Les "Mercury 13" : 13 femmes pilotes américaines qui rêvaient de voler dans l'espace

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Les "Mercury 13" : 13 femmes pilotes américaines qui rêvaient de voler dans l'espace

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Une partie des Mercury 13 lors du départ d'Eileen Collins pour l'espace, en 1995. De gauche à droite : Gene Nora Jessen, Wally Funk, Jerrie Cobb, Jerri Truhill, Sarah Rutley, Myrtle Cagle et B. Steadman
Une partie des Mercury 13 lors du départ d'Eileen Collins pour l'espace, en 1995. De gauche à droite : Gene Nora Jessen, Wally Funk, Jerrie Cobb, Jerri Truhill, Sarah Rutley, Myrtle Cagle et B. Steadman
- @Nasa

Dans les années 1960, 13 femmes pilotes ont passé des tests conçus par le médecin de la NASA Randy Lovelace dans l'espoir de devenir astronautes. Ce programme indépendant de la NASA n'a pas pu aller au bout. Wally Funk, qui s’envolera à 82 ans dans l’espace ce 20 juillet, était l'une d'entre elles.

La première Américaine s'est envolée pour l'espace en 1983. Il s'agissait de Sally Ride. Avant elle, deux femmes étaient allées dans l'espace, dont la Russe Valentina Tereshkova dès 1963. Pourtant, dans les années 1960, un groupe de 13 femmes américaines était déjà volontaire pour monter à bord des engins spatiaux. Ces pilotes aguerries ont participé à une expérimentation menée par Randy Lovelace, le médecin de la Nasa chargé de tester les capacités physiques et psychiques des astronautes de "Mercury 7". Ce programme privé, organisé indépendamment de la Nasa dans les locaux du Docteur Lovelace au Nouveau-Mexique, avait pour but d'évaluer les capacités de ces femmes à devenir astronaute. Ce groupe de femmes, surnommé des décennies plus tard les "Mercury 13" ont pour cela passé les mêmes tests que les hommes, avec parfois plus de succès. Mais malgré leur détermination, elles n'ont jamais accompli leur rêve. Sauf une, bientôt : Wally Funk, qui à 82 ans doit enfin décoller vers les étoiles ce 20 juillet dans une fusée Blue Origin avec le milliardaire Jeff Bezos.

Wally Funk a rêvé toute sa vie de s'envoler pour l'espace, par Fiona Moghaddam

1 min

Un programme lancé en dehors de la Nasa

Au début des années 1960, William Randy Lovelace, médecin et chef des sciences de la vie à la NASA, est chargé de recruter les astronautes du programme Mercury 7 dont Alan Shepard et John Glenn. Ces hommes passent une série de tests et d’examens, parfois éprouvants physiquement. Et Randy Lovelace s’interroge : comment des femmes, parmi les meilleures pilotes américaines, réagiraient à de tels tests ? Généralement plus petites et plus légères que les hommes, elles seraient des candidates idéales pour partir dans l’espace, notamment en raison de l’exiguïté des vaisseaux. C’est ainsi que démarre cette expérimentation, qui n’avait rien de secrète précise Margaret Weitekamp, directrice du département Histoire de l’espace au Musée national de l’Air et de l’Espace de la Smithsonian Institution et autrice de "Right stuff, wrong sex : America’s firts women in space programm".

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En effet, dans son édition du 29 août 1960, le magazine américain Life consacrait un article à Jerrie Cobb, la première de toutes les femmes de "Mercury 13" à avoir effectué les tests. L’article évoque "un programme officieux financé et mené par la Fondation Lovelace à Albuquerque, au Nouveau-Mexique" dont le secret a été dévoilé lors du salon international de l’espace à Stockholm. 

Randy Lovelace a rapporté que les capacités de Jerrie Cobb à résister aux contraintes de l’espace sont comparables à celles des hommes. (…) Les femmes astronautes auraient même certains avantages : elles ont une masse corporelle plus faible, utilisent bien moins d’oxygène et ont besoin de moins de nourriture (…) Avec des résultats si favorables, il semble inévitable que les vols spatiaux habités seront à l’avenir mixtes.                            
Extrait de l'édition du 29 août 1960 du magazine Life

Après la parution de cet article, Wally Funk, âgée d’une vingtaine d’années à peine mais déjà aviatrice professionnelle, demande à prendre part à ces essais. "Certaines femmes ont été recrutées pour le programme et d’autres se sont portées volontaires une fois qu’elles en ont entendu parler, détaille Margaret Weitekamp. Wally Funk était très jeune à cette époque, et n’aurait peut-être pas attiré l’attention des organisateurs qui recherchaient des pilotes avec une solide expérience. Malgré son jeune âge, Wally Funk avait déjà suffisamment d’heures de vol pour faire partie des volontaires aux tests."

