
C’est un ambitieux projet que des fans de la saga Harry Potter attendent depuis quatre ans. Annoncé dès 2017, le « fanfilm » français The House of Gaunt : Lord Voldemort Origins, sur la genèse de l’ennemi suprême du sorcier, a été mis gratuitement en ligne mercredi 15 septembre.
L’équipe de tournage et le casting, composés de professionnels du cinéma entièrement bénévoles – qu’ils soient venus par passion pour la saga fantastique ou pour relever un défi technique –, ont préalablement présenté leur court-métrage d’une trentaine de minutes dans cinq salles de l’Hexagone à un public d’invités. La plupart étaient des contributeurs des trois campagnes de financement participatif qui ont permis de lever environ 62 000 euros, le budget du film.
Dès la diffusion de la bande-annonce sur YouTube, en février 2021, le film a suscité un certain engouement. La vidéo, qui a depuis dépassé le million de vues, laissait entrevoir la participation dans le rôle principal de l’acteur français Maxence Danet-Fauvel, révélé dans la série Skam et choisi parmi 300 candidats, ainsi que de nombreux effets spéciaux. Il faut dire que le réalisateur, Joris Faucon Grimaud, 27 ans, est avant tout dans la vie monteur de bandes annonces de cinéma et connaît autant les codes des blockbusters hollywoodiens que ceux de l’univers Harry Potter, qu’il affectionne depuis sa découverte, à l’école primaire. « J’ai toujours voulu être réalisateur », explique-t-il au Monde.
« Au moment de me lancer dans ma première réalisation, je me suis demandé s’il valait mieux faire un scénario original au risque de peu convaincre ou bien essayer de toucher beaucoup de gens via un “fanfilm” dans un monde que j’adore. Ce film est donc un moyen de faire plaisir aux fans comme de constituer un CV, de faire mes preuves, notamment dans le cinéma fantastique, genre encore peu développé en France. »

Il choisit alors de raconter la genèse de Voldemort, autrefois appelé Tom Jedusor, que la romancière créatrice de Harry Potter, J. K. Rowling, avait esquissé dans les tomes 2 (Harry Potter et la Chambre des secrets) et 6 (Harry Potter et le Prince de sang-mêlé) de sa saga. « Ce sont des passages qui m’ont marqué lorsque je les ai lus à 12 ans et que j’aurais aimé voir plus exploités dans les films [officiels] », détaille Joris Faucon Grimaud. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’une œuvre de fan se penche sur sa biographie : sorti sur YouTube en 2018, le court-métrage italien Voldemort : les origines de l’héritier a récolté plus de 17 millions de vues.
Quatre-vingts bénévoles pour douze jours de tournage
L’intrigue de ce nouveau court-métrage démarre au milieu des années 1920, en Angleterre, dans le cottage des Gaunt, la famille maternelle de Voldemort, héritiers peu flamboyants du mage noir Salazar Serpentard et défenseurs des théories extrémistes sur les magiciens de sang pur. Le synopsis aborde la rencontre entre Merope Gaunt et le moldu (sans pouvoirs magiques) Tom Jedusor senior, les parents de Lord Voldemort, mais aussi, trente ans plus tard, le début de sa quête sanglante d’immortalité.
Dix-huit mois de postproduction ont été nécessaires, notamment pour mettre en valeur les costumes et décors créés par l’équipe
Sans pour autant s’accorder trop de libertés d’interprétation par rapport à l’univers de la saga, à rebours de ce que font parfois les dizaines de milliers de fanfictions amatrices en ligne – et le plus souvent à l’écrit. « Bien sûr, il nous est arrivé de tourner des séquences de plusieurs minutes qui reposaient seulement sur deux lignes du livre, comme l’arrivée des aurors [brigade spéciale du ministère de la magie] pour arrêter le grand-père et l’oncle de Voldemort, et c’était intéressant de pouvoir étoffer, de le faire sur plein de petits détails. Mais The House of Gaunt respecte ce que J. K. Rowling a voulu raconter avant tout. On ne voulait pas non plus trop s’éloigner de la direction artistique des films [officiels]», assure Joris Faucon Grimaud, tout en défendant « une patte fantastique légèrement à la frontière de l’horreur, un ton parfois plus adulte. Comme dans les bouquins, finalement. » Le jeune réalisateur s’est également assuré du conseil de fans et grands connaisseurs de la série pour éviter toute erreur ou anachronisme.
Afin de donner corps à ce sombre récit, Joris Faucon Grimaud et l’équipe franco-britannique de quatre-vingts bénévoles ont tourné dans la langue de Shakespeare pendant douze jours répartis sur cinq sessions. La forêt de Rambouillet, le château de Fontainebleau et les rues de Senlis ont accueilli plusieurs séquences nocturnes. Un tournage terminé en septembre 2020 et qui s’est étalé sur trois ans en raison des plannings chargés des bénévoles, mais aussi de la pandémie de Covid-19. Dix-huit mois de postproduction ont été nécessaires, notamment pour mettre en valeur les costumes et décors créés par l’équipe, les quelque 250 plans réalisés avec effets spéciaux ainsi que la musique enregistrée spécialement pour le film.
« C’était une sacrée épreuve et on n’a pas eu tout le temps que l’on voulait. On a parfois dû renoncer à des plans mais il n’y a aucun regret ! », estime Joris Faucon Grimaud, qui entend garder la même équipe pour son prochain projet : un long-métrage dans le registre fantastique, toujours, mais avec cette fois un scénario entièrement original.
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