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Yémen : le mythique royaume de Saba livré au vandalisme et aux pillages

Des sites archéologiques détruits et des monuments vandalisés : la guerre qui sévit au Yémen depuis 2014 a grandement affecté le patrimoine archéologique de ce pays considéré comme le berceau de nombreuses civilisations anciennes. Le temple d’Awwam, dans la région de Marib notamment, l’un des monuments les plus importants de l’antique royaume de Saba, est aujourd’hui à l’abandon et livré aux pilleurs. 

Photos du temple de Awwam, qui fait partie du royaume de Saba, au Yémen. De gauche à droite : des stèles avec des inscriptions sabéennes jetées par terre ; des inconnus ont gribouillé au stylo sur des poutres. Photos postées le 1er juin sur Twitter.
Photos du temple de Awwam, qui fait partie du royaume de Saba, au Yémen. De gauche à droite : des stèles avec des inscriptions sabéennes jetées par terre ; des inconnus ont gribouillé au stylo sur des poutres. Photos postées le 1er juin sur Twitter. © @Salahish / Twitter
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Victimes collatérales du conflit entre les rebelles houthis et le gouvernement yéménite, plusieurs sites archéologiques ont été totalement ou partiellement détruits. Une étude publiée en 2017, par une association d'universitaires en France, recensait déjà une cinquantaine de sites historiques endommagés notamment par les frappes aériennes de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite contre les houthis, comme la capitale Sanaa, dont la vieille ville est classée au patrimoine mondial de l’Unesco, les vestiges anciens de la ville de Sirwah ainsi que plusieurs musées et mosquées anciennes.

Le temple d’Awwam, près de la ville de Marib, à 120 kilomètres à l’est de Sanaa, n’a pas été touché par les combats. Mais laissé sans surveillance à cause du conflit, il est livré aux pillages et aux dégradations. Salah M. Ishmael, un jeune chef d'entreprise passionné d'archéologie qui vit dans la région de Marib, a lancé une campagne sur les réseaux sociaux demandant aux jeunes notamment de le nettoyer et l’entretenir. 

“Des pillards mènent souvent des fouilles sauvages”

Le temple d’Awwam, aussi appelé Maḥram Bilqis, date de 3 000 ans. Ce temple est dédié au Almaqah, le dieu lune, qui est le dieu de l’ancien royaume de Saba. Des chercheurs américains y ont mené des fouilles dès 1951. Environ 300 stèles portant des inscriptions sabéennes [ancienne langue du Yémen] ont été extraites et étudiées. Ces pierres sont d’une grande importance, car elles documentent les conflits, les traités commerciaux, les accords de paix, les relations extérieures du royaume de Saba avec d'autres royaumes. 

Mais aujourd’hui, voilà, de nombreuses stèles, qui datent de 3 000 ans, sont juste jetées par terre, à côté de bouteilles plastiques. Des gens ont barbouillé au stylo sur les poutres, on retrouve des détritus un peu partout. C’est une catastrophe. 

Traduction : Le temple d’Awwam manque de tout. Pas de panneaux de signalisation, aucun personnel pour le gérer. Il n’y a pas de plaques plexiglas pour protéger, ni de barrières pour empêcher qu’on touche aux objets”.

Le site n’est pas surveillé, les pierres ne sont pas protégées par exemple par des plaques en plexiglas, ou des barrières pour empêcher qu’on touche aux objets. Des pillards y mènent souvent des fouilles sauvages, car il n’y a pas de gardiens ni de caméras de surveillance. 

Traduction : “Une partie de la dégradation subie par le temple d’Awwam (Maḥram Bilqis).[...] On a procédé à des fouilles sauvages notamment sur ce mur pour en extraire des pièces en bronze. On a probablement pensé qu’il s’agissait de pièces d’or.” Crédit photo : Abdullah al-Badaoui.

 

J’ai donc lancé une campagne via mon compte Twitter pour inviter surtout les jeunes, universitaires, militants d'association, à participer à des campagnes de sensibilisation et de nettoyage, et aussi pour faire pression sur les autorités, notamment l’Organisation générale des antiquités et des musées du Yémen (GOAM), pour qu’elles agissent.

Traduction : “Un enfant de 12 ans qui s’improvise gardien d’un temple qui a 3 000 ans d’âge. Le plus célèbre et ancien temple du Yémen et de la péninsule arabe, Awwam. Un enfant, une porte et une clôture endommagées, c’est le sort des sites historiques les plus importants du Yémen.”

 

Traduction : Sauvez ce qui peut être sauvé du temple d’Awwam. Si les autorités locales et le gouvernement sont négligents, où sont les initiatives citoyennes ? Aux étudiants : vous pouvez organiser une campagne de sensibilisation et de nettoyage[...].”

 

J’ai aussi créé récemment un groupe Facebook avec des amis pour recenser tous les sites archéologiques du Yémen, menacé, car il y a des sites qui sont en bien plus mauvais état que celui d’Awwam, sans susciter une quelconque inquiétude. 

Il y a par exemple la cité de Yathûl, ville phare du royaume antique de Ma'in, construite également il y a 3 000 ans, dont les murs ont été détruits dans un bombardement de la coalition. 

La rédaction des Observateurs a tenté de joindre l’Organisation générale des antiquités et des musées du Yémen pour savoir si des mesures sont prises pour protéger les sites archéologiques. Nous publierons leur réponse si elle nous parvient. 

La guerre qui sévit au Yémen depuis 2014 oppose des rebelles chiites houthis au gouvernement d'Abdrabbo Mansour Hadi, reconnu par la communauté internationale et soutenu par une coalition militaire menée par l’Arabie saoudite. La guerre a fait plus de 233 000 morts et plus d'un million de déplacés.

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