Elisabeth Badinter 1:30
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Mathilde Durand , modifié à
Sur Europe 1, la philosophe et femmes de lettre Elisabeth Badinter alerte sur le danger couru par "notre civilisation". "Souvent l'Histoire est tragique. Lutter contre les acquis de cette civilisation peut nous mener très loin", rappelle-t-elle, déplorant le manque conscience des enjeux des citoyens et des dirigeants. 
INTERVIEW

Une alerte. Elisabeth Badiner, philosophe et femmes de lettre réagit sur Europe 1 aux bouleversements de la vie politique française et au climat actuel dans la société. "J'ai le sentiment que les habitants des démocraties n'ayant pas connu vraiment de guerres, de violences depuis la dernière Guerre mondiale, ont tout simplement oublié que les civilisations sont mortelles", assure-t-elle. "Souvent l'Histoire est tragique. Lutter contre les acquis de cette civilisation peut nous mener très loin." Et d'ajouter : "J'ai presque l'impression que c'est notre civilisation qui est en danger."

"Nous avons la chance de vivre, en Occident d'ailleurs, dans des régimes qui sont démocratiques, où on assume les libertés d'expression, où on a le droit à la critique, on a le droit de parler et j'ai le sentiment qu'on est en train d'essayer de nous censurer, de nous interdire d'exprimer notre opinion. Je trouve ça très grave", explique la philosophe. 

"Nous reculons sur nos exigences"

Elle déplore un recul sur des valeurs communes entamées depuis plusieurs années. "Ca commencé il y a très longtemps, cette déliquescence de la protection de nos libertés. Souvenez-vous, dans les années 1980, les pacifistes étaient à l'Ouest et les Russes avaient pointé contre l'Occident ses fusées. Et le slogan était déjà 'Plutôt rouges que morts'. Ce qui voulait dire que nous étions prêts à reculer sur nos valeurs", rappelle Elisabeth Badinter. "C'est vrai qu'une civilisation meurt quand certains, qui veulent imposer des valeurs et des principes qui ne sont pas les nôtres, avancent eux, et que nous ne défendons pas, nous reculons sur nos exigences." 

Elisabeth Badinter, engagée depuis très longtemps dans des combats pour l'universalisme, la laïcité cet contre les communautarismes, s'inquiète d'une montée de l'individualisme. "Il y a un individualisme tel que le combat collectif est devenu plus difficile aujourd'hui qu'à d'autres époques", constate-t-elle. "L'universalisme est maintenant considéré comme un gros mot", déplore la femmes de lettre. "L'universalisme, c'est un objectif à atteindre qui tient compte du concept d'humanité, de ce qui ce qui nous rassemble et pas ce qui nous distingue. Et je pense que le développement du communautarisme anglo-saxon, tel que nous le voyons apparaître, c'est une arme absolument redoutable contre la démocratie", dénonce-t-elle.