"Le Baiser" de Klimt : l'histoire d'un chef-d'œuvre racontée par Alain Vircondelet

Mardi-Art

Tewfik Hakem s'entretient avec l'historien de l'art, essayiste, biographe, Alain Vircondelet, à propos de De l'or dans la nuit de Vienne, selon Klimt, paru aux éditions Autrement, dans la nouvelle collection, Ateliers Henry Dougier, Le roman d'un chef-d'œuvre. Enquête sur le fameux tableau du peintre autrichien, Gustav Klimt (1862-1918) achevé en1909.

" Le Baiser de Klimt est devenu le tableau de tous les records : le plus  connu du XXe siècle, le plus admiré, le plus copié, le plus "marchandisé"... Mais que sait-on de sa création ? Et surtout, quel sens Klimt a-t-il voulu donner à son chef-d'œuvre ? "

J'ai immédiatement pensé au Baiser de Gustav Klimt lorsque Henry Dougier m'a proposé de participer à cette collection. C'est le tableau le plus connu du XXe siècle dans le monde, reproduit sur tous tous les supports - des mugs aux tapis de souris en passant par les têtes de lits ou les préservatifs… Toutes les start-up s'en emparent. C'est un tableau enchâssé dans de l'or et, comble de l'ironie, voilà qu'il se retrouve partout.

" J'essaie toujours d'aller dans les zones d'ombre, les zones de nuit, c'est ça qui m'intéresse. La toile est connue dans le monde mais peut-être, ne l'a t-on pas assez observée ? "

Le baiser est sur la joue. L'homme enlace la femme, il est à peine au-dessus d'elle, recouvert d'un manteau d'or, elle porte une cape recouverte de petites fleurs et, de part et d'autre, des fils comme des bracelets. Le couple est sur une sorte de prairie fleurie et, tout autour d'eux, de l'or. Il la tient comme si la femme pouvait très vite basculer, on a une impression de stabilité et même, de fragilité, comme de vertige. C'est un tableau qui semble figé et, en même temps, coulé dans le mouvement ; la prairie, le vent, les fleurs… 

Nous sommes dans les années 1908-1910, avec ce mouvement des artistes viennois fondateur, qui a pour vocation de s'opposer à la société viennoise qu'ils estiment décadente - entre la douleur de Mahler et les valses de Strauss… A ce moment où Klimt commence un cycle, celui de l'or. Nous sommes dans une période où tout semble vaciller - c'est l'époque de Freud, Nietzsche - à la veille d'un effondrement mondial, une période qui a besoin d'unité.

L'or, c'est la splendeur de toutes les civilisations et de toutes les cultures, métal inaltérable, lié au soleil, à la lumière : Klimt va faire en sorte d'enchâsser ses personnages dans de l'or. Nous sommes dans une vision spiritualiste de l'élévation. Son inspiratrice est Emilie Louise Flöge...

Klimt est aussi un géant, une sorte d'ogre, un être très sensuel. Il a eu quatorze enfants de femmes différentes qu'il a reconnus, il aimait s'entourer de femmes, des prostituées souvent qui évoluaient nues dans son atelier et l'inspiraient.

Programmation musicale

Pascal Auberson, Dans le baiser de Gustav Klimt, 2008

Pour en savoir plus sur la collection 

Editions Autrement, Ateliers Henry Dougier, Le roman d'un chef-d'œuvre

" Certains tableaux ont cette étonnante capacité de nous réenchanter, corps et âme, de mobiliser notre mémoire, notre imaginaire, nos émotions. Mais comment sont-ils nés ? Dans quelles circonstances et à  quel moment de la vie de l’artiste ?