L’astronaute John Glenn, accompagné de médecins de la Nasa, en février 1962, avant son premier vol orbital
L’astronaute John Glenn, accompagné de médecins de la Nasa, en février 1962, avant son premier vol orbital
- @Nasa

Dans une interview télévisée diffusée en 1963, Jerrie Cobb raconte avoir été contactée en 1959 par le Dr Lovelace et le général Don Flickienger, qui a également supervisé ce programme pour des femmes astronautes. "Ils rentraient d’une réunion scientifique à Moscou où ils avaient entendu dire que les Russes allaient former des femmes cosmonautes. Ils pensaient qu’il fallait faire quelque chose et m’ont demandé si je serai la première femme à passer les tests d’astronaute, je n’ai pas hésité une seconde", témoigne Jerrie Cobb.

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C’est ainsi qu’a été lancé ce programme, communément appelé Mercury 13. Toutefois, Margaret Weitekamp précise ne jamais utiliser l’expression "Mercury 13" pour qualifier cette expérimentation car "inventée par un producteur de télévision dans les années 1990. C’est donc inexact et historiquement trompeur" car la NASA n’avait rien à voir avec ce programme. 

Au total, "25 des meilleures pilotes ont été invitées à passer les tests, 19 ont accepté et 13 les ont passés", raconte Martha Ackmann, journaliste et autrice de "The Mercury 13 : the untold story of thirteen american women and the dream of space flight". Ces 13 femmes pilotes étaient : Jerrie Cobb, Irene Leverton, Mrtyle K Cagle, Janey Hart, Gene Nora Stumboug, Jerri Sloan, Rhean Hurrle, Sarah Gorelick, B Steadman, Jan Dietrich, Marion Dietrich, Jean Hixson et Wally Funk, la plus jeune d'entre elles.

Trois phases de tests prévues

Une partie de l’expérimentation se déroule au sein de la clinique privée de Randy Lovelace à Albuquerque, au Nouveau-Mexique. Il y a trois phases, pour un total de 75 tests d’après le magazine Life en 1960. La première phase consiste en des tests physiques durant une semaine. La deuxième permet de déterminer l’aptitude psychologique, elle dure quelques jours à Oklahoma City. Lors de la troisième phase, les participantes doivent passer des tests de simulation de vols spatiaux, dans la base aéronavale de Pensacola, en Floride. 

Jerrie Cobb et la capsule Mercury (photo non datée)
Jerrie Cobb et la capsule Mercury (photo non datée)
- @Nasa

Ces tests sont les mêmes que ceux réalisés par les hommes de Mercury 7. Et certains sont plutôt étranges, détaille Martha Ackmann.

Avaler un mètre de tuyau en caoutchouc pour déterminer la composition gastrique, pédaler sur un vélo à très forte résistance jusqu’à l’épuisement humain… À ce sujet, Wally Funk raconte souvent avoir battu John Glenn à l’épreuve du vélo. Ce n’est pas tout à fait vrai. Wally Funk avait demandé quelle était la plus longue durée atteinte pour ce test. La réponse était 10 minutes. Donc elle a pédalé 11 minutes avant de s’écrouler au sol car elle était allée bien au-delà de l’épuisement. Mais d’autres données étaient aussi analysées et sur celles-ci, Wally Funk n’a pas été la meilleure. Mais cela prouvait sa détermination, son courage et sa persévérance.                            
Martha Ackmann, autrice de "The Mercury 13 : the untold story of thirteen american women and the dream of space flight"

L’une des épreuves où les femmes ont mieux réussi que les hommes est celle qui s’apparentait à l’apesanteur. Il s’agissait d’être enfermé dans un réservoir d’eau où la température de l’eau était exactement la même que celle du corps, si bien qu’il était impossible de faire la différence entre son corps et l’eau. Sans lumière, sans son, sans odeur, cela plongeait le participant dans un isolement sensoriel. L’objectif était de mesurer combien de temps les participants étaient capables de rester ainsi et s’ils n’étaient pas victimes d’hallucinations. Wally Funk est restée plus de dix heures dans ce réservoir d’eau, bien plus que les hommes qui en sont sortis au bout de trois heures. 

