Le plaisir, une quête préhistorique

"Baton de commandement" orné de phallus
"Baton de commandement" orné de phallus
Le plaisir, une quête préhistorique
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Le plaisir, une quête préhistorique

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L'explosion des ventes de sex-toys est un des effets secondaires de la crise sanitaire que nous vivons. Pourtant la recherche du plaisir n'est pas une quête récente, bien au contraire d'après l'archéologie.

Le renouvellement de notre sexualité semble plus que jamais d’actualité alors que les confinements successifs impactent directement la vie des couples comme des célibataires. Pour preuve : la popularité des jouets sexuels a bondi dès le premier confinement en France.

Mais ce n'est pas un phénomène nouveau, cela fait  des dizaines de milliers d'années qu’homo sapiens est à la recherche d'un plaisir pas forcément associé à la reproduction.

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Des jeux érotiques gravés dans la pierre

Sur ces dessins vieux de 14 000 ans on devine des jeux érotiques, la pratique du sexe oral indique même une intention : celle de donner du plaisir à un partenaire.

Plaque de 14 000 ans, retrouvée dans la grotte de La Marche
Plaque de 14 000 ans, retrouvée dans la grotte de La Marche
- Marco Garcia Diez

Ce que nous savons c’est que l’évolution humaine nous a dotés, d’un point de vue naturel, d’un corps pour profiter d’une sexualité reproductive et non reproductive.                
Marcos Garcia Diez, archéologue

Au paléolithique, cela fait déjà des millions d’années que les signes extérieurs de l’ovulation ont disparu avec pour conséquence un acte sexuel qui n’est plus lié aux périodes de rut comme chez d’autres primates.
La sexualité n’a donc pas forcément la reproduction comme finalité, ce qui conduit à une transformation profonde des rapports sexuels et laisse place au désir, à l’érotisme ou à la recherche du plaisir.

Ce n’est pas seulement possible, nous savons que c’est sûr. C’est sûr parce qu’il existe quelques figures dans les grottes, les ossements, les pierres, qui évoquent ce monde non reproductif. Par exemple, qu'est-ce que nous avons ? Eh bien nous avons des gens qui se masturbent.                 
Marcos Garcia Diez, archéologue

Ces représentations de la masturbation masculine sont rares, on distingue explicitement les signes de la jouissance.

Représentation d'une gravure espagnole de 18 000 ans
Représentation d'une gravure espagnole de 18 000 ans
- Marco Gracia Diez

Des positions sexuelles différentes

Autres preuves archéologiques : différentes positions sexuelles gravées dans la pierre. Contrairement aux animaux qui reproduisent la même posture, l’homme de Cro-Magnon avait plusieurs pratiques sexuelles.

La diversité de ces postures, il y en a cinq ou six pas beaucoup plus, la recherche de diversité dans la pratique sexuelle c’est une recherche du plaisir et cela implique aussi différentes façons de nouer des relations avec l’autre.                
Marcos Garcia Diez, archéologue

Ces dessins assez explicites ont été gravés il y a 18 000 ans mais les premières représentations d’organes sexuels sont encore plus anciennes et coïncident avec le début de l’art rupestre il y a 40 000 ans.  

On a trouvé plusieurs de ces symboles en Espagne et en France. Les fouilles ont révélé des centaines de Vénus aux attraits sexuels exagérés ce qui témoigne d’une pratique récurrente sans que l’on sache s’il s’agit de sculptures à caractère érotique ou exprimant la fécondité.  

Pourquoi ces représentations de la sexualité ?

D’autres découvertes interrogent les archéologues, plusieurs "bâtons de commandement" portent des dessins phalliques. Certains sont même à taille humaine et peuvent être interprétés comme des jouets sexuels.

"Baton de commandement" représentant un double phallus
"Baton de commandement" représentant un double phallus
© Getty

Ce sont des pénis qui sont en état d’excitation, ce qui introduit la possibilité, et je crois que dans certains cas une haute possibilité, qu’ils aient été utilisés comme godemichets ou comme éléments de masturbation. Nous ne pouvons pas l’assurer mais nous ne pouvons pas non plus écarter cette hypothèse. Ce sont les limites de l’archéologie.                
Marcos Garcia Diez, archéologue

La biologie nous permet d’envisager des pistes comme le passage à la bipédie il y a des millions d’années qui a eu un impact sur la sexualité de nos lointains ancêtres, en développant la poitrine, en cachant l’entrée du vagin et en rendant ainsi moins présentes les phéromones qui s’en dégageaient.

En se mettant debout, les êtres humains ont dû trouver d’autres moyens pour ce qu’on appelle l’attirance sexuelle, puisque l’attirance naturelle est restée cachée. Il a fallu développer d’autres éléments d’attirance sexuelle que ce soit pour la reproduction ou non.

Une vision de la sexualité  hétérosexuelle, basée sur la pénétration d'un pénis dans un vagin n'est donc pas aussi "naturelle" que ça.