Chaque féminicide est un meurtre qui aurait pu être évité
Chahinez est morte brûlée vive par son ex-conjoint, dans une rue de Mérignac, le 4 mai dernier. Un meurtre conjugal de plus, le 39e depuis le début de l’année (il y en a eu d’autres depuis). Pas que. Cet acte de pure barbarie ajoute au crime de féminicide la circonstance aggravante de crime d’honneur.
Les hommes tuent leurs (ex-)conjointes parce qu’ils s’autorisent à s’en croire les propriétaires exclusifs, parce que dans leur conception de la toute-puissance du mari, du maître, il leur est insupportable de constater que ces femmes peuvent vivre sans eux, elles ne doivent donc plus vivre tout court.
Elle a hélas cru qu'elle serait protégée
Chahinez était une femme, une maman. Chahinez a déplu à son mari en ne se tenant pas au rôle de pièce rapportée du bled, docile, obéissante. Elle a vécu le rêve français qui pour bien des migrants vaut le rêve américain : elle a saisi les opportunités offertes. Elle travaillait. Elle a hélas cru qu’elle serait protégée de la violence de son conjoint par la France.
Ici, la dimension religieuse et culturelle joue un rôle important, dans le sentiment de légitimité de cet homme qui a prétendu après coup qu’il voulait juste lui donner une leçon en "la brûlant un peu". Elle joue aussi dans la clémence de la justice vis-à-vis de ses actes. C’est aussi ce relativisme qui tue, social (pour les pauvres) ou religio-culturel : "dans ces milieux-là, c’est comme ça qu’on aime".
Chaque féminicide est le meurtre de trop
Chaque féminicide s’avère être un meurtre qui aurait pu être évité. Ce pourquoi chaque féminicide est le meurtre de trop. Ce pourquoi aussi il est temps pour l’Etat et ses services de passer de l’obligation de moyens à l’obligation de résultat. L’obligation de moyens est devenue un alibi sémantique à l’inefficacité, permettant une déploration tout en exonérant tous les acteurs de toute responsabilité.
Depuis là-bas de l’échelle, jusqu’au ministre de la Justice, qui a osé cette défense : il y a 1 000 bracelets antirapprochement disponibles. Seulement 45 sont en fonction. Le premier chiffre est tout aussi odieux que le second. La défausse du ministre sur les services judiciaires locaux qui ne se saisissent pas de cet outil, irrite.
On ne prend pas au sérieux l’assassinat des femmes par leurs (ex) conjoints en France. Le 14 mai, un homme qui avait jeté sa femme par le balcon a été condamné à un an de prison ferme… sans mandat de dépôt. Il n’effectuera pas cette peine. Il avait déjà été violent pourtant… Mais cela ne suffit pas.
Une impunité qui pousse au crime
Les peines ne sont jamais à la hauteur et confortent les hommes dans une impunité pousse au crime. Après bien des plaintes et des interpellations, les médias ont cessé de romancer ces meurtres si ignobles et ne les qualifient plus de "drames conjugaux" ou "amoureux". Il est urgent que la police et la justice se mettent aussi à jour. L’homme qui a battu continuera à battre. Et il y a de fortes chances qu’il tue celle qu’il battait.
Chahinez blessée par balle et brûlée vive en France en 2021. Un crime barbare d’un autre temps ou d’un autre continent. La faute à pas de chance ? Non, la faute aux services de police. La faute surtout aux services judiciaires, prompts à libérer avant terme le mari violent incarcéré, sans s’avérer être capables d’assurer son suivi en s’assurant qu’il suivait précisément ses obligations.
Si la justice n’a pas les moyens de contrôler les condamnés à l’extérieur des prisons, qu’elle les laisse en prison. Qu’elle protège les femmes.
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