thérapies de conversionAu Pakistan, un exorciste prétend avoir avoir "converti" 500 gays à l'hétérosexualité

Par Nicolas Scheffer le 08/04/2021
Pakistan

Au Pakistan, un exorciste témoigne de sa pratique des "thérapies de conversion". Il prétend avoir "guéri" 500 personnes de leur homosexualité, en récitant le Coran. Il leur a surtout infligé des souffrances physiques et psychiques.

Au Pakistan, Fahad affirme avoir "guéri" 500 personnes pour sorcellerie, possession démoniaque et homosexualité. "60% des cas d'homosexuels qui sont venus me voir sont possédés par des démons et de la magie noire", assure-t-il à Vice (en anglais). Selon cet homme de 35 ans, 500 hommes homosexuels auraient été "convertis" après avoir récité des versets du Coran.

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Depuis 2012, il conduit des pseudo "thérapies de conversion" religieuses en tant que guide spirituel. Ces "thérapies" promettent de changer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre des participants. Non seulement elles sont inefficaces mais elles provoquent des troubles psychiques importants chez ceux qui y sont contraints. En France, une proposition de loi a été déposée pour les interdire, sans qu'une date n'ait été avancée pour qu'elle soit votée.

"Quatre heures à le frapper"

"L'un de mes cas les plus difficiles de ma vie concernait un Hafiz-e-Quran (une personne qui a appris par cœur le Coran, ndlr). Pendant quatre heures, jusqu'à deux heures du matin, j'étais sur lui à le frapper et il n'avait même pas de cicatrices sur le corps", explique, fier de lui, Fahad. Le Pakistan n'a pas évalué avec précision le nombre de "thérapies de conversion" qui sont pratiquées - la France non plus. Mais au Pakistan l'homosexualité est considérée comme un péché et un comportement déviant. Les relations entre personnes de même sexe sont d'ailleurs criminalisées par le Code pénal, hérité des lois de l'empire britannique.

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Selon l'exorciste, l'homosexualité est un "symptôme" de l'influence du démon. À 31 ans, Junaid (prénom modifié) est l'une des victimes de cette prétendue "thérapie", qui lui a été infligée pendant sept ans. Il est allé voir l'exorciste lorsqu'il a été atteint d'une dépression sévère et de troubles anxieux, raconte Vice. L'exorciste a jugé qu'il était sous influence démoniaque.

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"Je dirais que je suis encore bisexuel"

Petit à petit, il indique avoir progressivement eu de l'attirance pour les femmes. "Si je parle terminologie, je dirais que je suis encore bisexuel (sic). Avant cette thérapie, je ne pouvais même pas approcher une femme. Maintenant, je peux l'envisager et ressentir une forme d'attraction envers une femme", témoigne-t-il. "Je me bats encore. Je disais que je me contrôle mieux et que ça ne me dérange pas plus que cela désormais".

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Dès 2007, l'Association américaine de psychologie a conclu dans une étude que les "thérapies de conversion" sont inefficaces. Elle souligne surtout un lien entre ces "thérapies" et l'auto-destruction. "Dans de nombreux cas, des 'patients' ont été battus, ils ont subits des punissions corporelle et ont parfois dû être hospitalisés. Ces histoires sont absolument choquantes. Dans l'un des cas, le praticien avait ligoté un de ces clients et jetait des poubelles sur lui", regrette Salmaan Tahir, un psychologue basé à Islamabad.

 

Crédit photo : Faseeh Fawaz / Unsplash