À partir du 1er juillet , la Sécurité sociale financera 14 jours de plus de congé paternité
[Actualisé] Après les précisions apportées par le gouvernement, un décret publié le 12 mai 2021 détaille la mise en application du congé paternité de 28 jours annoncé par Emmanuel Macron. Le deuxième parent devra obligatoirement prendre 7 jours de congés juste après la naissance, quoiqu’en dise son employeur. Un nouveau dispositif qui coûtera 520 millions d’euros par an à la Sécurité sociale.
Mis à jour
14 mai 2021
Emmanuel Macron l’avait annoncé le 23 septembre 2020: la durée du congé paternité, actuellement de 14 jours, doublera pour atteindre 28 jours à partir du 1er juillet 2021. Le gouvernement, qui présentait le 29 septembre son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021, en a détaillé les contours.
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Le congé de 28 jours pris par le deuxième parent sera, s’il est salarié, pris en charge pour trois jours par son employeur, comme aujourd’hui, et pour 25 jours par la branche famille de la Sécurité sociale (contre 11 actuellement). En cas de naissance multiple, le congé sera allongé d’une semaine, comme c'est le cas actuellement. Avec cette mesure, la France rejoint le peloton de tête des pays les plus en pointe sur cette question, en cinquième place derrière notamment la Finlande et le Portugal.
Grosses disparités
La mesure s’appliquera aux salariés du régime général et agricole, aux agents de la fonction publique, aux salariés des régimes spéciaux. Pour les indépendants, qui ne bénéficient pas des trois jours employeurs, la prise en charge du congé passera à 25 jours "Sécurité sociale" au lieu de 11. Le congé paternité et sa nouvelle durée s’appliqueront également en cas d’adoption.
Par cette mesure, le gouvernement espère améliorer l’égalité femmes-hommes en permettant aux pères de s’investir dans l’éducation de leur enfant dès sa naissance. Dans son dossier de présentation, il regrette que "le congé de paternité ne progresse plus". Alors que 66 % des pères prenaient, en moyenne, ce congé en 2003, ils sont aujourd’hui 67%. Avec de grosses disparités en fonction des situations professionnelles : 88% des fonctionnaires utilisent ce droit, 80% des salariés en CDI, mais seulement 48% des salariés en CDD et 32% des travailleurs indépendants.
7 jours de congés obligatoires
Pour lutter contre ces disparités, qui pénalisent les plus précaires, le projet de loi introduit une grande nouveauté : le deuxième parent devra obligatoirement prendre 7 jours de congé, sur les 28 auxquels il a droit, "juste après la naissance". Le gouvernement parle d’une "interdiction d’emploi" de la part de l’employeur durant ces 7 jours, justifiée par le besoin de soutenir la mère et l’enfant dans une période de grande vulnérabilité.
Précisions apportées dans le décret publié le 12 mai 2021: les trois autres semaines pourront être prises plus tard, mais dans les six premiers mois de vie du nouveau né. L’allongement du congé paternité concerne bien le "deuxième parent", sans distinction de genre ni de statut marital. Ce dernier devra prévenir son employeur de la date prévisionnelle d'accouchement au moins un mois avant, idem pour avertir son manager de ses dates de congés souhaitées. Aucune évolution du mode d'indemnisation n'est prévue.
Déficits supérieurs à 20 milliards d'euros pour plusieurs années
Lors de la présentation du PLFSS 2021, Olivier Dussopt, ministre des Comptes publics, a insisté sur la volonté du gouvernement de maintenir cette dépense du congé paternité - estimée à 260 millions d’euros en 2021, le double pour une année pleine ensuite -, alors même que le déficit de la Sécurité sociale s’annonce abyssal. Il sera en effet de 44,4 milliards d’euros en 2020 (environ 5 milliards d’euros en 2019) et de 27,1 milliards d’euros en 2021. "La Sécurité sociale subira des déficits supérieurs à 20 milliards d’euros durant des années", a conclu Olivier Dussopt. Jusqu'en 2024 en tout cas.
Selon les prévisions gouvernementales, les cotisations sociales, qui représentaient 76% des recettes du régime général de la Sécurité sociale en 2019, diminueront de 5% en 2020, représentant une perte de 20 milliards d’euros de recettes cette année. Mais Bercy compte sur un rebond des rentrées de 7% dès 2021, "sous l’effet de la reprise économique". Mais des dépenses supplémentaires sont prévues, liées notamment au "Ségur de la santé" (5,8 milliards d’euros de revalorisation des salaires des soignants, 1,7 milliard d’euros d’investissements dans les hôpitaux), et bien sûr à la crise sanitaire (4,3 milliards d’euros budgétés pour les tests, les masques, la vaccination éventuelle).
Parmi les réformes nécessaires pour revenir à l’équilibre, Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, a cité celle des retraites. "Aucun sujet" ne sera interdit, a-t-il indiqué.