Covid : un quart des formes sévères dues à une anomalie génétique ou immunologique
Des études scientifiques viennent confirmer que 20 à 25 % des patients qui développent une forme grave ont en fait une prédisposition génétique et immunologique. Cela corrobore le rôle clef joué par une protéine produite par le corps face au coronavirus : l'interféron.
Par Paul Turban
Ce sont des résultats qui vont sans nul doute améliorer la prévention et le traitement des cas graves de Covid-19. S'appuyant sur plusieurs études, dont deux publiées jeudi dans la revue « Science Immunology », l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris affirme que 20 à 25 % des formes sévères de Covid-19 sont dues à une prédisposition génétique et immunologique.
Dans la première étude publiée jeudi, l'équipe franco-américaine de chercheurs est partie du constat que les hommes étaient plus à risque de formes graves que les femmes . Or, les hommes ont un seul chromosome X, là où les femmes en ont deux. Les scientifiques ont donc séquencé le chromosome X d'hommes ayant fait une forme grave et ceux d'autres ayant eu une forme asymptomatique ou peu symptomatique.
Or, en comparant les séquençages, les chercheurs ont constaté qu'environ 1,3 % des malades graves avaient un variant du gène TLR7. Cette anomalie se trouve même chez 1,8 % des malades de moins de 60 ans. Or, ce gène TLR7 joue un rôle important dans la production d'interféron (IFN1), une protéine qui aide les cellules à lutter contre une infection au coronavirus.
Une explication de l'inégalité liée à l'âge
Dans la seconde publication , un déficit d'interféron est toujours en cause. Toutefois, ce n'est pas un problème génétique qui est à l'origine de ce manque, mais une anomalie immunologique. Dans le sang de 15 à 20 % des patients ayant fait une forme grave , les scientifiques ont constaté la présence d'autoanticorps qui s'attaquent à la protéine et empêchent donc son action bénéfique contre l'infection au Sars-Cov-2.
Selon cette étude, ces autoanticorps pourraient expliquer en partie pourquoi les plus âgés sont plus à risque de développer des formes graves de Covid-19. En effet, alors que des autoanticorps anti-IFN1 sont présents chez 0,2 à 0,5 % des moins de 65 ans, on en retrouve dans le sang de 4 % des septuagénaires, et 7 % des octogénaires. Cette hausse avec l'âge reste pour l'heure inexpliquée.
Améliorer la prévention et le traitement des formes graves
Ces données, qui confirment et précisent d'autres données déjà publiées il y a plusieurs mois , pourraient rapidement avoir des applications très concrètes. Des chercheurs français ont ainsi mis au point un test innovant qui pourrait permettre de détecter les patients à risque de formes graves reposant justement sur l'analyse de la quantité d'IFN1 présente dans le sang, et celle d'autoanticorps anti-IFN1.
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Une fois ces patients identifiés, il pourrait recevoir un traitement adapté pour compenser leur déficit d'IFN1. Il existe ainsi « des traitements basés sur d'autres types d'interférons non ciblés par les autoanticorps, à l'instar de l'interféron-beta recombinant », expliquait l'AP-HP il y a quelques jours. Une nouvelle arme éventuelle pour éviter l'engorgement des hôpitaux lors des flambées épidémiques.
Paul Turban