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Le chanteur R. Kelly est reconnu coupable de crimes sexuels

À l’issue d’un procès de six semaines considéré comme une étape majeure du mouvement #MeToo, le chanteur américain R. Kelly a été reconnu coupable d’avoir dirigé pendant des années un «système» d’exploitation sexuelle de jeunes femmes. Il risque la prison à vie

Le chanteur R. Kelly arrive au tribunal de Leighton à Chicago pour une audience concernant des accusations d’agressions sexuelles, le 7 mai 2019. — © Nuccio Dinizzo/AFP
Le chanteur R. Kelly arrive au tribunal de Leighton à Chicago pour une audience concernant des accusations d’agressions sexuelles, le 7 mai 2019. — © Nuccio Dinizzo/AFP

Le verdict est tombé. La star américaine déchue du R&B, Robert Kelly, a été reconnue coupable lundi par un tribunal de New York d’une série de crimes sexuels, dont celui d’avoir dirigé pendant des années un «système» d’exploitation sexuelle de jeunes femmes, dont des mineures.

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Ce procès est considéré comme une étape majeure du mouvement #MeToo: c’est la première fois que la majorité des plaignantes sont des femmes noires et qu’elles accusent un artiste noir.

Le chanteur de 54 ans, connu pour son tube mondial «I Believe I Can Fly», a également été reconnu coupable par le jury du tribunal fédéral de Brooklyn du crime de «trafic sexuel». R. Kelly était jugé depuis plus d’un mois notamment pour extorsion, exploitation sexuelle de mineur, enlèvement, corruption et travail forcé, sur une période allant de 1994 à 2018.

En détention provisoire

L’ex étoile afro-américaine du R&B, portant veste et cravate, n’a pas manifesté d’émotion particulière à l’énoncé de sa culpabilité. Masqué, il s’est contenté de baisser la tête et de fermer les yeux. L’un de ses avocats, Deveraux Cannick, a déclaré à la presse qu’ils étaient «déçus du verdict» et qu’ils envisageaient de faire appel.

Comme c’est très souvent le cas dans la procédure pénale aux Etats-Unis, la condamnation à une peine de prison sera rendue bien plus tard, en l’occurrence le 4 mai 2022 pour R. Kelly déjà en détention provisoire. Il risque la prison à vie.

Six semaines de procès

Durant les six semaines de procès à Brooklyn – dans une relative indifférence des grands médias américains – neuf femmes et deux hommes ont déclaré à la barre que R. Kelly avait abusé d’eux sexuellement, décrivant des viols, des prises de drogues forcées, des situations d’emprisonnement ou encore des faits de pédopornographie.

Nombre des victimes présumées ont raconté avoir rencontré la star lors de concerts, durant lesquels elles s’étaient vues confier un petit morceau de papier avec les coordonnées du chanteur par son entourage. Le chanteur, influent, pourrait faire quelque chose pour leur carrière musicale, leur promettait-on.

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A la place, toutes se sont fait «endoctriner» dans le sombre monde de R.Kelly, assurent les procureurs, contraintes à des rapports sexuels avec le chanteur et maintenues dans ce système par des «mesures coercitives».

Parmi elles, Sonja, qui a confié s’être rendue depuis l’Etat américain de l’Utah jusqu’au studio de R. Kelly à Chicago, pensant qu’il accorderait une interview à l’émission de radio pour laquelle elle effectuait un stage.

«Ce n’est pas un génie, c’est un criminel»

A la place, elle a déclaré s’être retrouvée piégée par ses associés dans une pièce sans fenêtre pendant des jours, avant qu’on ne lui donne à boire et de la nourriture l’ayant fait s’endormir. Elle a dit s’être réveillée sans sous-vêtements, en voyant R. Kelly remettre son pantalon.

Une autre femme a déclaré qu’il l’avait forcée à avorter, étant tombée enceinte de lui mineure. Quatre femmes ont affirmé qu’il leur avait transmis un herpès, sans les avoir averties être atteint de cette maladie.

«Ce n’est pas un génie. C’est un criminel. C’est un prédateur», a affirmé la procureure adjointe Nadia Shihata aux jurés. Sur un ton parfois moqueur, la défense a au contraire dépeint les victimes, dont certaines mineures au moment des faits, comme des groupies avides d’argent.

D’autres procès attendus

Tout au long du procès l’artiste est resté de marbre. Il a seulement semblé s’agiter lors du long réquisitoire de l’accusation, secouant la tête à plusieurs reprises. Robert Sylvester Kelly est accusé d’avoir perpétré ces crimes en toute impunité, profitant de sa notoriété. Il a toujours nié les faits.

Le verdict de ce procès n’est pas l’ultime épisode de cette saga judiciaire: R. Kelly a aussi été inculpé de nombreux abus sexuels à Chicago et au niveau fédéral dans les Etats de l’Illinois et de New York.