décrite comme le « pétrole » de la nation. Depuis vingt ans, le Bangladesh est devenu l’une des principales bases de production de l’industrie mondiale du prêt-à-porter. Ses 5 000 usines de confection fournissent les plus grandes enseignes comme H & M, Zara ou Carrefour. Plus de 4 millions de salariés, en grande majorité des femmes venues de la campagne, y travaillent. Pour elles, c’est un moyen d’émancipation.

L’exportation de produits textiles est devenue la première source de devises du Bangladesh. Elle rapporte plus de 26 milliards d’euros chaque année. Cela fait du Bangladesh le deuxième fournisseur de vêtements au monde, derrière la Chine et devant le Vietnam.

L’accroissement des inégalités

Cette croissance s’est faite au prix de bas salaires et de conditions de travail difficiles. Le 24 avril 2013, l’effondrement d’un immeuble abritant des ateliers, le Rana Plaza, avait causé la mort de 1 134 personnes. Les salariés du textile se mettent régulièrement en grève pour obtenir de meilleurs salaires et le droit de se syndiquer. Ces mouvements, conjugués à la pression des consommateurs occidentaux ont permis quelques avancées, comme la quasi-disparition du travail des enfants dans le secteur du textile.

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L’essor de cette industrie a permis une augmentation générale du niveau de vie : depuis 1990, le revenu brut par habitant a triplé, la durée moyenne de scolarité a augmenté de trois ans et l’indice de développement humain a augmenté de 60 %. Le pays a vu le développement d’une classe moyenne et même d’ultra-riches, avec l’accroissement des inégalités.

Un régime de plus en plus autoritaire

Le Bangladesh pourrait sortir en 2024 de la catégorie des « pays les moins avancés », au sens du Conseil économique et social des Nations Unies et le gouvernement affiche l’ambition de se classer en 2031 parmi les « pays à revenus intermédiaires ».

Du point de vue politique, toutefois, la réussite du pays est moins éclatante. Sheikh Hasina, au pouvoir depuis 2009, fait de plus en plus l’objet d’un culte de la personnalité. Le pays est 151e au classement de la liberté d’expression de Reporters sans frontières. L’organisation souligne « l’inquiétante recrudescence des violations de la liberté de la presse ». La dirigeante du principal parti d’opposition, Khaleda Zia, se trouve en prison pour corruption et toute opposition a quasiment disparu.