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Mérignac : une femme meurt, brûlée vive en pleine rue par son mari récidiviste

L’homme, déjà emprisonné pour violences conjugales, a tiré des coups de feu dans les jambes de cette femme de 31 ans, avant de l’immoler. Des associations dénoncent l’inaction de l’Etat.

Le Monde avec AFP

Publié le 05 mai 2021 à 18h11, modifié le 05 mai 2021 à 21h19

Temps de Lecture 4 min.

C’est un nouveau féminicide d’une violence inouïe qui suscite une onde de choc et d’indignation. Chahinez, 31 ans, mère de trois enfants, est morte mardi 4 mai à Mérignac, près de Bordeaux.

Vers 18 h 10, en pleine rue de cette tranquille banlieue bordelaise, Mounir B., 44 ans, déjà emprisonné pour violences conjugales en 2020, a poursuivi sa femme, dont il était séparé. Il a tiré plusieurs coups de feu dans ses jambes jusqu’à ce qu’elle s’effondre. Il l’a ensuite aspergée d’un liquide inflammable alors qu’elle était encore en vie et l’a immolée par le feu, selon le parquet de Bordeaux et la police. Le pavillon où vivait la victime a été partiellement incendié dans des circonstances qui n’ont pas été précisées.

Mounir B. a été interpellé environ une demi-heure plus tard par des policiers de la brigade anticriminalité (BAC), dans la commune limitrophe de Pessac, et placé en garde à vue. Il « était porteur d’un fusil de calibre 12, d’un pistolet à gaz et d’une ceinture de cartouches », selon le communiqué du parquet de Bordeaux, qui a ouvert une enquête du chef d’« homicide volontaire par conjoint » et « destruction par incendie ».

Une plainte déposée le 15 mars

L’homme avait « été condamné le 25 juin 2020 par le tribunal correctionnel de Bordeaux, dans le cadre d’une comparution immédiate pour violences volontaires par conjoint [à l’encontre de la même victime], à une peine de dix-huit mois de prison, dont neuf mois assortis d’un sursis probatoire pendant deux ans, avec mandat de dépôt décerné à l’audience », selon le parquet.

Il « avait obtenu à compter du 5 octobre » une mesure de placement extérieur spécifique pour les auteurs de violences conjugales. Libéré le 9 décembre 2020, « il était, depuis, suivi par le service pénitentiaire d’insertion et de probation de la Gironde ». Cette mesure « comprenait notamment une obligation de soins, l’interdiction d’entrer en contact avec la victime et l’interdiction de paraître à son domicile », selon le parquet.

Chahinez ne disposait pas du dispositif « téléphone grave danger » (une mesure mise en place pour protéger les victimes de violences conjugales ou de viol), et son époux ne s’était pas vu attribuer de bracelet antirapprochement, « pas effectif » à l’époque. Le 15 mars, Chahinez avait porté plainte au commissariat de Mérignac contre son conjoint pour une agression commise dans la matinée, selon le parquet. Mais l’intéressé, recherché par la police, était « introuvable ».

Lire notre enquête sur les féminicides : Article réservé à nos abonnés Le « crime passionnel », un si commode alibi

Prise en charge psychologique des enfants

Mercredi soir, à l’appel de collectifs de défense des femmes, quelque trois cents personnes, amies, voisines ou militantes, se sont rassemblées pendant une heure en silence près des lieux du drame, en déposant fleurs, bougies et petits mots pour dire : « On ne t’oublie pas », un message inscrit sur le trottoir.

Le maire de Mérignac, Alain Anziani (PS) a annoncé qu’une cellule psychologique avait été mise en place afin d’accueillir les personnes choquées par ce « féminicide d’une violence inouïe ».

Les trois enfants, âgés respectivement de 3, 7 et 11 ans, vivaient au domicile de la victime, mais « ne s’y trouvaient pas au moment des faits », a relevé le parquet, précisant qu’ils avaient « fait l’objet d’une prise en charge psychologique par le SAMU ».

Mercredi, des voisines de la victime exprimaient leur colère : « Elle avait trouvé la force de se séparer, au printemps dernier, quand son mari a été condamné à de la prison après l’avoir une nouvelle fois frappée. Mais il est ressorti en septembre ou octobre. Depuis, il la harcelait, l’espionnait, la suivait. (…) Il y a près de deux mois, il l’a une nouvelle fois agressée devant un supermarché. Il a réussi à la faire monter dans son fourgon et a tenté de l’étrangler. Elle est parvenue à s’enfuir », ont-elles déclaré au journal Sud-Ouest, précisant que la « police avait été prévenue ».

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« Cela se voyait qu’elle se faisait battre. Mais elle était très discrète, elle disait à nos mères que c’était compliqué », explique une jeune fille qui a ouvert une cagnotte sur Instagram (TousavecChahinez) « pour qu’elle puisse être enterrée en Algérie auprès de sa famille ».

« Le combat contre les violences conjugales et les féminicides continue », a assuré dans un tweet la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, chargée de la citoyenneté, Marlène Schiappa, se disant « horrifiée par ce crime ignoble ».

« Mais que fait Gérald Darmanin ? »

Plusieurs associations ont mis en cause l’Etat. « En plus d’être multirécidiviste, il avait une arme à feu ! Encore ! Mais que fait Gérard Darmanin ? », a tweeté Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, qui demande le retrait systématique des armes à feu aux conjoints violents dès le premier signalement.

« Inaction de l’Etat », a aussi réagi sur le réseau social l’association Osez le féminisme, estimant que « tout le monde savait qu’il était dangereux et armé ».

Le ministère de l’intérieur a annoncé en février avoir demandé aux préfets de « systématiquement saisir les armes des conjoints violents dès la plainte », une mesure permise depuis le Grenelle contre les violences conjugales organisé en 2019, mais encore trop peu appliquée, selon les associations.

Un rassemblement à l’appel de plusieurs collectifs de défense des droits des femmes devait se tenir en début de soirée à Mérignac. En 2020, 90 féminicides ont été officiellement recensés en France, contre 146 l’année précédente.

Le Monde avec AFP

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