L’an dernier, Téo Didailler, 22 ans, était inscrit en bachelor à Sup’de com Montpellier, une école de communication privée à 7 300 euros l’année. Avec un père moniteur de voile et une mère esthéticienne à domicile, le jeune homme aurait eu du mal à financer ses études sans les 3 850 euros d’aide annuelle qui lui sont tombés du ciel. Rien à voir avec les bourses du Crous, attribuées selon les revenus des parents – Téo n’y est plus éligible depuis deux ans. Le miracle est venu du revenu minimum étudiant (RME) proposé depuis 2011 par sa commune d’origine, Plougastel-Daoulas (Finistère), 13 000 habitants. Une aide qui vise à accompagner les jeunes dans la poursuite de leurs études supérieures. En dix ans, 325 jeunes en ont bénéficié.
Dominique Cap, maire (divers droite) de Plougastel-Daoulas, a lancé cette initiative après avoir discuté avec l’une de ses administrées, dont la fille rêvait de devenir sage-femme : « Elle ne gagnait pas assez pour financer les études de sa fille, mais ses revenus ne lui permettaient pas de toucher une bourse. » En menant des recherches sur les dispositifs existants, Dominique Cap a découvert que la ville de Chenôve, dans la banlieue de Dijon, proposait depuis 1989 un « revenu minimum étudiant ». Il y voit là une sacrée bonne idée.
Depuis, une cinquantaine de villes en France – principalement petites ou moyennes, de tout bord politique – ont suivi : Grande-Synthe et Gravelines (Nord), Gannat (Allier), Vouziers (Ardennes), Poissy (Yvelines), Bolène (Vaucluse), Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie), Panazol (Haute-Vienne)… Alors que la pandémie de Covid-19 a mis en lumière la précarité dans laquelle vivent certains étudiants, leur dépendance vis-à-vis de revenus issus de petits boulots et l’insuffisance des bourses proposées par les Crous, la question du financement des études a refait à nouveau surface. Le RME, pensé comme un complément aux bourses d’Etat et autres dispositifs existants, pourrait-il être une solution ?
Des conditions et des montants variables
Le RME étant une aide locale et facultative, chaque municipalité fixe ses conditions d’attribution – ce qui n’aide pas les étudiants à s’y retrouver. Et ceux qui n’habitent pas la commune (eux ou leurs parents) ne peuvent pas y prétendre. « C’est le paradoxe de la décentralisation : les politiques locales mises en place en France depuis les années 1980 se révèlent indispensables pour pallier les failles du système national, notamment le coût de l’enseignement supérieur et le faible niveau de couverture des bourses d’Etat. Mais elles créent aussi des perdants », souligne Aurélien Casta, chercheur associé à l’université de Nanterre et de Lille, spécialiste des politiques publiques.
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