TC Energy a pris sa décision “après une révision complète des choix qui s’offraient à elle pour la poursuite du projet en consultation avec son partenaire, le gouvernement de l’Alberta”, précise Radio-Canada.

Mais l’oléoduc, qui devait transporter plus de 830 000 barils de pétrole par jour entre la province canadienne de l’Alberta et les raffineries américaines du golfe du Mexique, était déjà moribond : le président américain, Joe Biden, avait bloqué le projet au premier jour de sa présidence, conformément à sa promesse de campagne.

Le projet avait rencontré une vive opposition “dès ses débuts, et était devenu le symbole du clivage politique sur le futur des énergies fossiles aux États-Unis”, observe le Financial Times. Lancé en 2008, Keystone XL avait été annulé par Barack Obama, puis relancé par Donald Trump, avant d’être à nouveau bloqué par Joe Biden.

Ce dernier considérait, comme les défenseurs de l’environnement, que la construction d’une nouvelle infrastructure destinée à “faire entrer encore plus de pétrole aux États-Unis était en contradiction avec la nécessité de répondre au changement climatique en choisissant des énergies plus propres”, explique le Wall Street Journal.

Peur des fuites

Le président américain jugeait en outre que “laisser le projet aller de l’avant saperait sa crédibilité à l’international, quand il tenterait de convaincre d’autres pays de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre”, ajoute le quotidien économique.

Les défenseurs de l’environnement exultaient mercredi, notamment Bill McKibben, fondateur de l’association 350.org et opposant de la première heure. “Quand ce combat a commencé, les gens pensaient qu’on ne pouvait pas terrasser les grandes compagnies pétrolières, a-t-il déclaré. Mais l’union fait la force, même contre les groupes d’énergies fossiles les plus puissants.”

Les écologistes n’étaient pas les seuls à s’opposer à l’oléoduc, précise le Washington Post. Le projet s’était aussi attiré les critiques de “fermiers, éleveurs et leaders indigènes, qui ne voulaient pas être forcés d’accorder un droit de passage (à TC Energy), et qui craignaient que l’oléoduc ne finisse un jour par fuir et polluer les réserves d’eau”.

“Il est difficile de souligner à quel point cette victoire est énorme pour les militants, et particulièrement pour les organisations indigènes, qui ont été en première ligne de l’opposition à Keystone X”, analyse Gizmodo. Une victoire qui devrait donner des ailes aux manifestants, qui livrent en ce moment même “d’autres combats contre des oléoducs”, notamment dans le Minnesota et le Michigan.

“Nouvelle dévastatrice”

Les partisans du projet, en revanche, ne cachent pas leur frustration. Le Toronto Star rappelle que la province de l’Alberta “avait investi 1,5 milliard de dollars canadiens [un peu plus de 1 milliard d’euros] dans Keystone, assortis de prêts garantis de 6 milliards de dollars”. La facture finale, pour le contribuable canadien, devrait s’élever à 1,3 milliard de dollars.

“Nous demeurons déçus et frustrés par les circonstances entourant le projet Keystone XL, notamment l’annulation du permis par le président [Joe Biden], qui devait permettre à l’oléoduc de passer la frontière”, a déclaré le Premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney, cité par le Globe and Mail.

Côté américain, les républicains sont furieux, à l’image du sénateur du Montana Steve Daines. “C’est une nouvelle dévastatrice pour notre économie, nos emplois, l’environnement et la sécurité nationale, et c’est entièrement la faute de Joe Biden”, a-t-il déclaré, cité par The Hill. “Il ne fait plus aucun doute que le président Biden est pieds et poings liés avec les extrémistes environnementaux.”

Quelques centaines de kilomètres – sur les 2 000 du projet – avaient été construits en 2020, essentiellement côté canadien. Au pic de la construction, les travaux avaient mobilisé quelque 2 500 ouvriers. TC Energy a indiqué qu’elle ferait en sorte de “fermer le chantier en toute sécurité”, sans préciser toutefois ce qu’il adviendra des tronçons déjà installés.