Féminicide de Mérignac : la mission d’inspection pointe « une série de défaillances »

Ce rapport d’étape fait suite à l’homicide, le 4 mai dernier, d’une mère de famille de 31 ans par son mari violent et récidiviste.

Source AFP

La jeune femme avait été immolée par le feu en pleine rue par son mari.
La jeune femme avait été immolée par le feu en pleine rue par son mari. © MEHDI FEDOUACH / AFP

Temps de lecture : 4 min

La mission d'inspection diligentée après qu'une femme a été tuée par son mari à Mérignac a pointé dans un rapport d'étape « une suite de défaillances » dans le suivi de ce dernier, ont annoncé mercredi 12 mai les ministres de la Justice et de l'Intérieur. La semaine dernière, dans cette ville située près de Bordeaux, un homme condamné à une peine de prison aménagée pour violences conjugales avait tiré sur sa femme avant de la brûler vive en pleine rue. Les ministères de la Justice et de l'Intérieur avaient déclenché aussitôt une mission d'inspection pour étudier, notamment, les conditions de remise en liberté et de suivi de cet homme. Si « l'institution judiciaire a failli », « je n'aurai pas la main qui tremble », avait prévenu vendredi le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti.

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Le rapport « révèle une suite de défaillances qui peut être reprochée à différents acteurs dans la communication et la coordination entre les services », ont annoncé les ministères dans un communiqué, ajoutant que le rapport définitif, qui proposera des mesures pour « y remédier », « devrait être remis le 10 juin » et sera rendu public. La mission devra déterminer si ces dysfonctionnements ont eu lieu « entre les différents services, ou à l'intérieur des services, ou s'il y a des responsabilités individuelles », a précisé une source gouvernementale.À LIRE AUSSI Luc Frémiot : « Ça me rend fou d'entendre dire que la parole s'est libérée ! »

Mardi 4 mai, Mounir B., âgé de 44 ans et déjà emprisonné pour violences conjugales en 2020, a poursuivi dans la rue sa femme, Chahinez, mère de trois enfants. Il lui a tiré plusieurs coups de feu dans les jambes avant de l'asperger d'un liquide inflammable alors qu'elle était encore en vie et d'y mettre le feu. L'homme a ensuite mis le feu au domicile de la victime, âgée de 31 ans.

Un profil inquiétant

Mounir B., à la double nationalité franco-algérienne, avait été condamné le 25 juin 2020 à Bordeaux à 18 mois de prison, dont 9 avec sursis, pour « violences volontaires par conjoint » en récidive, sur son épouse. Il avait été remis en liberté en décembre avec, entre autres, l'interdiction d'entrer en contact avec sa femme, condition qu'il n'avait pas respectée. Elle avait porté plainte mi-mars au commissariat de Mérignac pour une nouvelle agression.Mais l'homme, recherché par la police, était resté « introuvable », selon les autorités.

L'homme n'était pas équipé d'un bracelet électronique antirapprochement, un dispositif qui a fait ses preuves en Espagne et été introduit en France à partir d'octobre dernier pour tenter d'enrayer les féminicides (90 en 2020, après 146 en 2019). L'objet s'accroche à la cheville des conjoints ou ex-conjoints violents et permet de les géolocaliser et de prévenir en cas de possible danger. Un système d'alerte se déclenche lorsque ces derniers s'approchent trop de leur conjointe ou ex-conjointe, qui garde toujours un boîtier avec elle, et les autorités sont immédiatement prévenues.À LIRE AUSSI Violences conjugales : quand le dépôt de plainte devient parcours du combattant

« Il n'y a pas une réelle coopération »

Ces bracelets « n'ont pas vocation à rester dans les tiroirs », a déclaré Éric Dupond-Moretti après le meurtre de Mérignac. La chancellerie dispose de 1 000 bracelets antirapprochement (aussi appelés bracelets d'éloignement), mais les juridictions peinent pour l'instant à s'en saisir. Depuis leur lancement, seuls 76 ont été « prescrits » et 45 hommes en étaient équipés début mai, selon le ministère. La victime n'était pas non plus équipée d'un téléphone grave danger, qui permet aux femmes d'appeler à tout moment les secours via une touche dédiée. Ces téléphones sont « distribués au compte-gouttes », regrettent des associations, qui réclament qu'on en donne automatiquement aux victimes dès qu'il y a une tentative d'homicide.

« Ce drame et cette inspection des services doivent permettre une concertation entre les administrations, les associations et le Barreau », a réagi Me Solène Roquain-Bardet, qui était l'avocate de Chahinez depuis février dernier. Du côté de la police, Éric Marrocq, secrétaire régional Nouvelle-Aquitaine du syndicat Alliance, a indiqué n'être « pas surpris » par les conclusions du rapport d'étape, en soulignant que, si les enquêteurs ont des « contacts » avec l'administration judiciaire, « il n'y a pas une réelle coopération » qui permette de leur faire redescendre toutes les informations.À LIRE AUSSI « Je croyais qu'en déposant une plainte j'allais enfin être protégée »

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Commentaires (23)

  • liomrom

    Vous vous demandez comment ils peuvent vivre comme cela ?
    Mais ils ont fonctionnaires...
    Tout est dit.

  • incicur

    Donc pour le meurtre d'une femelle ? On eût mieux choisi avec « muliéricide » pour satisfaire l'acribologie étymologique. J'avais déjà souri narquoisement quand des femelles se sont affublées du pseudo : « femen », une autre forme latine de « femur » ; ce qui aurait fait ricaner l'adolescent Rimbaud ! Mais si l'on veut absolument considérer que les femmes ne sont pas des hommes comme les autres... Ça me convient très bien.

  • antonio21

    Aucune sanction digne de ce nom ne sera affligé à un magistrat. On l'a vu pour l'affaire d'Outreau où le juge Burgaud, malgré ses défaillances, s'est vu nommé à la Cour de Cassation et a bénéficié d'une promotion par la suite.