Un médecin tanzanien injecte une dose du vaccin développé par le fabricant américain de médicaments Johnson & Johnson - le vaccin Johnson & Johnson lors d'une campagne de vaccination de masse au stade Uhuru de Dar es Salaam, le 22 août 2021.

Un médecin tanzanien injecte une dose du vaccin développé par le fabricant américain de médicaments Johnson & Johnson, lors d'une campagne de vaccination de masse au stade Uhuru de Dar es Salaam, le 22 août 2021.

AFP

Le geste peut étonner, sauf quand il vient de la Corée du Nord. Jeudi dernier, Pyongyang a refusé trois millions de doses de vaccin chinois contre le Covid-19, proposant qu'elles soient offertes à des Etats qui soient davantage dans le besoin. Depuis le début de la pandémie mondiale, le régime coréen soutient que l'épidémie n'est pas arrivée sur son sol, ce dont doutent nombre d'experts. Et ce n'est pas le seul pays à bouder les vaccins puisque l'Erythrée n'a toujours pas reçu la moindre dose. Par ailleurs, d'autres réfractaires à la vaccination, ont tardivement décidé de changer de braquet : la Tanzanie et le Burundi ont réceptionné cet été leurs premières cargaisons de vaccins Covax - programme de solidarité de distribution de vaccins. Mais plus globalement, où en est la situation sanitaire dans ces pays où la vaccination est quasi inexistante ?

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En Corée du Nord, l'opacité règne en maître. Selon le régime le plus fermé de la planète dirigé par Kim Jong-un, il n'y aurait pas de Covid-19 à l'intérieur de ses frontières. Les 26 millions d'habitants sont pourtant "vulnérables à la maladie étant donné la sous-alimentation chronique qui, selon les Nations unies, touche plus de 40 % de la population", rappelle le South Morning China Post, quotidien de Hongkong. Au début de l'été, des doutes étaient apparus sur la situation sanitaire nord-coréenne. En effet, à la fin du mois de juin, le dictateur nord-coréen avait reconnu que son pays faisait face à une "énorme crise" liée à la pandémie, causée par plusieurs de ses cadres dirigeants et exposant la "sécurité du pays et du peuple". Mis à part ces déclarations, rien n'a été dévoilé sur l'ampleur de la crise du Covid-19. Selon d'autres experts, les Nord-Coréens pourraient attendre d'autres vaccins plus efficaces - expliquant le rejet de la cargaison chinoise la semaine dernière.

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Sur le continent africain, un autre pays ferme la porte à la vaccination : l'Erythrée. L'Etat dirigé par le président Isaias Afwerki recense selon les données de WorldinData, 6648 contaminations depuis le début de la crise. Au total, on compte 38 décès - un chiffre relativement bas comparé aux données européennes. S'il s'agit de l'une des rares grandes dictatures au monde à avoir échangé sur la pandémie, il est difficile de savoir si ces chiffres sont fiables. Une chose est sûre, l'Erythrée a mis en place des confinements pour endiguer l'épidémie. Mais les vaccins sont restés aux portes du pays situé sur la côte de la Mer Rouge. L'hebdomadaire l'Obs rapporte qu'au mois de mars, Asmara n'avait pas encore rendu les documents nécessaires à l'intégration du dispositif Covax. Sur le continent africain, l'Erythrée est désormais le seul à refuser la vaccination depuis que les derniers Etats réfractaires - la Tanzanie et le Burundi - ont dit "oui" au vaccin avec l'aide de la communauté internationale.

La Tanzanie et le Burundi changent de braquet

Entamée le 3 août, la campagne de vaccination se met en branle en Tanzanie. Au total, 300 000 personnes ont été immunisées dans ce pays d'Afrique de l'Est qui compte 58 millions d'habitants souligne La Croix Africa. L'important retard à l'allumage de la campagne vaccinale est à attribuer au défunt président "covidosceptique", John Magufuli, mort en juin 2021. Quand il était au pouvoir, celui qu'on surnommait "le bulldozer" répétait à l'envi que le coronavirus avait été éliminé par Dieu. Pendant plus d'un an, d'avril 2020 à juin 2021, aucune donnée n'a été publiée sur l'épidémie. Impossible donc de connaître le nombre des contaminations dues au Covid-19. Mais à la mort du président, les nouvelles autorités ont changé de ton admettant que le pays faisait face à une troisième vague de contamination cet été. Avec 858 cas et 29 décès officiels comptabilisés au 22 juillet, la hausse semble faible, souligne Le Monde.

Au sein de la société civile, l'Eglise tanzanienne avait tenté d'alerter à plusieurs reprises. Elle a annoncé plusieurs décès - 20 prêtres et 60 religieuses entre décembre 2020 et février 2021, de symptômes similaires à ceux du Covid-19, toujours selon La Croix Africa. De son côté, le Burundi a été, lui aussi, lent à la détente sur le volet de l'immunisation. En février dernier, le ministre de la Santé a affirmé qu'une campagne de vaccination n'était "pas encore nécessaire" car "95 % des malades du Covid guérissaient". Le président Evariste Ndayishimiye abondait lui aussi en ce sens déclarant que "le virus n'existe pas au Burundi". Plongées dans le déni, les autorités locales ont refusé des doses issues de l'initiative Covax car ils ne voulaient pas de vaccins encore "au stade expérimental". Finalement, elles changent d'avis fin juin : elles acceptent la cargaison Covax tout en précisant qu'elles ne seront pas responsables en cas d'effets secondaires.

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Ce changement de ton doit-il être attribué à un regain de l'épidémie dans le pays ? Le Burundi divulgue ses informations sur la propagation du Covid-19 au compte-gouttes. Selon les données recensées par WorldinData, le pays a enregistré 236 contaminations quotidiennes le 11 août - l'un des chiffres les plus élevés en six mois. Si certains pays refusent de vacciner leur population, cela ne suffit bien sûr pas à expliquer les faibles taux de vaccination sur le continent africain. Nombreux sont les régimes demandeurs de vaccins qui ont reçu leurs doses très tardivement à cause des pénuries. Alors que le nombre d'injections a dépassé la barre des 4 milliards de doses dans le monde, les disparités demeurent. Selon les Nations Unis, à peine 3% de la population africaine dispose d'un schéma vaccinal complet.

Hors du continent africain, d'autres peinent aussi à lancer leur campagne : c'est le cas d'Haïti, dernier pays des Amériques à avoir reçu des doses de vaccins - données par le gouvernement américain via Covax - à la mi-juillet. Alors que l'Etat des Caraïbes est plongé dans un chaos politique, social et économique, le coronavirus reste peu visible et médiatisé. Pourtant, une augmentation des cas dans ce pays aux infrastructures de santé dysfonctionnelles constituerait une nouvelle catastrophe. Pour l'instant, seul 0,2% de la population a reçu au moins une dose de vaccin au 27 août. Début septembre, on enregistrait seulement 20 cas du Covid-19 en moyenne sur sept jours après un pic chiffré à 50 contaminations quotidiennes mi-juillet. Au total, le pays a enregistré officiellement 20 977 cas et 586 décès.

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