John et Martha forment un couple originaire de la communauté Marakwet, dans l’ouest du Kenya. À 40 ans, John peine à se remémorer un rapport sexuel avec sa femme où celle-ci n’a pas fondu en larmes, raconte la BBC. Chaque fois qu’il s’approche de Martha, excisée à l’âge de 15 ans, “elle recule, se recroqueville comme une enfant”, témoigne-t-il :

“Elle pleure en me suppliant de la laisser tranquille. Elle ne veut plus avoir de relations sexuelles.”

Bien qu’illégales, les mutilations génitales féminines sont fréquentes au Kenya, où une femme sur dix subit cette pratique considérée comme un rite de passage pour les jeunes filles entre 12 et 17 ans. Elles étaient une sur deux à être excisée en 1974, rappelle le site britannique qui a assisté à un atelier de sensibilisation destiné à pousser les hommes à lutter contre l’excision.

Sensibilisation

“C’est douloureux lorsque nous avons des relations sexuelles”, explique Martha, qui confie que sa première expérience a été “traumatisante”. La “grande douleur” qu’elle a ressentie alors l’a poussée à interrompre son mari.

“Je n’avais pas compris qu’une partie d’elle-même [sa vulve] avait été cousue, ne laissant que l’urètre et une toute petite ouverture vaginale”, explique aujourd’hui John. Il a compris l’atrocité de la pratique grâce à un atelier de sensibilisation mené dans son village.

Cette formation lui a fait changer d’attitude, raconte la BBC, l’éveillant au rôle qu’il pouvait jouer en tant qu’homme pour mettre un terme aux mutilations. Aujourd’hui, il refuse que sa fille soit excisée.

Les femmes excisent, mais les hommes décident

“Autrefois, si une personne refusait de subir l’excision, elle ne trouvait jamais de mari”, raconte Joséphine, excisée elle aussi. “Il s’agit d’une pratique culturelle profondément enracinée”, abonde le docteur Tamarry Esho, à l’origine de la fondation Men End FGM, qui forme des hommes à lutter contre l’excision :

“Dans les communautés qui pratiquent l’excision au Kenya, ce sont les femmes qui excisent leurs semblables, mais ce sont les hommes qui sont les décideurs. Pourtant, ils n’ont aucune idée de ce qui est excisé, comment, ni de l’ampleur des dommages.”

Pour les femmes excisées, ces alliés masculins font “toute la différence, surtout dans une société patriarcale”, souligne la BBC. Longtemps en proie à un sentiment d’impuissance, les femmes espèrent désormais compter sur l’évolution de la mentalité des maris pour éviter à leurs filles de suivre le même chemin de croix.