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Colonialisme : l’Allemagne reconnaît avoir commis « un génocide » en Namibie

Berlin va verser au pays plus d’un milliard d’euros d’aides au développement. Au moins 60 000 Herero et environ 10 000 Nama perdirent la vie entre 1904 et 1908 pendant la colonisation du territoire.

Le Monde avec AFP

Publié le 28 mai 2021 à 06h58, modifié le 28 mai 2021 à 10h03

Temps de Lecture 3 min.

Un crâne humain, appartenant au peuple Herero ou Nama, exposé lors d’une cérémonie à l’hôpital de la Charité de Berlin, le 30 septembre 2011.

L’Allemagne a pour la première fois reconnu, vendredi 28 mai, avoir commis « un génocide » contre les populations des Herero et des Nama en Namibie pendant l’ère coloniale.

« Nous qualifierons maintenant officiellement ces événements pour ce qu’ils sont du point de vue d’aujourd’hui : un génocide », a déclaré le ministre des affaires étrangères allemand, Heiko Maas, dans un communiqué.

Il salue dans cette déclaration la conclusion d’un « accord » avec la Namibie après plus de cinq ans d’âpres négociations sur les événements survenus dans ce territoire africain colonisé par l’Allemagne entre 1884 et 1915. Les colons allemands avaient tué des dizaines de milliers d’Herero et de Nama dans des massacres commis entre 1904 et 1908, considérés par de nombreux historiens comme le premier génocide du XXe siècle.

« A la lumière de la responsabilité historique et morale de l’Allemagne, nous allons demander pardon à la Namibie et aux descendants des victimes » pour les « atrocités » commises, a poursuivi le ministre. Dans un « geste de reconnaissance des immenses souffrances infligées aux victimes », le pays européen va soutenir la « reconstruction et le développement » en Namibie par un programme financier de 1,1 milliard d’euros, a-t-il ajouté.

« L’acceptation de la part de l’Allemagne qu’un génocide a été commis est un premier pas dans la bonne direction », a réagi Alfredo Hengari, le porte-parole du président namibien, Hage Geingob.

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Pas un dédommagement juridique

Le chef de la diplomatie allemande précise qu’il ne s’agit pas de dédommagements sur une base juridique, et que cette reconnaissance n’ouvre la voie à aucune « demande légale d’indemnisation ». Cette somme sera versée sur une période de trente ans, selon des sources proches des négociations, et doit profiter en priorité aux descendants de ces deux populations.

Les crimes commis pendant la colonisation empoisonnent depuis de nombreuses années les relations entre les deux pays. « On ne peut pas tirer un trait sur le passé. La reconnaissance de la faute et la demande de pardon sont toutefois un pas important pour surmonter le passé et construire ensemble l’avenir », a estimé le chef de la diplomatie allemande.

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Dans une volonté de réconciliation, l’Allemagne avait remis en 2019 à la Namibie des ossements de membres des tribus Herero et Nama exterminés, et la secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, Michelle Müntefering, avait alors demandé « pardon du fond du cœur ».

Un geste jugé nettement insuffisant par leurs descendants et les autorités namibiennes, qui exigeaient des excuses officielles et des réparations. L’Allemagne s’y était à plusieurs reprises opposée, invoquant les millions d’euros d’aide au développement versés à la Namibie depuis son indépendance, en 1990.

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Si le travail de mémoire en Allemagne sur la période nazie est généralement jugé exemplaire, celui sur la période coloniale en Afrique, de la deuxième moitié du XIXe siècle et du début du XXe, a été longtemps délaissé.

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Extermination de la rébellion

Les tribus hereros représentent aujourd’hui environ 7 % de la population namibienne contre 40 % au début du XXe siècle. Privés de leurs terres et de leur bétail, ils s’étaient révoltés en 1904 contre les colons allemands, faisant une centaine de morts parmi ces derniers. Envoyé pour mater la rébellion, le général allemand Lothar von Trotha avait ordonné leur extermination. Les Nama s’étaient soulevés un an plus tard et subirent le même sort.

Au total, au moins 60 000 Herero et environ 10 000 Nama perdirent la vie entre 1904 et 1908. Les forces coloniales allemandes avaient employé des techniques génocidaires : massacres de masse, exil dans le désert, où des milliers d’hommes, femmes et enfants sont morts de soif, et camps de concentration, comme celui tristement célèbre de Shark Island.

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Des ossements, en particulier les crânes de victimes, furent envoyés en Allemagne pour des expériences scientifiques à caractère racial. Le médecin Eugen Fischer, qui a officié à Shark Island et dont les écrits ont influencé Adolf Hitler, cherchait à prouver la « supériorité de la race blanche ».

Le Monde avec AFP

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