Séparée de la mère biologique, cette maman homosexuelle de Rouen se bat pour revoir son fils

Cécilia, à Rouen (Seine-Maritime), a saisi la justice : elle n'a aucun droit sur son fils de 3 ans, qu'elle a eu avec son ex-compagne, parce qu'elle n'est pas sa mère biologique.

Cécilia, 30 ans et habitante de Rouen (Seine-Maritime), a eu un fils avec son ex-compagne en 2018. Séparée depuis l'été 2020, elle n'a aucun droit sur son enfant, n'étant pas la mère biologique. Elle se bat pour le revoir.
Cécilia, 30 ans et habitante de Rouen (Seine-Maritime), a eu un fils avec son ex-compagne en 2018. Séparée depuis l’été 2020, elle n’a aucun droit sur son enfant, n’étant pas la mère biologique. Elle se bat pour le revoir. (©Pixabay)
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L’absence de texte de loi, dans ce cas précis, ébranle des vies, sépare des êtres d’une même famille. Une personne homosexuelle peut se voir priver d’un droit quelconque sur l’enfant qu’elle a eu avec son ancien partenaire, parce que la rupture scelle son statut de beau-parent, ou plus techniquement de « parent social« . C’est le cas de Cécilia, habitante de Rouen (Seine-Maritime), qui n’a plus vu son fils de 3 ans depuis septembre 2020. L’enfant, né en janvier 2018, vit avec sa mère biologique, de qui Cécilia s’est séparée à l’été dernier.

Sur le papier, le lien de parenté entre Cécilia et le petit Maël* ne fait pas de doute. D’un point de vue juridique, aucun texte de loi ne protège ses intérêts en ce sens, car le couple n’était ni marié, ni pacsé. Elle demeure ainsi, aux yeux de la loi, la partenaire de la femme qui a porté l’enfant, sans aucune filiation avec lui. Mais avoir un enfant était bien « un projet commun », selon Cécilia, 30 ans.

Des attestations, photos… comme preuves

Elle et son ex-compagne, Charlène*, se rencontrent en 2013. Elles franchissent le cap de la maternité en 2017, par le biais de l’insémination artificielle dans une clinique de Barcelone, c’est Charlène qui porte l’enfant. En 2019, l’histoire d’amour se complique, et se termine définitivement à l’été 2020. Cécilia, qui ne voit pas le petit garçon pendant deux mois à cette période, se tourne vers une avocate.

Un premier procès pour qu’elle obtienne la garde alternée de l’enfant se solde par un échec, en décembre 2020. « Etant donné qu’il n’y a pas de texte de loi existant, je n’avais aucun droit », déplore-t-elle. Elle lance une deuxième procédure, pour cette fois-ci obtenir la garde en tant que tierce personne. « C’est un droit dont peuvent disposer les grands-parents, une marraine, un oncle, une tante, ou toute personne qui a partagé la vie de l’enfant depuis toujours, et qui a un lien affectif fort avec lui », poursuit la jeune femme. 

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Elle espère, si elle obtient gain de cause, avoir son fils un week-end et un mercredi sur deux, ainsi que la moitié des vacances scolaires. Mais pour cela, Cécilia doit prouver sa légitimité.

Pour prouver mon lien avec Maël, j'ai regroupé des attestations. De la sage-femme, qui m'a vue présente à l'accouchement, du pédiatre, de mes proches, mais aussi des amies d'enfance de mon ex-compagne. Mon nom est inscrit sur les papiers du baptême de mon fils, et j'ai aussi des tas de photos où l'on apparaît ensemble.

CéciliaMaman homosexuelle, qui veut récupérer la garde de son fils.

Autre preuve qui, selon la Rouennaise, ne laisse aucun doute sur la solidité passée du foyer : « En juin 2018, peu après la naissance de Maël, nous sommes retournés à la clinique de Barcelone pour une nouvelle insémination artificielle. Nous avions décidé, cette fois, que c’est moi qui porterais le bébé. Mais cela a été retardé, à cause de raisons professionnelles », poursuit Cécilia. Son témoignage, elle souhaite qu’il ait un rôle préventif, car « on ne connaît pas vraiment nos droits ». Aujourd’hui, elle a dépensé 4 000 euros de frais de justice.

« Des procédures d’une violence terrible »

Pour Céline Cester, présidente de l’association Les Enfants d’Arc-en-ciel, spécialisée dans les questions de parentalité, le mariage pour tous n’est pas un droit, mais un devoir.

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En France, quand on est homosexuel, on n'a pas le choix de se marier. C'est la seule option pour avoir des droits sur ses enfants. Mais les conditions de mariage, pour certaines femmes, sont un vrai frein. Et le pacs n'ouvre pas de droits.

Céline CesterPrésidente de l'association Les Enfants de l'arc-en-ciel.

Son association accompagne une quinzaine de femmes en France dans la même situation que Cécilia. Elles-mêmes animent des groupes de soutien, pour les autres. Ces privations d’enfants subies par les « parents sociaux » sont, pour la présidente, des « problématiques récurrentes », qui mènent bien souvent à « des procédures d’une violence terrible ». 

« Il n’y a pas de filiation reconnue, ces femmes se retrouvent en tant que tiers. Si l’issue [d’un procès] leur est favorable, elles obtiennent un droit de visite et d’hébergement. Mais cela ne permet pas d’être reconnue comme un parent », poursuit Céline Cester. Elle confirme que la justice prend en compte plusieurs paramètres, dont, effectivement, la solidité du projet parental commun.

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Un texte de loi adopté le 29 juin

Toutefois, il pourrait y avoir un nouvel « outil juridique », mis en place dans un futur très proche, « au troisième trimestre de 2021, on l’espère ». Il s’agit du projet de loi bioéthique, qui devrait être définitivement adopté mardi 29 juin 2021 par l’Assemblée nationale. Il contient en effet une réforme de la filiation : les couples de femmes devront passer devant le notaire pour une reconnaissance anticipée de l’enfant, qui élève la conjointe qui n’a pas porté l’enfant au rang de parent à part entière, à égalité avec sa compagne.

Le texte prévoit également l’ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) aux couples lesbiens et aux femmes célibataires, au même titre que les couples hétérosexuels.

*Les prénoms ont été changés

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