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Salim Shaheen, cinéaste afghan : « Je ne sors plus, les talibans vont me punir »

Le réalisateur de séries Z et son comédien Farid Mohibi témoignent depuis Kaboul, où, traqués depuis la chute de la capitale, ils n’ont plus aucun avenir en tant qu’artistes.

Par  et

Publié le 10 septembre 2021 à 08h00, modifié le 11 septembre 2021 à 10h00

Temps de Lecture 3 min.

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Salim Shaheen, Qurban Ali et Farid Mohibi, à Cannes en 2017.

On les avait rencontrés au Festival de Cannes. C’était en 2017. Ils étaient venus présenter à la Quinzaine des réalisateurs un documentaire à la fois drôle et éclairant de Sonia Kronlund. Baptisé Nothingwood, le film racontait la rocambolesque épopée de Salim Shaheen, réalisateur afghan ne sachant ni lire ni écrire, conquérant, populaire et mégalo, qui tournait des comédies en VHS (110 au compteur) avec des moyens de fortune et une équipe réduite. « Kaboul, ce n’est ni Hollywood ni Bollywood, expliquait Salim Shaheen, c’est Nothingwood ! »

Accompagnant un pays plongé depuis quarante ans dans le chaos, le réalisateur défiait la bienséance islamique, dansait avec des femmes sur les plateaux de télévision, se moquait de tout, du pouvoir étatique comme des talibans. Lui qui avait échappé à des attentats, clamait : « Je suis plus fort que la mort ! »

Salim Shaheen, réalisateur : « Dans l’Afghanistan d’aujourd’hui, le cinéma n’a aucune place »

Aujourd’hui, il se cache quelque part dans Kaboul. « Je n’ai pas peur de la mort, confie-t-il au téléphone. Mais je ne sors pas dans la rue, parce que je n’ai pas envie d’être tué par les abrutis incultes. Mes films sont pleins de scènes de danse et de chant. Les talibans vont me punir. Ils sont passés deux fois à mon bureau. Heureusement qu’ils ne m’y ont pas trouvé. Ils me traitent de corrompu, parce que j’ai travaillé avec les étrangers et que j’ai voyagé à l’étranger. Avec ma famille, j’ai obtenu une lettre pour partir en France. Mais alors que nous arrivions à l’aéroport, l’attentat [revendiqué par l’organisation Etat islamique, le 27 août] a endommagé le bus et tout bloqué. Mes amis en France m’ont écrit pour me demander de rentrer chez moi. »

Depuis, il attend une aide hypothétique de l’étranger. Il a un passeport, mais cinq membres de sa famille n’en ont pas. Il a deux femmes (la polygamie n’est pas interdite en Afghanistan), cinq garçons et deux filles, l’une est médecin et l’autre aura son baccalauréat dans un an. L’un de ses fils a étudié dans le lycée français de Kaboul et parle la langue. « Si nous venons en France, il peut m’aider, assure-t-il. J’attends que les admirateurs du cinéma dans le monde m’aident. Les talibans sont les ennemis de l’art et du cinéma. Ils veulent appliquer leur propre loi. Dans l’Afghanistan d’aujourd’hui, le cinéma n’a aucune place. »

Idéologie rigoriste

Qurban Ali, l’acteur qui l’accompagnait à Cannes, un bel homme de 42 ans, père de famille, qui s’habillait en femme pour jouer devant la caméra les rôles féminins dans un pays qui n’a pas attendu la prise de pouvoir par les talibans pour faire régner une idéologie rigoriste, est, lui, en France.

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