Seule Jerrie Cobb termine l'expérimentation

Jerrie Cobb, aux commandes d’un engin permettant de simuler une navette spatiale en rotation, le 1 avril 1960
Jerrie Cobb, aux commandes d’un engin permettant de simuler une navette spatiale en rotation, le 1 avril 1960
- @Nasa

Une seule femme a effectué les trois phases de tests, Jerrie Cobb, exactement les mêmes que ceux passés par les hommes de Mercury. "C’était la meilleure pilote américaine", commente Martha Ackmann. C'est d'ailleurs sa réussite qui a encouragé le docteur Lovelace à poursuivre l'expérimentation avec d'autres femmes pilotes. Mais seules Wally Funk et Rhea Woltman Hurrle ont pu aller jusqu'à la deuxième phase de tests, à savoir les tests psychologiques. Pour les autres pilotes, l’expérimentation s’arrête là. "Toutes les autres s’apprêtaient à passer les deux prochaines phases lorsqu’elles ont reçu un télégramme de Randy Lovelace", commente Martha Ackmann. Il y expliquait que les autorités militaires demandaient l’autorisation de la NASA pour que les femmes utilisent les équipements militaires de Pensacola.

La NASA voyait ces essais comme une expérimentation indépendante et n’a pas voulu que les femmes la poursuivent. Elle craignait que cela fasse exploser le programme spatial américain. Que se passerait-il si une femme était blessée ou tuée ? Quelles seraient les conséquences pour le programme spatial ? Ce programme expérimental s’est donc arrêté. La question scientifique : "Les femmes peuvent-elles voler dans l’espace ?" s’est alors transformée en question politique.                                              
Martha Ackmann

Pour Margaret Weitekamp, la directrice du département Histoire de l’espace au Musée national de l’Air et de l’Espace de la Smithsonian Institution, l’objectif de la NASA à l’époque était de prouver que l’humain pouvait aller dans l’espace et une fois qu’il a été établi que les hommes s’en chargeraient, il n’était pas nécessaire d’inclure les femmes. Pour éviter que les femmes risquent leur vie dans l’espace, les astronautes de la NASA étaient recrutés parmi les pilotes d’essai et les officiers militaires qui pouvaient prendre ce type de risque.

La NASA n’a jamais envisagé sérieusement à l'époque le recrutement de femmes. La spéculation disant que les femmes s’adapteraient mieux dans l’environnement d’un vol spatial venait de la communauté scientifique qui cherchait à savoir si les femmes pouvaient avoir des avantages physiques par rapport aux hommes dans l’espace. (...) C’était une société très sexiste. Les femmes ne pouvaient facilement hypothéquer leur maison ou faire un emprunt pour une voiture sans la cosignature d’un père ou d’un frère. Les petites annonces des journaux listaient des emplois pour femmes ou hommes. On est avant la deuxième vague du féminisme aux États-Unis qui a soulevé ce genre d’inégalités.                            
Margaret Weitekamp

"C’était un monde d’hommes où les femmes n’avaient pas leur place" abonde Philippe Varnoteaux, docteur en histoire et spécialiste des débuts du spatial en France. "La NASA voulait des pilotes d’essai et cela n’existait pas chez les femmes. Certaines étaient pilotes mais dans le civil. C’était la raison officielle derrière laquelle s’est retranchée la NASA à l’époque" ajoute-t-il.

En mai 1961, dans une très courte brève, le journal Paris Presse écrivait : "Pas de femmes astronautes aux USA. 'Il n’y a pas de femmes astronautes à l’entraînement aux États-Unis. Nous ne recherchons pas d’équipages spatiaux féminins.' Un porte-parole de la NASA a ainsi démenti hier les informations d’une chaîne de télévision américaine."

Les femmes pilotes devant le Congrès américain

Face au refus de la NASA, les "Mercury 13" décident de ne pas en rester là. Jerrie Cobb et Janey Hart, qui était la femme d’un sénateur du Michigan, écrivent au président Kennedy et rencontrent le vice-président Johnson. Elles témoignent finalement devant le Congrès en juillet 1962, défendant le programme lancé par Randy Lovelace, comme le relate le documentaire "Mercury 13", de David Sington et Heather Walsh. 

