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TURQUIE. Les mères du samedi exhortent l’État à faire la lumière sur les disparitions forcées

TURQUIE / BAKUR – Depuis 1995, les proches des personnes (majoritairement des Kurdes) disparues/tuées par les forces paramilitaires ou la police turque réunis sous le nom de « Mères du samedi » organisent des veillées pacifiques et exigent qu’on leur rende leurs proches, vifs ou morts.
 
En 1995, les proches des disparus de forces ont créé l’Initiative des « Mères du Samedi » car ses membres étaient essentiellement les mères des disparus. Ces mères, dont certaines sont âgées de plus de 80 ans aujourd’hui, se réunissaient chaque samedi sur la place Galatasaray, à Istanbul. Elles demandaient qu’on leur rende leurs enfants, maris, parents disparus de forces après le coup d’État militaire de 1980 et l’état d’urgence des années 1990 dans les régions kurdes du pays. Leurs rassemblements pacifiques ont été interdits par le gouvernement dès le 25 août 2018, alors que les Mères du samedi célébraient leur 700ème rassemblement hebdomadaire. La police a attaqué la foule, blessé et arrêtés de nombreuses personnes dont une mère de plus de 80 ans.
 
Pour la quasi totalité des milliers de victimes des disparitions forcées, les familles ne savent pas ce que les disparus sont devenus. Sont-ils-vivants, morts, où sont leurs cadavres? Sans parler des auteurs des disparitions forcées qui jouissent de l’impunité totale…
 
Selon l’Association des droits de l’Homme (İnsan Hakları Derneği – IHD), entre 1992 et 1996, 792 disparitions forcés et meurtres par les paramilitaires (JITEM*) ont été signalés dans les régions kurdes de la Turquie.
 
Hier, la branche d’Istanbul des mères du samedi et de l’Association des droits de l’homme (IHD) ont commémoré la Journée internationale des victimes de disparitions forcées du 30 août.
 
Dans un communiqué, les deux organisations ont exigé que la Turquie signe et applique la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
 
Le communiqué disait : « Même si elle est marquée par de lourdes brutalités, un deuil et une torture sans fin, notre histoire est en réalité une lutte pour la vérité et la justice contre l’oppression et le déni. Nous appelons les autorités judiciaires à mettre fin à l’impunité existante et à mener à bien les enquêtes et poursuites concernant les disparitions en détention. Nous appelons le gouvernement à signer et à mettre en œuvre immédiatement la Convention des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
 
Nous appelons les mécanismes nationaux et internationaux de protection des droits de l’homme à prendre des mesures contre les violations graves subies par les proches des disparus, en tant qu’exigence de leur objectif fondateur. »
 
* Qu’est-ce que le JITEM?
JITEM (service de renseignements et antiterrorisme de la gendarmerie) a été actif dans le conflit kurde en Turquie. Après le scandale de Susurluk, les anciens premiers ministres Bülent Ecevit et Mesut Yılmaz ont confirmé l’existence de JITEM.
Selon Murat Belge de l’Université Bilgi d’Istanbul, qui a rapporté avoir été torturé en 1971 par son fondateur, Veli Küçük, JITEM est une incarnation de l’Etat profond. En d’autres termes, il est utilisé par « l’Establishment » pour faire respecter des intérêts nationaux présumés, ainsi que par l’aile militaire de l’Ergenekon, une organisation nationaliste turque clandestine. En 2008, les dénégations officielles de l’existence de JITEM ont commencé à s’effondrer devant les tribunaux, comme en témoignent les anciens membres de l’appareil de sécurité « d’État profond » turc qui ont participé à des activités secrètes et illégales au cours des dernières décennies dans le cadre de l’enquête Ergenekon. (Wikipedia)