Recherche asphyxiée par le manque de moyens et les complexités administratives, production industrielle trop souvent délocalisée à l’étranger, opacité dans la fixation des prix, pénuries croissantes dans les hôpitaux et les officines… « La France du médicament ne va pas bien », s’alarme le rapport de la mission d’information sur le médicament de l’Assemblée nationale, présenté mercredi 23 juin. Fruit de six mois de travail, le diagnostic − qui s’étale sur 220 pages, et décline une trentaine de propositions − n’est certes pas nouveau.
Ces dernières années, les alertes sur le déclassement de l’Hexagone − tant par les acteurs institutionnels que par les acteurs de la société civile, et même, par les industriels pharmaceutiques − ont été nombreuses. Mais « le constat dressé, plutôt incisif, qui dénonce à la fois le manque de stratégie politique sur le médicament, le sous-investissement public ou encore la financiarisation du secteur de l’industrie pharmaceutique, détonne avec certains rapports publics plus conformistes », note l’économiste de la santé, Nathalie Coutinet, maîtresse de conférences à l’université Sorbonne Paris-Nord.
Sans en être le révélateur, la crise sanitaire a braqué les projecteurs sur les failles du secteur
Faut-il y voir une conséquence du Covid-19 ? Sans en être le révélateur, la crise sanitaire a braqué les projecteurs sur les failles du secteur. A l’image des pénuries d’anesthésiques et d’antidouleurs observées dans les hôpitaux lors de la première vague de Covid-19. Un sujet loin d’être anecdotique, les ruptures d’approvisionnement de médicaments étant en hausse constante depuis plusieurs années.
« Le nombre de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur déclarés en rupture d’approvisionnement est ainsi passé de 404 en 2013 à 1 499 en 2019, et a été multiplié par 20 en dix ans », souligne le rapport, qui recommande, outre la mise en place d’une base de données « consolidée et informatisée » sur la chaîne d’approvisionnement des médicaments essentiels, le relèvement des sanctions prévues contre les laboratoires en cas de rupture de stock.
Autre remède préconisé par les rapporteurs : la création d’un groupement à but non lucratif ou d’un réseau d’acteurs publics et privés, capable de produire les médicaments essentiels soumis aux risques de pénurie.
Un haut-commissariat aux produits de santé
De façon générale, « il faut refonder toute notre chaîne du médicament », prévient le député Jean-Louis Touraine (LRM), corapporteur de cette mission d’information, qui dénonce les « petites mesures » prises ces deux dernières décennies, qui ne font que « rapiécer, là où il faudrait des habits neufs ». Pour cela, il s’agit d’abord de pallier « l’absence de stratégie globale en matière de médicaments » en France, explique le député Pierre Dharréville (GDR), qui préside la mission d’information.
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