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Je crois profondément que les femmes doivent jouer un rôle dans la recherche spatiale. En réalité, il m’est inconcevable de penser que le monde spatial soit résumé aux hommes, à la manière d’un club privé.                            
Janey Hart devant le Congrès, extrait du documentaire "Mercury 13"

Nous les femmes pilotes désirant participer à l’exploration spatiale, ne cherchons pas à alimenter une guerre des sexes. Nous demandons simplement une place dans l’avenir spatial de notre nation, sans discrimination. Nous demandons en tant que citoyennes à participer avec sérieux et sincérité à l'Histoire d’aujourd’hui, comme les femmes l’ont fait dans le passé. Aucune nation n’a encore envoyé des femmes dans l’espace. Nous mettons à votre service 13 femmes pilotes volontaires.                            
Jerrie Cobb devant le Congrès, extrait du documentaire "Mercury 13"

L’astronaute John Glenn qui, quelques mois plus tôt, avait été le premier Américain à voler en orbite, affirme lui que les femmes ne sont pas qualifiées pour devenir astronautes. Tous les astronautes sont à l’époque pilotes d’essai et détenteur d’un diplôme d’ingénieur, des formations dans lesquelles les femmes ne sont pas admises. Un courrier du vice-président Johnson clôt définitivement le chapitre. Il y écrit à la toute fin : "Arrêtons cela maintenant."

Les aviatrices Jerrie Cobb et Janey Hart lors de leur audition au Congrès, avec le président du sous-comité spécialement mis en place, le 17 juillet 1962 à Washington DC
Les aviatrices Jerrie Cobb et Janey Hart lors de leur audition au Congrès, avec le président du sous-comité spécialement mis en place, le 17 juillet 1962 à Washington DC
© Getty - Bettmann

Malgré leurs efforts, ces femmes n’ont jamais pu partir dans l’espace. Wally Funk a par exemple, de sa propre initiative, effectué le test de la centrifugeuse ou des tests de haute-altitude. "Elle était déterminée et créative pour trouver le moyen d’être prête si jamais l’expérimentation devait reprendre, raconte Martha Ackmann. Il a fallu attendre les mouvements des droits civiques et de libération des femmes pour permettre aux femmes de devenir astronautes."

"Ces tests n’ont jamais fait la différence, souligne Margaret Weitekamp. C’est assez révélateur de l’histoire des femmes, les progrès se font par à-coups avec des avancées et des reculs. Dans la littérature médicale, la réalisation de ces tests a permis de prendre en compte le corps des femmes. Mais il n’y a pas eu d’effets ensuite."

D’ailleurs, lorsque la Nasa a recruté des femmes pour qu’elles deviennent astronautes dans les années 1970, des nouveaux tests ont été mis en place. 

Valentina Tereshkova, une femme russe dans l’espace pour la première fois

Dans la course à la conquête spatiale que se menaient à l’époque les États-Unis et l’URSS, les Soviétiques n’ont pas hésité à envoyer une femme dans l’espace dès 1963. Valentina Tereshkova a donc été la première femme à effectuer un vol spatial. Ce qu’a déploré Jerrie Cobb qui en 1963 déclare être "extrêmement déçue" après avoir averti à de multiples reprises de ce qu’il se passerait si les États-Unis ne commençaient pas à mettre en place un programme pour des femmes astronautes. "La seule chose que nous pouvons faire à présent est d’être les deuxièmes", a-t-elle regretté… 

C’est le temps des premières. C’est-à-dire celui qui réalise un coup dans n’importe quel domaine de l’astronautique, que ce soit envoyer le premier homme dans l’espace, la première sonde vers la Lune, marque un point idéologique sur son adversaire. La question d’envoyer une femme s’est donc posée. Mais Korolev, qui était le maître d’œuvre du spatial soviétique, ne voulait pas de femme cosmonaute. Cela a donc été une décision politique, prise par Khrouchtchev. Il y avait là aussi une résistance des mentalités. La deuxième Russe à partir dans l’espace ne le fera qu’en 1982. Donc les mentalités machistes, sexistes ont perduré jusqu’au début des années 1980.                            
Philippe Varnoteaux, historien et spécialiste des débuts de la conquête spatiale

Les Mercury 13 au lancement d’Eileen Collins

Par la suite, des femmes ont régulièrement tenté d’être recrutées par la NASA. Le directeur des opérations du projet spatial Mercury, Walter C. Williams, cité dans Le Monde en avril 1963, exclut toute admission de femmes alors que le recrutement d’un troisième groupe d’astronautes est prévu quelques mois plus tard. En juillet 1963, Jerrie Cobb et deux autres femmes (leur nom n’est pas précisé) ont postulé parmi 271 candidats pour rejoindre le Centre d’entraînement spatial de Houston. Finalement, 71 pilotes militaires ont été sélectionnés pour éventuellement effectuer des vols spatiaux, tous des hommes. Un article du journal Combat le 6 avril 1966 fait mention de "six femmes [qui] ont présenté leur candidature mais on n’y a pas donné suite car aucune d’elles ne répondait aux exigences minimum", sans plus de précision.

