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Christine and The Queens dans la tourmente : aidez-la à trouver son nouveau nom d’artiste
Christine and the Queens, enfin, Chris.
Anadolu Agency via AFP

Christine and The Queens dans la tourmente : aidez-la à trouver son nouveau nom d’artiste

Crise identitaire

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Soucieuse de lutter contre toutes les discriminations, la chanteuse Christine and The Queens a (encore) voulu changer de nom en s'appelant Rahim. Mais comme il y a toujours plus woke que soi, l'artiste a été accusée d'appropriation culturelle. Aidons-la à se sortir de ce guêpier.

L’ultra-wokisme est un sport de combat sur terrain très glissant. Il faut se battre à chaque instant contre les oppressions, les très grandes, les toutes petites. Et la charge mentale est immense, car il faut sans cesse affronter la crainte, elle-même très oppressante, d’être en retard d’un wagon, d’une bataille, d’une offense. Pfffiou là là, quelle fatigue.

Cette semaine, c’est la chanteuse-danseuse précédemment connue sous le nom de Christine And The Queens qui s’est pris les pieds dans le tapis déroulant. Rappelons que depuis 2016, celle que ses parents ont prénommée Héloïse à la naissance (1988) s’est lancée dans un jeu plutôt casse-gueule consistant à changer de patronyme aussi souvent que de brosse à dents, l’opération « reboot permanent » présentant le double avantage de (tenter de) faire passer du recyclé pour du neuf tout en collant aux tendances intersectionnelles du marché des bons sentiments…

Rahim, parce que « je est un autre »

Tour à tour, Christine And The Queens s’était donc allégée de sa Queens, avant de s’automutiler du « tine » de Christine, ce qui fit naître Chris, version d’elle-même augmentée d’un message inclusif excellent pour le tiroir-caisse. Pas tout à fait homme et plus seulement femme, Chris l’androgyne devenait un produit à la fluidité 100 % bio-équitable fièrement affichée sur l’emballage. Malin, mais pas si neuf : le roi Bowie, comme tant d’autres de ses sujets, avait tracé la route (et avec quel talent !) au mitan des années 70.

Puis vint octobre 2021 – et là, l’accident, la sortie de route, le skateboard qui se dérobe sous les patins à glace. Un jour, Chris est devenue Rahim. Comme ça, sans prévenir… On imagine la mine déconfite du (de la) comptable de la maison de disques : « allô Héloïse, tu pourrais me passer Rahim s’il te plaît ? J’ai deux mots à lui dire… » Bref, Rahim ! Cinq lettres pour dire l’amour de l’autre, de l’étranger en chacun de nous. Rahim, parce que « je est un autre », c’est Rimbaud qui l’a dit. Rahim, parce que merde aux racistes, et vive ma liberté. Et pourquoi pas après tout ?

Tempête sur les réseaux sociaux

Sauf qu’au royaume des wokes, les couronnes de papier sont de plus en plus fragiles. Dès l’annonce de cet énième changement de nom, Chris (pardon, Rahim) s’est donc pris une bonne grosse tempête sur les réseaux sociaux : accusations outrées d’appropriation culturelle et/ou de « transracialisme », rien que ça. Pour ses juges, il-elle avait commis l’irréparable, ce joli nom arabe de Rahim étant incompatible avec le rosé de sa peau… Le procès fut scellé dans la minute, et Rahim (pardon, Chris) allait devoir renoncer à sa nouvelle étiquette, sous peine d’aller goûter aux flammes de l’enfer… Réaction de l’icône ? Un nouvel intitulé dégainé en un rien de temps : un point. Oui, un . Un point c’est tout. Même pas sur les i. Même pas virgule. Même pas d’exclamation.

Problème : un (.), ça ne ressemble à rien. On ne peut pas faire carrière en s’appelant (point). Il y a donc urgence, chères lectrices, chers lecteurs, à venir en aide à l’artiste brièvement nommé (point) (c’est-à-dire Rahim, c’est-à-dire Chris, c’est-à-dire Christine, c’est-à-dire Héloïse).

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Ensemble, unissons nos forces pour faire sortir (point) de l’ornière, et soufflons-lui nos idées : merci d’ajouter les vôtres en commentaires.

Idée numéro 1 :revenir à Christine And The Queens, mais retirer toutes les voyelles, c’est très tendance (enfin, disons que c’était très tendance en 2010, quand Madonna s’est auto-remixée en MDNA…) Dans le cas présent, ça donnerait Chrstnndthqns. Comment ça, c’est impossible à prononcer ?

Idée numéro 2 : taper un peu au hasard sur les touches alt, control et/ou command d’un clavier d’ordinateur. On ne sait jamais, sur un malentendu, ça peut sortir des solutions marrantes : º, œ, fi, ∂… ou encore des tas de trucs qui font un peu suédois ou norvégiens… Mais attention : !!! est déjà pris. Alt-J aussi. Et du côté des lettres capitales, éviter le A (Dominique), le L (Raphaëlle), le M (Mathieu), le H (Arthur) et le Z (Zorro).

Idée numéro 3 : renoncer aux fruits, aux animaux et aux trucs qui se mangent – c’est bon, on en a déjà pleins en stock : Pomme, Ours, I Am Un Chien, Tom Poisson, Petit Biscuit, Trois Cafés Gourmands, n’en jetez plus merci.

Idée numéro 4 : acheter un Boggle (ou emprunter celui de sa mamie) ; secouer très fort, respirer un bon coup, puis choisir quatre lettres à l’aveugle. Promettre de s’y tenir au moins jusqu’au prochain album.

Idée numéro 5 (la plus rentable selon nous) : prendre la nationalité galloise. Les musiciens et musiciennes gallois ont une chance de fou, de folle, leurs noms d’artistes ne ressemblent à rien de connu, et sonnent bien aux oreilles. Coup de cœur particulier pour les charmants Gorky’s Zygotic Minci.

Idée numéro 6 : renoncer à porter un nom. Complètement, et à jamais. C’est hyper capitaliste, un nom. En plus, c’est hyper réducteur. A mort les noms.

Idées numéro 7 : se choisir un nom d’artiste improbable, voire hideux, histoire de bien signifier au « système » qu’on ne marche plus dans ces petits combines de séduction phalocratolibérales. Premières pistes : Redressement fiscal ; Cancer de la gorge ; J’ai vomi sur ta mère ; Serpent pénis ; ou encore Y’a Pierre Ménès qui voudrait que tu le rappelles.

Idée numéro 8 : avoir recours à un générateur automatique de noms, on en trouve de très chouettes sur Internet. Si ça marche pour les partis politiques, ça doit bien marcher pour la pop.

Idée numéro 9 : accuser le chat : « Mon cher public, la semaine dernière, cette grosse andouille de Pepito a gambadé sur le clavier de mon MacBookPro 16 pouces acheté à New York City. Manque de bol, mon compte Insta était ouvert, et ouh là là, d’un coup de patounette malencontreuse, les lettres R-a-h-i-m sont apparues dans mon profil. Vous aurez évidemment rectifié de vous-même… Je vous embrasse fort, et on se retrouve bientôt dans les bacs avec ma toute nouvelle compil’. Kiss. Chris ».

Idée numéro 10 : faire plaisir à papa-maman et revenir sagement à Héloïse ?

Idées numéro 11, 12… à vous de jouer dans les commentaires.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne