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Ci-gît l'enfant Mtoto : la plus ancienne sépulture d'Afrique dévoile ses secrets

Des ossements humains.

Les restes d'un enfant de 3 ans ont été enterrés dans une fosse creusée délibérément dans une grotte.

Photo : CNRS

Radio-Canada

La plus ancienne sépulture connue d'un humain moderne en Afrique, datant de 78 000 ans, a été découverte par des archéologues au Kenya.

L’enfant de 3 ans a été soigneusement enterré par les siens à Panga ya Saidi, une vaste grotte nichée au cœur d'une forêt, près de la côte kényane.

Représentation artistique du petit Mtoto dans la position dans laquelle son corps a été retrouvé.

Représentation artistique du petit Mtoto dans la position dans laquelle son corps a été retrouvé.

Photo : MaxPlanck Institute/Mohammad Javad Shoaee/Jorge González/Elena Santos/F. Fuego

Le corps de Mtoto (enfant, en swahili) a été enfoui dans une fosse, enveloppé dans un linceul et couché en position fœtale, évoquant un rituel funéraire élaboré au sein de sa communauté, des Homo sapiens chasseurs-cueilleurs qui résidaient à cet endroit.

Sa mise au jour, décrite dans la revue Nature (Nouvelle fenêtre) (en anglais), est le fruit d'un long processus jalonné de surprises.

Tout commence en 2013. Une équipe d'archéologues fouille la grotte, un gisement connu où ont déjà été trouvés maints outils préhistoriques.

Des archéologues entrent dans la grotte nichée au coeur d'une forêt, près de la côte kényane où ont été découverts les restes d'un enfant de 3 ans nommé Mtoto.

Des archéologues entrent dans la grotte nichée au coeur d'une forêt, près de la côte kényane où ont été découverts les restes de l'enfant.

Photo : AFP / Francesco Derrico

Ils identifient une cavité inhabituelle, où apparaissent des ossements, mais qui se désintègrent dès qu'ils veulent les extraire.

Ça n'est qu'en 2017 qu'interviennent des fouilles supplémentaires, exposant la totalité de la fosse, une petite tombe creusée à trois mètres sous terre contenant un amas d'os décomposés.

Nul ne sait s'il s'agit de restes humains ou animaux. Vu la taille de la fosse, certains pensaient à un singe, a raconté Michael Petraglia, de l'Institut Max Planck, l'un des auteurs de l'étude, lors d'une conférence de presse.

Cette fois, pas question de laisser filer les fragiles os : ils sont consolidés, plâtrés dans un bloc. Et partent en toute sécurité au Musée d'histoire naturelle à Nairobi, où les scientifiques extraient délicatement des dents semblant appartenir à un homininé.

Reconstruction 3D de la disposition des restes de l'enfant.

Reconstruction 3D de la disposition des restes de l'enfant.

Photo : MaxPlanck Institute/Mohammad Javad Shoaee /Jorge González /Elena Santos /F. Fuego

Les spécimens prennent alors le chemin, dans les mains d'un chercheur kényan, d'un laboratoire spécialisé dans la conservation, à Burgos, en Espagne.

Là, une technique d'imagerie (tomographie) permet de voir à l'intérieur du bloc, sans le dégrader. Progressivement, nous avons découvert une partie d'un petit squelette de notre espèce, se souvient avec émotion Maria Martinon-Torres, auteure principale.

Le squelette, encore articulé, indique que l'enfant a été disposé sur le côté droit, jambes repliées sur la poitrine. Il présente une rare connexion anatomique, preuve que les os n'ont pas bougé et que le cadavre s'est décomposé in situ.

Seul le crâne s'est disloqué du reste du corps : Mtoto devait reposer sur un oreiller en matière périssable, qui a fini par laisser une béance dans laquelle la tête est tombée.

Un mouvement de rotation des clavicules dit aussi que le corps aurait été enveloppé dans un linceul, végétal ou en peau d'animal.

Conclusion : cet enfant a délibérément été placé là, et a fait l'objet d'une attention délicate de la part de sa communauté, décrypte la chercheuse du Centre national sur l'évolution humaine à Burgos.

Elle concède que l'interprétation est difficile. La position fléchie, assez commune dans les sépultures d'Homo sapiens ou de Néandertal, peut notamment signifier un simple souci pratique de gain de place.

Mais le fait d'avoir couché Mtoto comme s'il dormait, protégé d'un linceul, suggère à ses yeux une tendresse, un geste d'adieu donnant de la chaleur dans le plus froid des moments.

Ce comportement prouve, selon elle, que les anciens humains en Afrique vivaient aussi dans un monde symbolique, et étaient donc déjà dotés d'une cognition complexe, dont on cherche à comprendre quand et comment elle est née.

Trouver un corps d'enfant aussi bien conservé est extrêmement rare en Afrique, où les fossiles humains anciens se comptent sur les doigts d'une main, commente Antoine Balzeau, paléoanthropologue au Muséum national d'Histoire naturelle à Paris, qui n'a pas participé à l'étude.

C'est sur ce continent que les plus vieux fossiles d'Homo sapiens (300 000 ans) ont été découverts. Pourtant, c'est en Europe et au Proche-Orient qu'on a trouvé les plus anciennes sépultures (plus de 100 000 ans).

Est-ce dû à un biais de la recherche archéologique? Existe-t-il des tombes africaines antérieures à celle de Mtoto? Nous ne le savons pas, mais nous espérons bien en trouver à l'avenir, souhaite Michael Petraglia.

Si Mtoto appartient à notre espèce, il garde dans sa morphologie dentaire, par comparaison avec des restes humains de la même époque, quelques traits archaïques le reliant à de lointains ancêtres africains. Cela semble confirmer, selon les chercheurs, que l’origine de notre espèce en Afrique a des racines anciennes et régionalement diversifiées.

Avec les informations de Agence France-Presse

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