L'astronaute Eileen Collins aux commandes de la navette spatiale Discovery, en février 1995
L'astronaute Eileen Collins aux commandes de la navette spatiale Discovery, en février 1995
- @Nasa

Pendant des années, Jerrie Cobb a tenté de relancer le projet de tests pour des femmes astronautes, sans succès. Il faudra attendre près de vingt ans, en 1978, pour que la Nasa ouvre finalement son programme spatial aux femmes. La première Américaine à partir dans l’espace sera alors Sally Ride, en 1983, vingt-trois ans après les premiers tests effectués sur Jerrie Cobb.

D’ailleurs, si la Nasa avait enfin évolué pour laisser entrer des femmes dans son corps d’astronautes, les mentalités n’avaient pas tant évolué non plus. L’historien Philippe Varnoteaux rappelle ainsi que Sally Ride était lesbienne mais ne l’avait pas annoncé. "Elle l’a caché, elle s’est même mariée à un homme pour pouvoir voler. Si la NASA avait découvert son homosexualité, elle n’aurait certainement jamais volé. Cela a pris du temps pour faire évoluer les mentalités", conclut-il. 

La première femme à piloter une navette spatiale sera Eileen Collins, en 1995. En hommage, Eileen Collins, pilote devenue astronaute, avait invité les Mercury 13 au décollage de sa fusée en 1995. Tout un symbole pour ces pionnières. Qui d’ailleurs "faisaient toujours du lobbying pour partir dans l’espace", se souvient Martha Ackmann. Elles ont écrit une lettre à la NASA leur demandant de prendre en considération la demande de Jerrie Cobb à partir dans l’espace ! C’était après que John Glenn décolle une nouvelle fois pour l’espace, à 78 ans. Evidemment, leur demande n’a pas été suivie."

Wally Funk dans l’espace, 60 ans plus tard

Un autre symbole se joue ce 20 juillet 2021 avec le départ de Wally Funk dans l’espace. L’aviatrice aujourd’hui âgée de 82 ans et aux 19 600 heures de vol, doit décoller à bord de la fusée New Shepard de Blue Origin, la société de tourisme spatial de Jeff Bezos. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux par Blue Origin, Wally Funk raconte à quel point elle est impatiente et heureuse de ce vol. Durant sa carrière, elle a appris à plus de 3 000 personnes à voler et dit avoir postulé à la NASA quatre fois. 

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Personne ne voulait de moi mais je ne pensais pas que je ne pourrai jamais aller là-haut. Dans ma vie, j’ai toujours franchi les obstacles. Ils m’ont dit ‘Wally tu es une fille, tu ne peux pas faire cela.' J’ai répondu 'Devinez quoi ?' Peu importe ce que tu es, tu peux toujours le faire si tu veux le faire ! Et j’aime faire des choses que personne n’a jamais faites.                            
Wally Funk, dans la vidéo publiée par Blue Origin

Wally Funk aura enfin sa première : en s’envolant dans l’espace, elle sera la première personne aussi âgée à dépasser la ligne de Karman, la frontière de l’espace. 

Photo non datée de Wally Funk, jeune pilote.
Photo non datée de Wally Funk, jeune pilote.
© AFP - Blue Origin

Et la France dans tout cela

"La France a créé le CNES en décembre 1961 pour se mettre en place au printemps 1962, commente Philippe Vernoteaux. Il y a une ébauche de politique spatiale qui a commencé deux ans auparavant à travers le comité des recherches spatiales mais il n'est aucunement question d'évoquer le vol d'un Français ou d'une Française car il n'y a pas les moyens pour. Il faudra donc attendre encore quelques années..."

Et même plusieurs décennies pour qu'une Française parte dans l'espace car ce n’est qu’en 1996 que Claudie Haigneré (à l’époque André-Deshays) devient la première Française et Européenne à partir dans l’espace. À ce jour, elle reste la seule Française à y être allée.