10 millions de tonnes : c’est la quantité de nourriture gaspillée chaque année en France. Pour lutter contre ce gâchis, dans lequel l’ensemble des acteurs de l’alimentation ont leur part de responsabilité, des initiatives se développent. C’est le cas de Too Good To Go, une application qui permet aux citoyens de récupérer à petit prix les invendus des commerces de leur quartier. Plus qu’une solution anti-gaspi, Too Good To Go est devenu aujourd’hui un acteur majeur de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Désormais implantée dans de nombreux pays, l’entreprise s’emploie à sensibiliser consommateurs, entreprises et pouvoirs publics, pour que chacun puisse s’engager au quotidien et changer ses habitudes.

Dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, le consommateur est souvent le premier à être pointé du doigt. Une étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe), qui estimait en 2016 que 18% de la production mondiale de nourriture destinée à la consommation humaine était gaspillée chaque année, démontre pourtant que c’est la production agricole qui porte la plus grande part de responsabilité dans ce gâchis. Ce secteur concentre en effet 32% de la nourriture gaspillée, suivi par la transformation (21%), la consommation à domicile (19%), la distribution (14%) et la restauration (14%).

Ces chiffres sont d’autant plus inquiétants au regard de l’impact délétère des pratiques agricoles industrielles. De larges pans de forêts primaires sont déboisés, la biodiversité est menacée, les rivières et les sols sont pollués et de nombreux animaux d’élevage sont maltraités pour produire des aliments qui ne seront parfois jamais consommés. De récentes études scientifiques suggèrent même que les déchets alimentaires mal gérés pourraient émettre des gaz toxiques. Au total, le gaspillage alimentaire représenterait à lui seul 8% des émissions de CO2. Dans un contexte d’urgence climatique, il est donc aujourd’hui crucial de lutter contre cette aberration à grande échelle.

Un déploiement au niveau mondial

La lutte contre ce fléau doit passer par des initiatives concrètes, comme Too Good To Go. Co-fondé par Lucie Basch en 2017, l’application a été pensée comme une solution du quotidien pour que chacun puisse s’engager à son échelle contre le gaspillage alimentaire. Le principe repose sur la connexion de commerçants qui ont des invendus et d’habitants du quartier qui vont pouvoir les récupérer à la fermeture, à prix abordables, sous forme de paniers surprise. Ce concept gagnant-gagnant permet au commerçant de ne pas jeter ses produits et de les faire découvrir à de nouveaux clients, tandis que le citoyen récupère de bons produits à petits prix et s’engage concrètement pour la planète.

Récupérer à petits prix les invendus des commerces du quartier, le concept simple de Too Good To Go.

Devenue aujourd’hui un acteur majeur de la lutte contre le gaspillage alimentaire, Too Good To Go compte 31 millions d’utilisateurs, 60 000 commerçants partenaires et a déjà pu sauver 60 millions de paniers. L’entreprise, active dans 15 pays d’Europe et dans plusieurs villes aux États-Unis, continue à développer son mouvement au niveau mondial. L’application sera ainsi lancée dans de nouvelles villes américaines, puis au Canada, en Irlande, et dans plusieurs pays d’Europe de l’Est d’ici la fin de l’année 2021. « La lutte contre le gaspillage alimentaire est un des trois leviers recommandés par le GIEC pour lutter contre le changement climatique. Nous avons dès lors une opportunité incroyable d’accélérer notre impact et c’est pourquoi nous lançons l’application dans tant de nouveaux pays dès cette année », déclare Lucie Basch, co-fondatrice et présidente de Too Good To Go.

L’enjeu-clé des dates de péremption

Mais l’ambition de Too Good To Go, c’est également d’inspirer et d’engager l’ensemble de la société dans la réduction du gaspillage alimentaire. C’est dans ce cadre que l’entreprise a initié en janvier 2020 le Pacte sur les Dates de Consommation, signé par 54 acteurs de la filière alimentaire. Parti du constat que les dates de consommation sont peu comprises des consommateurs et génèrent du gaspillage alimentaire tout au long de la chaîne d’approvisionnement, le pacte a pour objectif de créer une coalition d’acteurs qui s’engagent à clarifier leur signification et à harmoniser les dates.

L’éducation joue également un rôle majeur dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, et l’entreprise s’est engagée aux côtés d’écoles et d’universités pour sensibiliser les prochaines générations à cet enjeu. Les équipes de Too Good To Go ont ainsi développé tout un panel d’outils éducatifs et de ressources consacrées au gaspillage alimentaire, disponibles gratuitement pour les professionnels de l’éducation. Un premier livre – le “Guide Anti-Gaspi” – a également été publié en octobre 2019 pour donner des clés au consommateur afin de réduire le gaspillage à la maison. Car si la consommation domestique est loin de représenter la majorité de la nourriture gaspillée, 47 millions de tonnes d’aliments sont tout de même jetées chaque année par les foyers européens. Cette sensibilisation demeure donc primordiale, quand on sait que de légers changements d’habitude au quotidien peuvent faire la différence.

Des producteurs aux distributeurs, le gaspillage alimentaire concerne l’ensemble de la chaîne alimentaire.

Engager les villes de France dans la réduction du gaspillage

La réduction du gaspillage alimentaire tout au long de la chaîne de production nécessite aussi des politiques publiques et des règlementations ambitieuses, tant à l’échelle internationale qu’à l’échelle nationale. L’ONU s’est d’ailleurs fixé un objectif de réduction du gaspillage alimentaire de 50% d’ici 2030, et la prise de conscience de l’importance de ce défi commence à faire son chemin au sein des différents gouvernements du monde. Too Good to Go questionne régulièrement les politiques publiques à ce sujet, notamment au niveau des dates de péremption dont il est important d’accroître la transparence et la compréhension. C’est ainsi que l’entreprise a publié un Livre Blanc sur les dates de péremption, destiné aux acteurs de l’industrie alimentaire et aux pouvoirs publics, qui met en lumière les bonnes pratiques et la législation et suggère plusieurs recommandations.

L’expertise de Too Good To Go est donc de plus en plus sollicitée par les pouvoirs publics, des collectivités territoriales ou encore des acteurs locaux qui souhaitent mettre en œuvre des solutions efficaces. À l’occasion des dernières élections municipales, Too Good To Go a lancé la « Charte #MaVilleAntiGaspi » permettant aux candidats de s’engager à réduire le gaspillage alimentaire de leur ville à travers 7 engagements concrets. Près de 400 candidats ont signé la Charte et 41 d’entre ont été élus, le texte s’applique donc à un grand nombre de villes de France, parmi lesquelles Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, ou encore Nantes. « Nous sommes très fiers de voir que 41 communes, dont les principales grandes villes françaises, vont s’attaquer concrètement à ce fléau qu’est le gaspillage alimentaire à nos côtés, en proposant à des millions de citoyens des solutions efficaces et inspirantes » se réjouit Lucie Basch.

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Si c’est à l’État de légiférer pour encourager les bonnes pratiques et sanctionner les dérives, Too Good to Go s’emploie donc, comme d’autres acteurs, à inspirer et à donner le pouvoir à chacun de lutter contre le gaspillage alimentaire à son échelle. Réguler la surproduction industrielle demeure bien entendu un sujet clé pour la réduction du gaspillage alimentaire, mais le mouvement, qui remonte la chaîne alimentaire petit à petit, n’a pas pour le moment les ressources nécessaires pour s’attaquer de front à ce sujet. À terme, l’entreprise souhaite devenir le moteur d’un changement global pour contribuer activement à faire des bonnes pratiques la norme, afin de construire un système alimentaire durable.

Raphaël D.

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