La sinisation du Tibet se poursuit

Photo prise le 31 mai 2021 durant une visite organisée par le gouvernement chinois pour la presse à Lhassa, capitale de la région autonome du Tibet.  ©AFP - HECTOR RETAMAL
Photo prise le 31 mai 2021 durant une visite organisée par le gouvernement chinois pour la presse à Lhassa, capitale de la région autonome du Tibet. ©AFP - HECTOR RETAMAL
Photo prise le 31 mai 2021 durant une visite organisée par le gouvernement chinois pour la presse à Lhassa, capitale de la région autonome du Tibet. ©AFP - HECTOR RETAMAL
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Les militants pro-tibétains en exil parlent de Hong-Kong comme d'un "nouveau Tibet". Eux, tentent tant bien que mal de conserver une identité et une culture que Pékin voudrait effacer. Entretien avec Françoise Robin, professeure de langue et de littérature tibétaine à l’INALCO.

Avec
  • Françoise Robin Professeur des universités, responsable de la section Tibet à l’Institut national des langues et civilisations orientales, présidente de la Société française d'études des mondes tibétains

Les occasions sont rares de parler du Tibet. Déjà loin est le grand soulèvement de 2008 dans les régions chinoises de population tibétaine… Aujourd’hui, la « sinisation » de ces régions se poursuit mais à bas bruit, et la résistance se fait depuis l’extérieur. Sept millions de Tibétains en Chine, 150 000 répartis à travers le monde : les Tibétains en exil, qui votent pour un Parlement en exil, ont un gouvernement en exil… on l’appelle l’Administration centrale tibétaine, et un nouveau président a été élu récemment à sa tête, Penpa Tsering.

Retrouvez ici le dernier rapport de l'ethnologue Katia Buffetrille pour l'Iris : " Tibet, un pays oublié ?"

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Penpa Tsering ne parle pas chinois, ce qui est un problème de génération, mais il connait bien ses dossiers et il a une équipe. Il faut non seulement connaître la langue chinoise, mais connaître aussi le fonctionnement de la Chine. Et ça, c'est peut être un problème en ce moment dans ce gouvernement tibétain en exil qui manque de spécialistes. De toute manière, pour l'instant, il n'y a pas de dialogue. La Chine refuse le dialogue depuis 2010. Ça fait onze ans que les Tibétains demandent à le reprendre.    Françoise Robin

Aucun pouvoir international ne reconnaît le gouvernement tibétain en exil. Il y a des petites ambassades à droite, à gauche, mais il n'y a pas de représentation tibétaine à l'ONU. Le rôle de ce gouvernement est d'abord de reprendre le flambeau de la discussion avec Pékin, mais aussi d'administrer les 150 000 Tibétains en exil. Et là, il commence à y avoir des fractures internes. Et puis, alors que l'Inde [où se trouve le siège du gouvernement tibétain en exil] permettait de maintenir une identité tibétaine grâce à un réseau d'écoles et à la langue et parce qu'elle avait reconstruit des monastères, beaucoup de Tibétains désormais la quittent pour s'installer en Occident. Cela dilue la possibilité de poursuivre ou de continuer à bâtir une identité autour de la langue.      Françoise Robin

Même si la Chine est officiellement qualifiée de multinationale, car composée de plusieurs ethnies, Xi Jinping souhaite que tout ce monde-là va se fonde dans une seule nation qui est la nation chinoise, à inventer. En réalité, les Chinois ethniques (les Hans) représentent 92% de la population, ils sont déjà ultra-majoritaires. Les 8% qui restent doivent se conformer à la projection majoritaire de ce qu'est être chinois. Au-delà des facteurs culturels et linguistiques, le "rêve chinois" de Xi Jinping est de fabriquer des citoyens patriotiques, urbains, consommateurs, etc. Tout ce que ne sont pas les Tibétains ni les Ouïgours.       Françoise Robin

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