Brésil : le ministre de l’Environnement accusé d’avoir favorisé le trafic de bois d’Amazonie

Très critiqué en raison de la hausse de la déforestation sous le gouvernement Bolsonaro, le ministre de l’Environnement brésilien, Ricardo Salles, a été la cible, mercredi, de perquisitions après avoir été accusé de favoriser le trafic de bois d’Amazonie vers l’Europe et les États-Unis.

La police fédérale enquête sur un « important réseau criminel transnational de facilitation de contrebande de bois », dans lequel seraient impliqués « des autorités comme le ministre Ricardo Salles, d’autres fonctionnaires et des entreprises », a noté le juge Moraes.
La police fédérale enquête sur un « important réseau criminel transnational de facilitation de contrebande de bois », dans lequel seraient impliqués « des autorités comme le ministre Ricardo Salles, d’autres fonctionnaires et des entreprises », a noté le juge Moraes. (Photo Sergio Lima/AFP)

Un arrêt du juge de la Cour suprême, Alexandre de Moraes, a autorisé ces perquisitions, ainsi que la levée du secret bancaire du ministre, qui a nié catégoriquement toute malversation. D’autres perquisitions ont été menées, mercredi matin, au ministère de l’Environnement, à Brasilia, et dans différents locaux de l’État de São Paulo (sud-est) et du Para (nord), dans le cadre de cette vaste opération qui a mobilisé 160 policiers.

La police fédérale enquête sur un « important réseau criminel transnational de facilitation de contrebande de bois », dans lequel seraient impliqués « des autorités comme le ministre Ricardo Salles, d’autres fonctionnaires et des entreprises », explique le juge Moraes dans son arrêt.

« La façon dont l’enquête a été menée a induit le juge (de la Cour suprême) en erreur, donnant l’impression qu’il y aurait eu une collusion (au ministère) pour favoriser » le trafic de bois, a réagi le ministre.

« Ces accusations n’ont aucun sens, (…) le ministère a toujours agi dans le respect des règles, avec bon sens et équilibre, et ce sera démontré dans la conclusion de l’enquête », a-t-il poursuivi.

Dix hauts fonctionnaires du ministère et de l’agence de protection environnementale Ibama ont été suspendus de leurs fonctions.

L’un d’eux est Eduardo Bim, président de l’Ibama, agence publique dont les opérations de contrôle de fraudes environnementales ont été fortement affectées par des coupes budgétaires, selon plusieurs ONG écologistes.

Greenpeace s’est félicitée du fait qu’Eduardo Bim ait été écarté de son poste mais a également réclamé le « départ immédiat » du ministre Salles.

« Aujourd’hui, malheureusement, pour lire des informations sur la politique environnementale du Brésil, il faut aller dans la rubrique faits divers », a renchéri Marcio Astrini, du collectif d’ONG Observatoire du Climat.

L’arrêt du juge Moraes suspend, par ailleurs, l’application d’une décision de l’Ibama datant de février 2020 qui permettait des exportations de bois sans autorisation préalable des autorités environnementales.

Selon la police fédérale, cela aurait permis « la régularisation de plus de 8 000 livraisons de bois exportées illégalement » vers l’Europe et les États-Unis.

« Faire passer le troupeau »

Depuis sa prise de fonctions, Ricardo Salles, 45 ans, est l’un des membres les plus impopulaires du gouvernement et un caillou dans la chaussure du président Bolsonaro, qui lui a pourtant régulièrement renouvelé son soutien.

L’inexpérience en matière environnementale du jeune ministre avait été très critiquée à son arrivée, et il a, depuis, multiplié les déclarations polémiques sur les défenseurs de l’environnement ou les indigènes d’Amazonie.

En avril 2020, le ministre avait déclaré, au cours d’une réunion ministérielle pendant laquelle il ignorait être enregistré, qu’il souhaitait profiter du fait que les médias étaient concentrés sur la pandémie de coronavirus pour assouplir les normes environnementales.

Il avait utilisé une expression devenue emblématique : « passar a boiada » (faire passer le troupeau de bovins), signifiant : faire avancer l’assouplissement des normes.

« Nous espérons que cette opération (de mercredi) marquera le début de la fin de ce passage de troupeau », a souhaité, dans un communiqué, Thais Bannwart, de l’antenne brésilienne de Greenpeace.

« Les Brésiliens sont fiers de leur patrimoine environnemental et ne méritent pas que leur pays renvoie cette image aussi honteuse dans le monde à cause d’une politique environnementale désastreuse », poursuit-elle.

Le mois dernier, l’ancien chef de la police fédérale dans l’État d’Amazonas (nord), Alexandre Saraiva, avait été limogé après avoir accusé le ministre Salles de favoriser le trafic de bois illégal.

Mercredi, Alexandre Saraiva a célébré l’opération policière en citant un verset biblique : « Que la campagne s’égaie (…), que tous les arbres des forêts poussent des cris de joie ».

Entre août 2019 et juillet 2020, la déforestation a augmenté de 9,5 % par rapport aux douze mois précédents, avec une surface déboisée équivalente à celle de la Jamaïque, le plus haut niveau observé depuis douze ans.

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Le président Jair Bolsonaro s’est engagé, récemment, à éradiquer la déforestation illégale d’ici à 2030, mais il n’a cessé d’appeler à la légalisation de l’agriculture ou des activités minières dans des zones protégées, y compris les territoires indigènes.

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