Après avoir brûlé une dizaine de jours au large du Sri Lanka, le MV X-Press Pearl a déversé un cocktail toxique de plastique, pétrole, et produits chimiques dans l’océan indien et sur les plages du pays. Cette catastrophe écologique aux dégâts incommensurables matérialise un risque largement sous-estimé, celui des pollutions conjuguées.

Les plages du Sri Lanka affrontent une marée de plastique grisâtre déversée par le porte-conteneurs MV X-Press Pearl qui a brulé une dizaine de jours au large de Colombo. Parti d’Inde pour rejoindre Singapour, le cargo qui transportait non seulement des produits très toxiques mais aussi 28 conteneurs remplis de millions de granulés plastiques, destinés à l’industrie de l’emballage, a fait naufrage.
Les autorités locales bataillent à la fois pour contenir une marée noire classique, empêcher 25 tonnes d’acide citrique de se déverser dans l’océan et nettoyer des plages envahies par du polyéthylène, dérivé du pétrole d’autant plus toxique que le plastique est brûlé et mélangé à du pétrole lui-même chaud qui fuite du bateau. C’est ce qu’on appelle l’effet cocktail d’une pollution chimique.
Ses conséquences écologiques sont beaucoup plus graves qu’une simple marée noire et difficiles à évaluer dans leur globalité : "L’impact de cette pollution chimique à proximité des côtes a des répercussions sur l’acidité et la température de l’eau. Cela altère la biodiversité et fait disparaître le plancton", explique le Dr K.Arulananthan, scientifique à l’agence nationale pour la recherche et le développement aquatique.
Un risque largement sous-estimé
Ce naufrage spectaculaire illustre dramatiquement la nature d’un risque plastique, encore largement sous-estimé. Les images diffusées dans le monde entier donnent une acuité particulière au mouvement récent de mobilisation des actionnaires de grandes entreprises américaines du pétrole, de la chimie mais aussi de la distribution comme Amazon, de faire plus de transparence sur leur empreinte plastique.
Elles montrent aussi comme l’explique très clairement Dorothée Moisan dans son livre "Les Plastiqueurs" que "La question a longtemps été mal posée : on s’est demandé où va le plastique et comment s’en débarrasser alors qu’il aurait fallu se demander d’où il vient et comment cesser de le produire".
Conséquence : les efforts et l’attention sont focalisés sur le recyclage et non la réduction de la production qui ne cesse d’augmenter. Le naufrage du MV X-Press Pearl servira peut-être à lancer un débat global sur la diminution de la production mondiale de plastique. Celui de l’Evergreen dans le canal de Suez en mars avait déjà illustré les limites atteintes par l’intensification du transport maritime qui conjugue les risques environnementaux et sociaux. 
Anne-Catherine Husson-Traore,  @AC_HT, Directrice générale de Novethic

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