Napoléon : le musée de l’Armée ose la critique envers l’Empereur

Pas question de ne dresser que des lauriers à Napoléon ! L’exposition « Napoléon ? Encore ! » rappelle bien sûr la geste napoléonienne mais émet de nombreuses critiques envers l’action guerrière de l’empereur. Ici, par exemple, Laurent Grasso reprend le face à face de Bonaparte et du Sphinx millénaire mais rajoute une étrange aurore boréale annonçant « les désastres qui peuvent naître de cette ambition ».

Pour suivre ce parcours à travers les Invalides, il faut se munir d’un plan et arpenter le musée et le monument en commençant par la salle des Cavaliers. On peut y découvrir les images rapportées de Sainte-Hélène, lieu d’exil de Napoléon du 14 octobre 1815 à sa mort le 5 mai 1821, et montées par Ange Leccia. Une bande son dramatique théâtralise ces vues de paysages et de nuages de l’Atlantique sud. Il s’agit d’une commande spéciale pour l’exposition.

Dès l’entrée du musée de l’Armée, on peut voir le couronnement de Napoléon par David revu par l’artiste chinois Yan Pei-Ming à grands coups de brosse. Puis, il faut monter directement au deuxième étage, dans les salles napoléoniennes, pour traquer les œuvres contemporaines mises en relation avec les collections. Ici, Damien Deroubaix dresse un portrait sans concession de Napoléon (les chaînes rappellent son rétablissement de l’esclavage en Martinique en 1802) à deux pas du buste flatteur et en marbre de Chaudet, qui a connu de nombreuses éditions.

En transformant en militaire Madame de Staël, farouche opposante de Napoléon qui subit plusieurs fois l’exil, Célia Muller redonne vie à ceux ou celles qui connurent la vindicte napoléonienne. Ce pastel gris sur papier de soie possède une force incroyable et mélange l’image de la mère donnant le sein à son fils et celle des maréchaux d’Empire.

Aussi violent que le Coup de tête conçu par Adel Abdessemed d’après le geste du footballeur Zinedine Zidane, ce Cheval de Turin donne un coup de sabot rageur car les chevaux sont les véritables victimes des guerres. « On parle beaucoup de la guerre mais on parle très peu des animaux de la guerre, qui portaient les hommes et les armes », rappelle avec raison l’artiste.

Deuxième commande de l’exposition, l’installation de Pascal Convert a fait couler beaucoup d’encre, en particulier depuis la remarque amère de la Fondation Napoléon. Pourtant, la copie du squelette de Marengo, le cheval fidèle de Napoléon, flotte comme une âme tutélaire au-dessus du tombeau de l’Empereur. Il rappelle l’antique tradition de l’enterrement des cavaliers avec leurs montures. Une Vanité contemporaine.