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Nantes. « La prochaine fois, je vais sans doute mourir », craint le blogueur azéri

Opposant au régime de Bakou, un blogueur azéri a échappé déjà deux fois à de violentes agressions sur le sol nantais, la dernière le 14 mars. Mahammad Mirzali vit, depuis, reclus. Refusant de bâillonner sa liberté de parole. Mais conscient d’être peut-être en sursis.

Depuis son agression du 14 mars, à Nantes, Mahammad Mirzali vit reclus dans son appartement. Le blogueur azéri a « peur » mais n’a pas l’intention de se taire pour autant. « C’est ma liberté de dénoncer ce qui est noir dans le régime de Bakou », dit-il.
Depuis son agression du 14 mars, à Nantes, Mahammad Mirzali vit reclus dans son appartement. Le blogueur azéri a « peur » mais n’a pas l’intention de se taire pour autant. « C’est ma liberté de dénoncer ce qui est noir dans le régime de Bakou », dit-il. | OUEST FRANCE
  • Depuis son agression du 14 mars, à Nantes, Mahammad Mirzali vit reclus dans son appartement. Le blogueur azéri a « peur » mais n’a pas l’intention de se taire pour autant. « C’est ma liberté de dénoncer ce qui est noir dans le régime de Bakou », dit-il.
    Depuis son agression du 14 mars, à Nantes, Mahammad Mirzali vit reclus dans son appartement. Le blogueur azéri a « peur » mais n’a pas l’intention de se taire pour autant. « C’est ma liberté de dénoncer ce qui est noir dans le régime de Bakou », dit-il. | OUEST FRANCE

Tout est raconté avec une forme de froideur. Peut-être est-ce la barrière de la langue. Mahammad Mirzali travaille tous les jours son français dans des cahiers de vacances mais c’est encore parfois laborieux. Les mots français choisis par l’Azéri percutent, pourtant. Le 14 mars dernier ? « Ils m’ont laissé pour mort. » Agonisant sur le bitume du quai de la Fosse. Trois hommes armés de poignards s’en sont pris au blogueur en plein centre de Nantes. Un autre se tenait en arrière, dans une voiture. Il a reçu seize coups. « I ls ont voulu me couper la langue et les oreilles, pour me faire taire. » Il s’est protégé comme il a pu, et garde d’impressionnantes cicatrices, surtout sur la tête.

Manifestement, il dérange. Réfugié politique depuis 2016, le jeune homme de 27 ans avait déjà subi une attaque à son arrivée « à Laval. Trois hommes armés voulaient m’intimider. On m’avait mis à l’abri du côté de Perpignan. » À Nantes, où il vit depuis 2017, il a été blessé à l’épaule par un tir d’arme à feu, en octobre dernier. « Je pensais que mon statut de réfugié me protégerait en France… » livre-t-il avec lassitude. Récemment, il a encore reçu des menaces de mort.

« Aujourd’hui, j’ai peur »

Les enquêteurs de la police judiciaire de Nantes, chargés de ce dossier particulier, ont passé au scanner la vie du jeune homme. Ils n’ont trouvé aucune autre aspérité que son activisme contre le régime de Bakou sur sa chaîne YouTube, suivie par 265 000 personnes. Ses vidéos ont été vues des millions de fois. Tout ramène à son travail pour dénoncer la corruption en Azerbaïdjan. Il ne fait aucun doute pour Mahammad Mirzali qu’une main politique a commandité ces attaques. On a vainement tenté d’avoir des explications de l’ambassade d’Azerbaidjan.

Il n’est plus le jeune homme fougueux de 17 ans qui faisait ses classes militantes dans les rues de la capitale de son pays. Il était plus insouciant. « Aujourd’hui, j’ai peur », confie-t-il. Le dernier SMS de ses ennemis, évoquant la présence d’un sniper, le maintient enfermé dans son appartement, volets baissés. « N ous sommes les seuls à lui rendre visite. La situation est très inquiétante, craint Kamran Karimov, son ami installé lui aussi en Loire-Atlantique avec sa famille. Mon père est également réfugié politique. Il a subi du chantage pour faire cesser des messages sur Facebook. C’est comme ça chez nous. » Certaines méthodes semblent s’exporter.

« D’autres viendront »

Mahammad Mirzali a « peur » mais il continue de diffuser des informations sur le président Ilham Aliyev et ses proches. « Moi, j’ai toujours cherché ce qui est noir dans ce régime. Je n’ai plus que cette liberté. Pourquoi m’arrêter ? Non, je ne peux pas. » Il n’est pas seul dans son combat. Des membres de l’administration azéri le « tuyautent » régulièrement. Il a reçu des photos de ces potentiels agresseurs. « Des criminals », dit-il. Comprendre des tueurs à gage. « J imagine qu’ils sont déjà loin de France. »

La pression pour le faire taire « ne s’arrête jamais. Alors, d’autres viendront. » Il dit attendre. « Et la prochaine fois, je vais sans doute mourir si on ne m’aide pas. » Ce n’est plus du détachement. C’est de la fatalité.

Reporters sans frontières demande sa protection

L’organisation Reporters sans frontières défend la liberté d’expression. Et défend donc Mahammad Mirzali. « C’est un blogueur dont la vie est menacée par ses publications. C’est choquant et très grave que cela arrive sur le sol français », dénonce Jeanne Cavelier, responsable du bureau Europe de l’est et Asie centrale de RSF.

Les agressions subies par le jeune réfugié nantais « ne sont pas des méthodes étrangères au régime de Bakou. Beaucoup de journalistes partis à l’étranger ont été kidnappés, ramenés au pays, puis condamnés. Et les menaces sont très régulières vers des gens réfugiés en France, en Allemagne ou en Géorgie. »

La priorité, pour Jeanne Cavelier, est de mettre Mahammad Mirzali à l’abri. « Nous dénonçons fermement ces tentatives de crimes. On demande la protection de la France et des autorités françaises. Ce qui est déconcertant, c’est ce premier acte d’octobre dernier. En mars, c’était en plein jour. Il vit dans l’angoisse. » Des courriers vont être envoyés très prochainement au parquet de Nantes et à l’équipe du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.

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